Les syndromes parkinsoniens et la maladie de Parkinson
Non guérissables, mais très bien traitables

Les syndromes parkinsoniens et la maladie de Parkinson

Übersichtsartikel AIM
Édition
2017/20
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2017.02962
Forum Med Suisse 2017;17(20):448-455

Affiliations
Neurologische Universitätsklinik, Inselspital, Universitätsspital Bern

Publié le 16.05.2017

La maladie de Parkinson ne relève pas uniquement d’un trouble moteur, elle affecte aussi précocement le psychisme, la cognition et le système nerveux végétatif (symptômes dits non moteurs). Plus qu’un trouble des neurones dopaminergiques au niveau de la substance noire, elle touche de nombreux neurotransmetteurs et, lors de son évolution, des neurones de l’ensemble du cerveau ainsi que des neurones extracérébraux, notamment gastro-intestinaux. Les possibilités thérapeutiques se limitent certes encore au traitement symptomatique, mais celui-ci ne consiste pas (plus) seulement en une substitution de la dopamine, mais en de multiples options thérapeutiques pharmacologiques, physiothérapeutiques et chirurgicales.

Introduction

Abréviations:
SP Syndrome parkinsonien
MP Maladie de Parkinson, syndrome parkinsonien ­idiopathique (SPI)
CL Corps de Lewy
SNM Symptômes non moteurs
SCP Stimulation cérébrale profonde
La maladie de Parkinson (MP; syndrome parkinsonien idiopathique, SPI) est la deuxième maladie neurodégénérative la plus fréquente après la maladie d’Alzheimer [1]. Elle est aujourd’hui considérée comme une affection neuronale à la fois dégénérative, multisystémique, progressive et chronique qui touche non seulement le système dopaminergique, mais également la neurotransmission sérotoninergique, glutamatergique et GABAergique. Il en découle des troubles moteurs, mais également divers troubles fonctionnels non moteurs.
Les principaux symptômes typiques et définissant la maladie de Parkinson sont un ralentissement des mouvements (bradykinésie) ainsi qu’un tonus musculaire accru (rigidité) ou un tremblement au repos, ou encore les deux [2]. La bradykinésie et la rigidité sont à l’origine de la posture et la démarche typiques.
Ce n’est qu’au cours des dernières années qu’une attention croissante a été portée aux symptômes non moteurs, puisque ceux-ci sont au moins tout aussi importants en termes de handicap et de réduction de la qualité de vie. Ils incluent des troubles psychiatriques (tels que dépression, anxiété, apathie, troubles ­obsessionnels compulsifs), des troubles du sommeil, des ­limitations cognitives (syndrome dysexécutif, ­démence), mais aussi des troubles fonctionnels autonomes (symptômes gastro-intestinaux, urologiques, sexuels, orthostatiques et autres symptômes végétatifs). Ces diverses constellations symptomatiques doivent être prises en considération dans le choix optimal du traitement antiparkinsonien. Certains des symptômes non moteurs, tels que les troubles de l’odorat, la constipation, la dépression ou le trouble du ­comportement en sommeil paradoxal, surviennent fréquemment même en phase prodromique avant les symptômes moteurs (symptômes prémoteurs) [3]. Ils gagneront ensuite une importance particulière pour le diagnostic précoce, une fois qu’il sera possible d’influencer la progression de la maladie.

