Urologie: Nouvelle formation approfondie: urologie de la femme
Urologie

Urologie: Nouvelle formation approfondie: urologie de la femme

Schlaglichter
Édition
2017/04
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2017.02900
Forum Med Suisse 2017;17(04):0

Affiliations
a Klinik für Urologie, Kantonsspital, St. Gallen; b Service d’urologie, HUG, Genève; c Service d’urologie, CHUV, Lausanne; d Lausanne, e Ospedale regionale Bellinzona e Valli, Bellinzona; f Urologische Abteilung, Kantonsspital Graubünden, Chur, g Universitätsklinik für Urologie, Inselspital, Bern; h Klinik für Urologie, Stadtspital Triemli, Zürich

Publié le 24.01.2017

La nouvelle formation approfondie «Urologie de la femme», qui est entrée en vigueur le 1.1.2016, englobe un vaste spectre de problématiques urologiques survenant chez la femme. Dans l’article qui suit, la Société Suisse d’Urologie (SSU) souhaite présenter certaines affections typiques appartenant à ce domaine de spécialité, ainsi que les explorations urologiques qu’elles requièrent et les possibilités thérapeutiques disponibles.

Infections urinaires récidivantes

Chez les jeunes femmes sexuellement actives, les cystites aiguës surviennent fréquemment sans qu’il n’y ait de pathologie identifiable au niveau du système urogénital. Toutefois, si les symptômes persistent ou réapparaissent après une courte période malgré un traitement adapté aux résistances ou en présence concomitante d’une hématurie macroscopique, un examen urologique avec cystoscopie devrait être réalisé. La cystoscopie concluante permet tout particulièrement d’exclure un carcinome de la vessie (fig. 1), raison pour laquelle l’indication doit être posée plus généreusement chez les patientes âgées. De même, chez les patientes âgées victimes de cystites à répétition, il convient de rechercher un trouble de la vidange vésicale provoqué par une cystocèle obstructive ou un prolapsus, qui peuvent être corrigés de façon provisoire par pessaire et en l’absence de succès de la physiothérapie, par une intervention chirurgicale réalisée par voie vaginale ou abdominale, avec ou sans mise en place d’un treillis.
Figure 1: Vue cystoscopique d’une tumeur vésicale au niveau de la paroi latérale droite de la vessie. L’hématurie macroscopique indolore constitue le symptôme dominant classique, mais des problèmes d’impériosité mictionnelle ou des infections urinaires récidivantes peuvent également être présents.
Par ailleurs, en cas de survenue de plus d’un épisode de pyélonéphrite fébrile ou en cas d’antécédents de calculs rénaux, un bilan urologique approfondi du haut appareil urinaire par cysto-urétrographie mictionnelle (CUM), échographie et éventuellement uro-TDM s’avère indiqué. Il s’agit ici de trouver un reflux vésico-rénal comme cause des infections ascendantes ou d’identifier une source d’infection rénale, telle que des calculs infectieux, des foyers d’abcédation silencieux (fig. 2), etc.
Figure 2: Pyonéphrose obstructive due à un volumineux ­calcul pyélique et à un abcès au niveau du psoas. Les seuls symp­tômes de cette patiente étaient des urines troubles et un épisode unique de frissonnements 1 semaine ­auparavant.

Hydronéphrose liée à la grossesse

Au cours de la grossesse, 2–10% des femmes développent une hydronéphrose gravidique, le plus souvent asymptomatique. En cas de dilatation pyélocalicielle révélée à l’échographie, même si elle est importante, un traitement n’est pas nécessaire dans la mesure où la patiente ne présente pas de symptômes. Toutefois, en présence de douleurs au flanc résistantes aux analgésiques voire de pyélonéphrite fébrile, il convient de discuter avec la patiente de la mise en place d’un cathéter en queue de cochon (sonde JJ) dans l’urètre ou d’une sonde de néphrostomie. Ces deux options de dérivation peuvent être mises en place sous simple guidage échographique durant la grossesse et, si la patiente le souhaite, sous anesthésie locale. La présence d’un calcul urétéral est uniquement exclue de manière certaine après l’accouchement, grâce à une TDM faible dose sans injection de produit de contraste réalisée avant le retrait de la dérivation.