Les syndromes parkinsoniens: ­distinction

Le terme de syndrome parkinsonien, également appelé parkinsonisme, englobe une multitude d’affections qui n’ont toutefois que peu de choses en commun en termes de pathogenèse, de réponse au traitement et de pronostic. Les syndromes parkinsoniens sont définis par les trois symptômes moteurs cardinaux que sont la bradykinésie/l’akinésie ainsi que la rigidité ou le tremblement au repos ou encore les deux, qui ne peuvent pas s’expliquer en premier lieu par des troubles visuels, vestibulaires, cérébelleux ou proprioceptifs. Conformément aux «UK (United Kingdom) Brain Bank criteria» et aux «MDS (Movement Disorder Society) clinical diagnostic criteria» publiés en 2015, la présence de bradykinésie/akinésie et d’au moins un autre symptôme cardinal est nécessaire pour établir le diagnostic de la maladie de Parkinson. Des critères dits d’exclusion (d’ordre clinique) qui ne doivent pas être présents sont formulés, ainsi que des «red flags» (également cliniques) qui ne sont pas non plus autorisés pour l’établissement d’un diagnostic sûr [2]. Ainsi, le diagnostic est établi de manière clinique, mais peut, en cas de doute, être confirmé par un diagnostic complémentaire, notamment à l’aide de méthodes d’imagerie en médecine nucléaire.
Outre les syndromes parkinsoniens symptomatiques (secondaires) qui peuvent être d’origine métabolique (par ex. maladie de Wilson, hyperparathyroïdie, syndrome de Fahr) ou toxique (par ex. monoxyde de ­carbone, manganèse), causés par des traumatismes crâniens, des lésions vasculaires, des tumeurs ou encore une inflammation, les syndromes parkinsoniens sont la conséquence de maladies neurodégénératives (tab. 1) [3].
Tableau 1: Syndromes parkinsoniens.
Syndrome parkinsonien idiopathique
Formes génétiques du syndrome parkinsonien
Syndromes parkinsoniens atypiques
Démence à corps de Lewy (DCL)
Atrophie multisystématisée (AMS)
– Type parkinsonien (AMS-P)
– Type cérébelleux (AMS-C)
Paralysie supranucléaire progressive (PSP)
Dégénérescence cortico-basale (DCB)
Syndromes parkinsoniens symptomatiques (secondaires)
Origine médicamenteuse 
(entre autres neuroleptiques ­classiques, lithium)
Origine tumorale
Origine post-traumatique
Origine toxique (par ex. monoxyde de carbone, manganèse)
Origine inflammatoire (encéphalitique)
Origine métabolique 
(par ex. maladie de Wilson, ­hypoparathyroïdie)
Leucoencéphalopathie vasculaire
Hydrocéphalie
Le syndrome parkinsonien idiopathique (SPI), également appelé syndrome parkinsonien primaire ou maladie de Parkinson (MP), représente ici la part principale – environ 75% des cas de maladie – des syndromes parkinsoniens neurodégénératifs et est donc décrit plus en détail dans le présent article de revue.
Par ailleurs, il existe également d’autres syndromes parkinsoniens neurodégénératifs pouvant être classés comme syndromes parkinsoniens atypiques. Parmi les syndromes parkinsoniens atypiques les plus fréquents se trouvent les atrophies multisystématisées (AMS), la démence à corps de Lewy (DCL), la paralysie supranucléaire progressive (PSP) et la dégénérescence corticobasale (DCB). La distinction de ces entités doit être effectuée par le neurologue et n’est pas toujours facile, mais absolument pertinente compte tenu de la diversité des pronostics et des réponses au traitement. Le tableau 2 fournit des indications relatives à la présence d’un éventuel syndrome parkinsonien atypique.
Tableau 2: Symptômes d’alarme («red flags»), indiquant un syndrome parkinsonien atypique (selon les directives DGN).
Non-réponse aux doses élevées de L-DOPA (jusqu’à 1000 mg, troubles de l’absorption exclus)
Troubles sévères du système nerveux autonome se manifestant dans la phase précoce de la maladie (hypotension ortho­statique, syncopes, impuissance ou baisse de l’excitabilité génitale, incontinence urinaire ou rétention d’urine, anhi­drose)
Signes cérébelleux
Signes pyramidaux, en l’absence d’autre explication 
(par ex. accident vasculaire cérébral)
Crises oculogyres
Anterocollis marqué
Dysphagie ou dysarthrie considérable (précoce)
Parésie supranucléaire verticale du regard
Instabilité posturale précoce avec chutes 
(en particulier vers l’arrière)
Apraxie et/ou aphasie
Démence se manifestant au cours de la première année 
avec troubles du langage et de la mémoire
Grande fluctuation de la vigilance et de la fatigue
Hallucinations visuelles fluctuantes se manifestant 
au cours de la première année
Phases de somnolence, spontanées ou après l’utilisation 
de neuroleptiques
Symptômes symétriques
Début aigu

Maladie de Parkinson: pathogenèse

La maladie de Parkinson fait partie des affections neurodégénératives. Sur le plan histopathologique, elle est principalement – mais en aucun cas exclusivement – caractérisée par l’accumulation et le dépôt anormaux d’alpha-synucléine agrégée dans les neurones dopaminergiques du système nerveux central (SNC) sous forme d’inclusions intracellulaires, les «corps de Lewy» (CL). Cela entraîne une perte des neurones dopaminergiques au niveau de la substance noire et, accessoirement, un manque de dopamine dans le putamen et le noyau caudé. Dans la plupart des cas de SPI, les causes sont inconnues; au vu du tableau clinique variable, une combinaison de diverses influences pathogéniques est supposée [4]:
1. Facteurs génétiques: Typiquement, le début de la maladie avant l’âge de 40 ans indique clairement un syndrome parkinsonien d’origine génétique. Les cas familiaux monogéniques représentent moins de 5%. Entre-temps, plus de 15 mutations génétiques différentes avec transmission autosomique dominante ou récessive ont été découvertes. Toutefois, les antécédents familiaux entrent en jeu même en dehors des cas monogéniques: le risque de contracter également la MP est 6,7 fois plus élevé pour les frères et sœurs et 3,2 fois plus élevé pour les enfants des patients atteints de Parkinson.
2. Facteurs métaboliques entraînant une augmentation du stress oxydatif ainsi que troubles fonctionnels mitochondriaux et des mécanismes d’élimination anormaux des endo- et exotoxines sont postulés.
3. L’exposition accrue à certaines toxines environnementales telles que les métaux lourds (principalement le manganèse, mais aussi le cuivre, le plomb ou le fer), les pesticides, les herbicides, les travaux de soudure et autres représentent un facteur de risque avéré sur le plan épidémiologique.
La mise en évidence précoce de dépôts d’alpha-synucléine anormale également dans les neurones extracérébraux gastro-intestinaux (plexus et ganglions) chez les patients atteints de la MP a redonné de l’élan à l’hypothèse exotoxique. Ceci et l’observation d’une propagation caudocrânienne des CL dans les neurones du SNC, en commençant dans le bulbe olfactif et dans les neurones de la partie caudale du noyau du nerf vague, constituent des éléments en faveur de l’entrée d’un agent causal par la muqueuse nasale ou la muqueuse intestinale (hypothèse gastro-intestinale). La MP pourrait être une autre maladie causée par une protéine anormalement pliée qui se propage de manière similaire aux prions. Principalement en raison de la présence possible d’un biomarqueur très précoce de la ­maladie dans la mise en évidence d’alpha-synucléine extra-cérébrale, et parce qu’il serait envisageable de stopper ou du moins de retarder la progression de la maladie en empêchant la propagation de la protéine, cette hypothèse a récemment donné un fort élan à la recherche sur la MP. Des résultats d’études ont tout dernièrement montré que le microbiome gastro-intestinal des patients atteints de la MP ne se distinguait pas seulement de celui de personnes saines, mais qu’il permettait même d’établir un rapport avec la nature des symptômes cliniques.

La maladie de Parkinson: signes cliniques et pose du diagnostic

Symptômes moteurs

L’établissement du diagnostic d’un syndrome parkinsonien idiopathique doit avoir lieu en quatre étapes. Il convient d’abord de mettre en évidence la présence d’un syndrome parkinsonien sur le plan clinique. La manifestation des symptômes moteurs cardinaux peut toutefois être très hétérogène d’un patient à l’autre. Un début insidieux, une progression lente des symptômes ainsi qu’une symptomatique toujours ­asymétrique (prononcée de manière unilatérale) sont centraux [3].

Bradykinésie/akinésie

La bradykinésie correspond à un ralentissement de l’initiation du mouvement avec ralentissement progressif lors de l’exécution de mouvements répétés. L’akinésie constitue une «forme extrême» de la bradykinésie, caractérisée par une sédentarité de degré élevé voire même une immobilité complète. La bradykinésie/akinésie peut non seulement s’exprimer par un ralentissement des mouvements des membres et ainsi de la démarche, mais elle peut également se ­refléter au niveau du visage sous forme d’une hypomimie ou d’un clignement rare, dans le langage (dysarthrie) ainsi que dans l’écriture (micrographie).

Tremblement parkinsonien

Le tremblement parkinsonien typique est un tremblement de repos à une fréquence de 4–6 Hz. Celui-ci survient en début de maladie de manière unilatéralement prononcée, est réprimé provisoirement juste après l’initiation d’un mouvement et ne réapparaît qu’après une longue période de maintien statique des bras («re-emergent tremor»). En cas de localisation distale classique au niveau des membres supérieurs, les mouvements de pronation et supination de la main évoquent un geste dit «d’émiettement». L’activation controlatérale lors de la marche ou d’un effort mental (par ex. compter à rebours) peut mettre en évidence un tremblement de repos latent ou augmenter l’amplitude d’un tremblement de repos déjà présent. Un modèle de répartition distale (bras/mains, jambe) est typique en cas de syndrome parkinsonien idiopathique, un tremblement de repos peut toutefois également se manifester au niveau du visage (menton, lèvres et ­mâchoire). La tête (tremblement de type «oui-oui» ou «non-non») ainsi que la voix (tremblement de la voix) sont des localisations ­atypiques qui indiquent plutôt une dystonie en termes de diagnostic différentiel.

Rigidité

La rigidité correspond à une augmentation du tonus musculaire, ressentie par le patient comme une sen­sation de raideur, voire même parfois comme une douleur. La rigidité est contrôlée par la mobilisation passive des grosses articulations (poignet, nuque, articulation du genou), tandis que le patient doit se trouver dans une position détendue. La rigidité se présente comme une résistance tenace et uniforme en «tuyau de plomb» qui, contrairement à la spasticité, survient indépendamment de la vitesse. Bien que le «phénomène de la roue dentée» soit souvent concomitant, sa seule présence sans résistance tenace en «tuyau de plomb» ne remplit pas les critères requis d’une rigidité.