Fistule vésico-vaginale

Dans les pays en développement, on observe essentiellement des fistules vésico-vaginales par ischémie due à la non-progression du travail et des fistules vésico-vaginales traumatiques consécutives à une déchirure du périnée. En revanche, dans les pays développés, les fistules sont principalement post-radiques et post-opératoires (fig. 3). Dans de rares cas, les fistules vésico-vaginales peuvent également résulter d’un ulcère de pression lié à un pessaire, d’une tumeur ou d’un foyer d’endométriose. Le principal symptôme de fuite d’urine par le vagin, parfois interprétée à tort comme une incontinence d’effort, est exploré de manière plus approfondie par cystoscopie et colposcopie, ainsi que par IRM ou TDM, en fonction de l’anamnèse. Dépendant de la localisation de la fistule et des antécédents chirurgicaux, la prise en charge opératoire est assurée par abord vaginal ou abdominal. Pour ces deux voies d’abord, la dissection soigneuse de la fistule et son excision, la suture sans tension de la vessie en épargnant les ostiums, l’interposition d’un lambeau tissulaire (par ex. lambeau péritonéal ou graisseux) et la suture vaginale décalée sont d’une importance centrale. Il est souvent judicieux de poser des cathéters urétéraux immédiatement avant l’inter­vention, car de cette façon, les ostiums peuvent en permanence être clairement délimités et une fermeture accidentelle de ces derniers lors de la suture vésicale peut être évitée.
Figure 3: Fistule vésico-vaginale dans le cadre d’une cystocèle prononcée et d’antécédents de colporraphie antérieure. Flèche noire: Cathéter à demeure Ch 16 introduit dans la vessie par voie transurétrale. Flèche blanche: Cathéter à demeure Ch 10 introduit dans la vessie par voie vaginale par la fistule.

Exploration des hématuries

Toute hématurie macroscopique et toute hématurie microscopique mise en évidence par examen micro­scopique d’urines «propres», dépourvues d’infections et prélevées à mi-jet (chez les femmes, idéalement urine provenant d’une sonde à usage unique) devraient faire l’objet d’une mise au point par cystoscopie. Le test par bandelette urinaire fournit souvent des résultats faussement positifs pour les érythrocytes en raison de la présence de peroxydase, ce qui peut être causé par des urines très alcalines (avant tout en cas d’alimentation végétarienne), par l’usage de désinfectants cutanés, par la présence de liquide séminal ou par la présence d’hémoglobine ou de myoglobine libre. L’examen microscopique du sédiment urinaire permet d’examiner directement les érythrocytes présents à la recherche de formes glomérulaires, qui peuvent laisser conclure à une cause néphrologique de l’hématurie microscopique. Toutefois, dans ce cas également, il convient de réaliser une cysto­scopie afin d’exclure avec certitude un carcinome vésical ou d’autres causes d’hématurie (fig. 4). L’imagerie du haut appareil urinaire, qui fait aujourd’hui appel à l’uro-TDM, fait également partie du bilan des hématuries, permettant de rechercher des calculs rénaux, des néo­plasies, des malformations vasculaires, etc.
Figure 4: Foyer intravésical d’endométriose avec hématurie macroscopique dépendante du cycle menstruel et pollakiurie due à une capacité vésicale réduite.
En raison de leur plus faible consommation de nicotine, les femmes développent plus rarement un carcinome vésical que les hommes. Toutefois, elles présentent plus souvent un carcinome infiltrant le muscle, qui ne peut pas faire l’objet de résections par voie trans-urétrale et nécessite une cystectomie avec pose d’une dé­rivation urinaire continente (néovessie orthotopique ou réservoir cathétérisable) ou la réalisation d’une urostomie.

Hyperactivité vésicale et incontinence

La problématique de l’impériosité mictionnelle avec ou sans incontinence urinaire est appelée «vessie hyperactive» en langage grand public. En particulier en l’absence de réponse aux anticholinergiques ou au plus récent antagoniste des récepteurs bêta 3-adrénergiques mirabégron, il convient aussi impérativement d’exclure un carcinome vésical face à ces symptômes. En outre, la cystoscopie permet d’identifier d’autres causes à l’origine de symptômes d’impériosité, telles qu’un calcul vésical (fig. 5) ou des signes de cystite ­interstitielle (fig. 6). Le bilan englobe également la réalisation d’un examen (vidéo-)urodynamique. En l’absence d’hyperactivité détrusorienne autonome, il est possible de réaliser une neuromodulation par stimulation périphérique du nerf tibial à la cheville ou une neuromodulation sacrée par le biais d’une électrode implantée. En cas d’hyperactivité détrusorienne d’origine neurogène confirmée, un bilan neurologique ­approfondi devrait être initié. Le traitement consiste à mettre le muscle vésical au repos par des injections de toxine botulique A. Aujourd’hui, l’injection de toxine botulique est également prise en charge par les caisses-maladie dans les indications d’hyperactivité vésicale d’origine non neurogène et elle montre de bons résultats. Si le bilan urodynamique révèle une incontinence d’effort, le traitement conservateur par physiothérapie du plancher pelvien avec biofeedback et, en cas d’amélioration insuffisante, pose d’une bandelette de type TVT («tension-free vaginal tape») représente le traitement de choix.
Figure 5: Cystoscopie révélant un calcul au niveau d’un fil de suture non résorbable plusieurs années après une cure de prolapsus; patiente symptomatique présentant une hématurie microscopique et des symptômes d’impériosité mictionnelle.
Figure 6: Cystoscopie réalisée dans le cadre d’une cystite interstitielle (syndrome douloureux pelvien chronique) 
avec ulcère de Hunner pathognomonique d’une dilatation 
de la vessie.
Prof. Dr méd. Michael
Müntener
Klinik für Urologie
Stadtspital Triemli
Birmensdorferstrasse 497
CH-8063 Zürich
michael.muentener[at]triemli.zuerich.ch