Instabilité posturale

L’instabilité posturale est définie comme un trouble des mouvements réflexes d’adaptation après déséquilibre passif / modification de la posture du corps dans l’espace. Elle est l’expression d’un trouble moteur axial et se reflète par une tendance à la pro-, rétro- et latéro-pulsion, des festinations (propulsion à la marche) ainsi qu’une perte spontanée d’assurance en position debout et à la marche. Elle se distingue malheureusement par une mauvaise réponse aux médicaments dopaminergiques, entraîne un risque accru de chute et donc une réduction considérable de la qualité de vie. En cas de MP, l’instabilité posturale ne survient généralement qu’après quelques années, c’est pourquoi elle ne compte pas parmi les symptômes principaux selon les nouveaux critères diagnostiques [2]. La survenue précoce d’une instabilité posturale (<1 an) est considérée comme un «red flag» et indique un syndrome parkinsonien atypique, en particulier la paralysie supranucléaire progressive (PSP).
Dans une deuxième étape, il convient de rechercher de manière ciblée une cause symptomatique (secondaire) au moyen d’une anamnèse approfondie, de procédés d’imagerie et d’analyses biochimiques (tab. 1).
Par ailleurs, l’attention doit être portée sur les symptômes d’alarme («red flags») pouvant indiquer un syndrome parkinsonien atypique (voir tab. 2).
Des critères supplémentaires, comme par ex. une réponse claire à la lévodopa, la survenue de dyskinésies induites par la lévodopa au cours de l’évolution de la maladie ou encore un tremblement de repos unilatéral, confirment le diagnostic d’un syndrome parkinsonien idiopathique.

Symptômes non moteurs

Outre les symptômes parkinsoniens moteurs, il convient également de prêter attention aux nombreux symptômes non moteurs (SNM), puisque ceux-ci peuvent s’accompagner d’une réduction significative de la qualité de vie des patients concernés et qu’au moins certains d’entre eux sont facilement traitables [3]. Il s’agit notamment de troubles du comportement et de l’humeur, d’une dysfonction cognitive, de troubles du rythme veille-sommeil, d’une dysautonomie et de douleurs (tab. 3).
Tableau 3: Symptômes non moteurs (SNM) en cas 
de maladie de Parkinson.
Végétatifs
Déglutition, estomac, intestin (~70%)
Vessie, fonction sexuelle (~80%)
Douleurs (~60%)
Troubles du sommeil (50–90%)
Fatigue (~40%)
Respiration
Système cardio-circulatoire, avant tout orthostase
Odorat
Vue
Peau
Psychiques
Dépression (40–60%)
Trouble anxieux (~40%)
Hallucinations
Psychose
Apathie
Troubles comportementaux
Cognitifs
Confusion
Démence (20–30%)
SNM précoces
Trouble du comportement en sommeil paradoxal
Constipation
Hypotension orthostatique
Miction impérieuse
Dépression
Somnolence diurne
Hyposmie
Douleurs
SNM associés au traitement
Psychose
Hypotension orthostatique
Somnolence diurne
Attaques de sommeil
Trouble des habitudes et des impulsions

Dépression

Env. 30–40% des patients parkinsoniens souffrent d’une dépression. Tout comme le trouble du comportement en sommeil paradoxal (TCSP) et l’hyposmie, celle-ci peut également se manifester avant le début des symptômes moteurs. La symptomatique dépressive peut s’améliorer suite à la prise d’un agoniste ­dopaminergique/pramipexole. Toutefois, si l’administration d’un antidépresseur s’avère nécessaire, la prise d’inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) et d’inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSN) est recommandée puisque ces substances n’entraînent aucune aggravation des symptômes moteurs. Malheureusement, de nombreux patients parkinsoniens dépressifs ne sont pas traités de manière adéquate car les symptômes dépressifs ne sont pas reconnus/recherchés de manière ciblée dans la symptomatique motrice de la MP.

Hallucinations et psychoses

La présentation et le degré de ces deux symptômes peuvent varier considérablement, allant des hallucinations visuelles non perturbantes jusqu’aux états psychotiques avec hallucinations prononcées ou encore idées délirantes. Il est alors recommandé d’effectuer en tout premier lieu une adaptation de la médication dopaminergique, par exemple en passant d’un agoniste dopaminergique à la L-DOPA, en réduisant la dose ou, dans les cas extrêmes, en interrompant la prise de tout médicament présentant un effet anticholinergique.
Si l’emploi d’une médication antipsychotique s’avère toutefois nécessaire, l’administration des neuroleptiques atypiques quétiapine et clozapine est recommandée, puisque ces substances n’influencent pas – ou du moins qu’à très forte dose – les symptômes moteurs de manière défavorable.

Limitations cognitives

La démence est un gros problème au stade avancé, en particulier pour les proches/les personnes chargées des soins. La détérioration cognitive est souvent la principale raison aboutissant au placement dans un établissement de soins.
Selon la plus longue étude de suivi, le risque des patients parkinsoniens de développer une démence est estimé à env. 40% après 10 ans et env. 80% après 20 ans de maladie. Toutefois, l’âge (>70 ans) semble constituer un plus grand facteur de risque pertinent que la durée de la maladie. En l’absence de signes de causes symptomatiques traitables de la détérioration cognitive, l’emploi d’inhibiteurs de la cholinestérase (par ex. rivastigmine) est recommandé.

Troubles du système nerveux autonome

De nombreux patients concernés souffrent de troubles du système nerveux autonome pouvant se manifester sous forme de constipation, troubles de la fonction ­vésicale, hypotension orthostatique, dysfonction érectile, hyperhidrose et salivation abondante.
La constipation et l’hypotension orthostatique sont les principaux problèmes pertinents au quotidien. En cas de constipation, il convient d’abord de réduire ou d’interrompre la prise de tous les médicaments susceptibles de l’aggraver; il s’agit notamment des médicaments anticholinergiques ainsi que des agonistes dopaminergiques. Une hydratation régulière et suffisante, une alimentation riche en fibres et une activité physique régulière sont essentielles. Si des laxatifs sont nécessaires, l’emploi d’agents gonflants tels que 
le macrogol est plutôt recommandé.

Hypotension orthostatique

Les troubles de la régulation de la pression artérielle ­représentent un problème de taille chez de nombreux patients parkinsoniens, en particulier en phase tardive de la maladie. Ils sont renforcés par les médicaments dopaminergiques. Les chutes qui en découlent augmentent considérablement la morbidité. Il n’existe jusqu’à présent que des preuves insuffisantes relatives à une quelconque forme de traitement. De manière ­générale, il est recommandé de réduire si possible tous les médicaments susceptibles d’aggraver une hypotension orthostatique; en outre, des mesures non pharmacologiques (bas de contention, buste surélevé la nuit, augmentation de la consommation de sel et de liquides) sont préconisées. En fonction des besoins, il est également possible d’avoir recours à des agents sympathomimétiques alpha (midodrine) ou des minéralocorticoïdes (fludrocortisone).

Maladie de Parkinson: diagnostic ­complémentaire

Un examen d’imagerie (imagerie par résonance magnétique [IRM]) doit avoir lieu lors du diagnostic initial afin de faire la distinction avec certaines causes symptomatiques (par ex. tumeur, hydrocéphalie à pression normale, lésions ischémiques ou intoxication au manganèse; tab. 1). L’IRM cérébrale peut également fournir des résultats indiquant la présence d’un syndrome parkinsonien atypique [2].
La réponse à la L-DOPA (plus de 30 % d’amélioration au score MDS-UPDRS) comme critère diagnostique confirmant une MP peut être vérifiée par une tentative de traitement par médicaments dopaminergiques dans un délai de quelques jours ou par le test à la L-DOPA. A ce sujet, il convient de noter que le tremblement ne répond parfois qu’à des doses supérieures de L-DOPA et qu’un test à la L-DOPA négatif n’exclut pas avec certitude la présence d’une MP, de sorte qu’en cas de soupçon ­cliniquement urgent, une tentative de traitement par lévodopa sur plusieurs mois est, dans tous les cas, recommandée (test à la L-DOPA).
L’emploi de techniques de médecine nucléaire fournissant des informations sur l’intégrité du système nigrostriatal présynaptique (FP-CIT-SPECT et TEP à la fluorodopa) peut être utile pour distinguer un tremblement essentiel de la MP ou pour exclure un syndrome parkinsonien induit par des médicaments. Toutefois, cet examen ne permet pas de différencier de manière sûre une MP d’un SP atypique. Des procédés destinés 
à la représentation des récepteurs dopaminergiques postsynaptiques (IBZM-SPECT et TEP au raclopride ou au desmethoxyfallypride) peuvent être utiles à cet effet. Au vu des coûts et généralement de l’absence de conséquence thérapeutique, ces examens doivent être utilisés uniquement de manière ciblée.
Les données anamnestiques recueillies auprès des tiers (paroles et agitation motrice pendant le sommeil, chutes du lit, cauchemars animés) suggérant un trouble du comportement en sommeil paradoxal peuvent fournir une autre indication d’une genèse neurodégénérative du SP (par ex. SPI ou AMS) et être corroborées par une polysomnographie.
La réalisation d’un test de Schellong est indiquée en cas de signes cliniques d’un trouble autonome ou en cas de suspicion d’une AMS. Une baisse de la pression artérielle systolique de plus de 20 mm Hg en position debout est alors pathologique.
Lorsque la maladie débute avant l’âge de 50 ans et en cas de suspicion clinique d’une maladie de Wilson, il convient de déterminer les taux sériques de cuivre et de céruloplasmine ainsi que le taux de cuivre des urines ­recueillies pendant 24 heures.
En règle générale, un test génétique est recommandé chez les patients âgés de moins de 40 ans. Lorsque la maladie est contractée après 40 ans, le résultat du test génétique est sans conséquence, sauf en présence d’un mode de transmission mendélien évident comme par exemple des antécédents familiaux positifs.

Maladie de Parkinson: traitement

Aucun traitement causal de la maladie de Parkinson n’est jusqu’à présent possible. De même, nous ne connaissons actuellement aucun traitement préventif de la maladie ou de sa progression. Toutefois, en particulier durant les premières années de la maladie, ses symptômes peuvent être influencés grâce à des médicaments ou une thérapie par le mouvement, ce qui offre aux patients une bonne qualité de vie [5]. Etant donné qu’il est impossible d’agir sur la progression de la maladie avec des médicaments, l’initiation d’un ­traitement médicamenteux dépend des besoins individuels du patient. Il ne devrait néanmoins pas uniquement prendre en considération les symptômes moteurs, mais également les symptômes autonomes, cognitifs et psychiatriques ainsi que les capacités communicationnelles.
Les substances actuellement disponibles sont des préparations à base de L-DOPA, combinées à un inhibiteur de la décarboxylase ou un agoniste dopaminergique. Par ailleurs, des inhibiteurs de la MAO-B peuvent être employés ainsi que des anticholinergiques, en particulier en présence de tremblement.
Au stade avancé, des préparations à base de lévodopa peuvent être combinées à des inhibiteurs de la COMT (entacapone, tolcapone) afin de prolonger l’effet de la L-DOPA. La lévodopa associée à un inhibiteur de la décarboxylase et à l’entacapone est disponible dans une préparation combinée (Stalevo®). En raison d’une éventuelle hépatotoxicité durant la période de transition, l’administration de tolcapone en complément de la ­lévodopa associée à un inhibiteur de la décarboxylase doit donner lieu à un contrôle étroit des transaminases.
Les préparations à libération retardée à base de lévodopa (Madopar DR® ou Sinemet CR®) doivent être uniquement utilisées la nuit puisqu’en raison de son absorption gastro-intestinale retardée, la lévodopa entre en concurrence avec des protéines alimentaires en termes d’absorption gastro-intestinale, ce qui réduit la biodisponibilité et rend erratique le taux plasmatique atteint. Ceci peut facilement être évité avec des préparations à libération immédiate, en prenant les médicaments 30 minutes avant ou 60 minutes après le repas.
Au début de la maladie, une monothérapie par agonistes dopaminergiques peut avoir lieu, en particulier chez les patients jeunes ou ne présentant aucun déficit cognitif. Les agonistes dopaminergiques agissent directement au niveau des récepteurs dopaminergiques striataux. L’avantage de ces substances similaires au neurotransmetteur dopamine est, contrairement à la L-DOPA, sa longue durée d’action: les préparations à ­libération retardée ne nécessitent qu’une seule prise par jour. Par ailleurs, l’initiation du traitement par agonistes dopaminergiques et ainsi l’emploi ultérieur de la L-DOPA permettent de retarder la survenue de dyskinésies induites par la L-DOPA. L’agoniste dopaminergique rotigotine est la seule substance disponible pour une administration transdermique (patch). Outre l’administration potentiellement continue du médicament, cela offre également des avantages, notamment en présence de symptômes prononcés la nuit ou lorsqu’une administration orale n’est que partiellement possible (par ex. suite à une intervention gastro-intestinale, en cas de troubles de la déglutition).
Les agonistes dopaminergiques peuvent toutefois avoir des effets indésirables sur le comportement, dont le médecin traitant doit préalablement informer le patient et en particulier aussi ses proches. Ainsi, des troubles du contrôle des impulsions tels que dépendance au jeu, multiplication des comportements à risque, oniomanie, dépendance sexuelle et boulimie peuvent survenir et, selon leur importance, sont susceptibles d’entraîner de graves conséquences personnelles et financières. Les agonistes dopaminergiques peuvent en outre renforcer une somnolence diurne fréquente en cas de MP et favoriser les œdèmes des jambes. Il peut également survenir un «punding» (fascination compulsive et exécution répétée d’activités telles que l’assemblage et le désassemblage, la collection ou le tri d’objets). La survenue de ces effets indésirables est variable d’un individu à l’autre et dosedépendante, elle est souvent sous-estimée ou insuffisamment étudiée. Les effets indésirables neuropsychiatriques peuvent faire basculer le rapport bénéfice/risque au détriment des agonistes dopaminergiques, de sorte que l’emploi précoce de la L-DOPA est alors préférable même chez les patients jeunes.
En cas de maladie avancée, un simple traitement par agonistes dopaminergiques n’est toutefois plus suffisant, de sorte qu’un traitement combiné à base de lévodopa plus inhibiteur de la décarboxylase et d’agonistes dopaminergiques est nécessaire. Au début du traitement par la L-DOPA, un intervalle de 5 heures entre les prises à raison de trois doses est généralement suffisant. A mesure que la neurodégénérescence augmente, des intervalles plus courts entre les prises sont néanmoins nécessaires car la durée d’action de chaque dose diminue. L’association à un inhibiteur de la COMT permet de prolonger quelque peu la durée d’action.
A mesure que la neurodégénérescence progresse, la sensibilité des neurones restants aux variations du taux plasmatique de lévodopa augmente, de sorte que des mouvements excessifs et des dyskinésies surviennent lorsque le pic d’efficacité est atteint (dyskinésies de pic de dose). Dans ce cas, une mesure favorable peut consister à réduire les doses individuelles et augmenter la fréquence des prises.
Un entraînement physique régulier (>150 min/semaine) assure, également à long terme et indépendamment de la durée de la maladie, une amélioration de la qualité de vie, de la mobilité et de l’autonomie ainsi qu’un ralentissement de la progression de la maladie et de la détérioration cognitive. Un entraînement physique modéré et individuellement adapté plusieurs fois par semaine est donc fortement recommandé à tout stade de la maladie.
A mesure que la maladie poursuit sa progression, des dyskinésies dites biphasiques peuvent se manifester. Au-dessus ou au-dessous d’une certaine concentration plasmatique surviennent des mouvements sortants incontrôlés, brusques et parfois douloureux. Les dyskinésies dites biphasiques peuvent être réprimées en maintenant durablement la concentration plasmatique au-dessus du niveau critique (augmentation de la dose).
L’antagoniste des récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA) amantadine exerce d’une part une action antihypokinétique, et réduit par ailleurs pour un certain temps les dyskinésies induites par la L-DOPA. Chez les patients présentant des limitations cognitives, il convient toutefois de considérer le risque d’hallucinations, en particulier lorsque l’administration a lieu le soir. La même prudence est à observer chez les patients cardiaques en raison du risque d’allongement de l’intervalle QT. L’amantadine est la seule préparation pouvant être administrée par voie intraveineuse.
La perfusion intrajéjunale continue de lévodopa par sonde gastro-jéjunale percutanée via une pompe («levodopa-carbidopa intestinal gel» [LCIG]) présente l’avantage d’une concentration plasmatique de L-DOPA continue, c’est-à-dire aucune stimulation pulsatile des récepteurs, ainsi que de l’indépendance de l’administration du médicament vis-à-vis de la vidange gastrique. En raison des coûts thérapeutiques élevés et des efforts techniques, cette forme thérapeutique est principalement utilisée en cas de fortes fluctuations de l’effet parmi les substances par voie orale.
L’apomorphine est un agoniste dopaminergique à brève durée d’action administrable par voie sous-cutanée à l’aide d’un stylo injecteur ou en continu via une pompe. Elle est employée lorsqu’une médication par voie orale est impossible ou lorsque le traitement oral ne peut pas contrôler les symptômes tels que les périodes «off» sévères ou subites et douloureuses, ou encore les dystonies.
En cas de durée d’action décroissante de la L-DOPA, de fréquences de prise très élevées, de dyskinésies intolérables ou de blocages douloureux que les médicaments ne peuvent pas suffisamment réprimer, le recours à une stimulation cérébrale profonde (SCP) peut être évalué. La sélection adéquate des patients est alors un facteur absolument décisif pour le succès.
Dans le cas de la maladie de Parkinson, trois zones cibles sont établies. Les patients jeunes (<70 ans), qui ne souffrent d’aucun problème psychiatrique ni détérioration cognitive et ne présentent aucun ou seulement très peu de symptômes axiaux sous L-DOPA, sont les plus susceptibles de bénéficier d’une stimulation cérébrale profonde au niveau du noyau sous-thalamique (NST).
En cas de syndrome parkinsonien pour lequel le tremblement prédomine, en particulier à un âge avancé, le noyau ventral intermédiaire (NVI) est une bonne option. Les doses élevées de L-DOPA souvent nécessaires au contrôle du tremblement peuvent être considérablement réduites après l’intervention, ce qui permet également de réduire les effets indésirables du traitement par L-DOPA tels que les troubles de régulation de la pression sanguine et les hallucinations, qui touchent souvent les patients âgés.
La stimulation au niveau du Globus pallidus interne (GPi) a également un effet favorable sur les symptômes parkinsoniens moteurs, mais celui-ci est moins prononcé qu’avec la stimulation au niveau du NST. C’est pourquoi, en cas de stimulation GPi, la dose de L-DOPA ne peut être que faiblement réduite après l’intervention. Le risque de troubles postopératoires du comportement et d’aggravation de la démarche est inférieur avec la stimulation du GPi, qui réprime par ailleurs très bien les dyskinésies gênantes.
Dans les premières semaines après l’intervention, des contrôles et ajustements réguliers de la stimulation sont essentiels, d’une part afin d’enregistrer l’effet ­lésionnel décroissant (réduction des symptômes par l’œdème périfocale dans la zone cible) et d’adapter le traitement en conséquence, d’autre part également pour reconnaître précocement d’éventuelles compli­cations, comme par exemple les troubles du compor­tement, et pouvoir prendre les mesures correspondantes.
Divers SNM sont également ouverts à un traitement, surtout lorsqu’il est question de dépression. Il est ­essentiel de reconnaître une dépression (symptôme ­fréquent en cas de MP) en tant que telle et de ne pas simplement l’assimiler à la MP. La dépression dans le cadre de la MP peut et doit être traitée de manière ciblée et avec succès (par ex. par ISRS ou IRSN, notamment venlafaxine, citalopram), car cela améliore de manière ­décisive la qualité de vie des patients.
Pour résumer, la maladie de Parkinson demeure actuellement une affection non guérissable, mais très bien traitable sur le long terme. Etant donné qu’il n’existe jusqu’à présent aucune indication d’un retardement possible de la progression de la maladie à l’aide de mesures médicamenteuses, il convient de toujours privilégier le besoin individuel du patient en ce qui concerne le début du traitement et les ajustements thérapeutiques.

Perspectives

Des résultats d’études anatomo-pathologiques à long terme réalisées ces dernières années suggèrent l’invasion précoce de neurones extra-cérébraux gastro-intestinaux et ont montré que la propagation histopathologique des «corps de Lewy» était en corrélation avec les symptômes cliniques. Ces nouvelles conclusions suscitent des espoirs relatifs à une prévention primaire ou secondaire de la MP. Des études épidémiologiques montrent clairement que les facteurs génétiques jouent un rôle; il reste toutefois à découvrir comment et par quels mécanismes (métaboliques) ceux-ci entrent en jeu pour la grande majorité (env. 95%) des cas de MP monogénique [4]. L’hypothèse actuelle suggère une multitude de causes possibles de la MP, pouvant être combinées différemment chez chaque patient. Cela implique qu’il pourrait donc être difficile de trouver des traitements causaux. Ainsi, de nombreux efforts de recherche s’orientent à juste titre vers des méthodes thérapeutiques réparatrices. A ce sujet, la recherche sur les cellules souches, ayant pour objectif de remplacer les neurones dopaminergiques et autres perdus, laisse espérer des avancées. Actuellement, l’immunisation active et passive contre l’alpha-synucléine et les inhibiteurs ou modulateurs de l’agrégation d’alpha-synucléine est évaluée dans des études cliniques avec pour but d’obtenir un traitement modificateur de la maladie [5].

L’essentiel pour la pratique

• Avant tout traitement, un diagnostic correct est essentiel. La distinction entre syndrome parkinsonien idiopathique et secondaire (symptomatique) ainsi que d’autres syndromes parkinsoniens neurodégénératifs (atypiques) est décisive pour le succès thérapeutique et le pronostic.
• Le traitement des symptômes moteurs est très efficace au cours des premières années («honey moon») et se compose de pharmacothérapie et de kinésithérapie. Le choix de la médication et de la dose doit être effectué et évalué individuellement.
• Les symptômes non moteurs (SNM) peuvent dominer pour la réduction de la qualité de vie et doivent être recensés et traités de manière ciblée. Il convient ici de mentionner tout particulièrement la dépression.
• Les patients parkinsoniens doivent recevoir un premier diagnostic d’un spécialiste en neurologie; celui-ci doit également être impliqué dans l’évaluation du succès thérapeutique.
• En cas de réponse thérapeutique insuffisante, de perte d’efficacité au fil du temps ou de complications thérapeutiques, des mesures thérapeutiques invasives peuvent être envisagées. Une évaluation doit alors avoir lieu dans un centre hospitalier qui propose ce service.
Nous remercions le Docteur Daniela Wiest, spécialiste de neurologie 
à Bienne, pour sa relecture critique du manuscrit.
Les auteurs n’ont pas déclaré d’obligations financières ou personnelles en rapport avec l’article soumis.
Prof. Dr méd.
Mathias Sturzenegger
Chefarzt und
Stv. Klinikdirektor
Neurologische ­Universitätsklinik
Inselspital Bern
CH-3010 Bern
matthias.sturzenegger[at]insel.ch.