Accompagnement des personnes mourantes et de leurs proches
Recommandations pour la pratique

Accompagnement des personnes mourantes et de leurs proches

Übersichtsartikel AIM
Édition
2017/3031
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2017.02995
Forum Med Suisse 2017;17(3031):624-629

Affiliations
a Universitäres Zentrum für Palliative Care, Inselspital, Universität Bern; b Palliativzentrum, Kantonsspital St.Gallen

Publié le 26.07.2017

L’accompagnement des personnes mourantes et de leurs familles est une tâche fréquente de la médecine. Alors qu’actuellement plus de 60 000 personnes décèdent chaque année en Suisse, ce chiffre passera à env. 90 000 au cours des deux prochaines décennies, d’après l’Office fédéral de la statistique. Il y aura donc fort à faire pour assurer leur prise en charge et veiller à la qualité de cet accompagnement!

Introduction

Les personnes qui accompagnent ou ont accompagné une personne mourante peuvent sentir ce qui est ­nécessaire durant cette phase. Il s’agit de garantir que la souffrance physique puisse être correctement sou­lagée et de conférer au patient un environnement attentif, qui procure du calme et laisse de la place pour l’essentiel, à savoir les rencontres et les échanges entre la personne mourante et ses proches, mais également la famille et les amis en général. C’est une phase intensive pour tous, empreinte de retours en arrière, de souvenirs, d’inquiétudes pour l’avenir et d’espoirs pour qu’une vie toujours unique s’achève sur une fin «paisible» et digne. La médecine ne joue souvent pas le rôle principal durant cette phase. Elle doit bien plus œuvrer volontairement en arrière-plan et permettre une bonne fin pour la personne mourante et une transition réconfortante vers une nouvelle phase de vie pour les proches. En tant que médecins, il nous faut ici agir à la fois en tant que professionnels et en tant que semblables.
Durant leurs études, les médecins sont mal préparés pour adopter une attitude compétente durant la phase terminale: le cursus de l’université de Berne prévoit à peine 2 heures de cours dédiées à ce sujet sur un total d’env. 5500 heures. Les pays où les soins palliatifs sont bien ancrés s’attellent désormais aussi à ce déficit. Ainsi, le «General Medical Council» en Angleterre a adopté en mai 2016 une décision en faveur d’une formation plus intensive en matière d’accompagnement des personnes mourantes [1].
Dans les hôpitaux, le terme «traitement de confort» est souvent utilisé pour désigner l’accompagnement durant la phase terminale. Ce terme est toutefois rarement ­défini de manière claire [2]. Au cours des dernières ­décennies, énormément d’efforts ont été investis pour atteindre une qualité optimale de la prise en charge en début de vie et il n’y a aujourd’hui plus guère de préoccupations quant à une «mauvaise» obstétrique ou néonatologie. Que faudrait-il pour atteindre une sérénité comparable en fin de vie, bien que la réaction émotionnelle à ces deux évènements de vie ne soit certes pas comparable? Un facteur explicatif pourrait résider dans l’absence de financement spécifique. Il n’existe pas de «diagnosis-related group» (DRG) pour la prise en charge des personnes mourantes et l’«accident décès» est manifestement intégré dans tous les DRG. Cette ­situation pourrait bien refléter le postulat de la mé­decine selon lequel l’accompagnement des mourants ne constitue pas une véritable prestation exigeant des compétences médicales spécifiques.

Collaboration internationale pour 
l’amélioration de la prise en charge durant la phase terminale

Le «International Collaborative for Best Care for the Dying Person» est né d’un projet européen du «7th Framework». Ce projet, nommé OPCARE 9, a pour la première fois rassemblé au niveau international les connaissances existantes sur la prise en charge interprofessionnelle durant la phase terminale, en s’appuyant sur des approches telles que le «Liverpool Care Pathway for the dying patient» de l’époque.
Alors que les avis sont aussi très partagés en Angleterre quant à une approche standardisée pour l’accompagnement en fin de vie, certains pays sont parvenus, peut-être par le biais d’une d’approche plus individualisée, à aboutir à des améliorations considérables, en avant tout du point de vue des patients et de leurs proches, mais également du point de vue des professionnels travaillant dans les hôpitaux, les établissements médico-­sociaux et les soins à domicile [3]. Dans tous les modèles internationaux, une pertinence toute particulière est accordée à la formation initiale et à la formation postgraduée.

Une approche pour la Suisse

Sur la base de cette collaboration et de la longue expérience dont disposent certains centres de Suisse dans la mise en œuvre de l’ancien «Liverpool Care Pathway», la Société Suisse de Médecine et de Soins Palliatifs ­palliative ch a initié en 2015 un groupe de travail afin d’adapter ces approches internationales à la Suisse, avec ses différences culturelles tout de même considérables. Les recommandations «Accompagnement des personnes en fin de vie et de leurs proches» [4] ont été élaborées en suivant un processus en plusieurs étapes (revue de la littérature, experts Delphi, «sounding board») par des représentants de différents groupes professionnels (www.palliative.ch/bestpractice). Les principaux points de ces recommandations sont résumés dans les lignes qui suivent.
Les recommandations portent sur la phase terminale, c.-à-d. sur les 4 à 7 derniers jours de vie. Dans la pratique, il s’avère utile de distinguer différentes étapes (fig. 1):
Figure 1: Phases de l’accompagnement durant la phase terminale.
– identifier le début de la phase terminale;
– repérer et considérer les signes désormais essentiels;
– les mesures à prendre;
– en évaluer l’efficacité;
– planifier les tâches et la procédure à suivre lors du décès et après.
Les contenus s’inspirent des 10 «key principles», qui ont été définis par la collaboration internationale [5].
Le document se veut un concept-cadre fortement orienté vers la mise en œuvre pratique et il doit ainsi servir de modèle pour que les institutions et réseaux définissent leurs propres approches. Pour des raisons pédagogiques, cinq «phases» de la prise en charge (et donc pas le décès en soi!) sont dès lors décrites. Les auteurs estiment également que la communication est absolument fondamentale pour la qualité de la prise en charge. Par conséquent, des outils de communication avec des ­formulations concrètes sont proposés pour chaque «phase». Les informations qui suivent se recoupent partiellement dans leur formulation avec les recommandations de la société de discipline.

Identification de la phase terminale

Lorsqu’on parle d’«identifier» la phase terminale, il s’agit plutôt de relever une probabilité. Il n’existe pas de ­critères ni de phénomènes irrévocables qui annoncent le début de cette dernière étape de la vie. L’intuition et l’expérience jouent ici un rôle prépondérant. Dans la mesure du possible, cette tâche est dès lors confiée à une équipe interprofessionnelle, composée d’au moins deux groupes professionnels différents.
Deux facteurs essentiels occupent ici l’avant-plan:
– l’estimation clinique / l’intuition;
– les changements au niveau de la respiration, en particulier la diminution de la profondeur de la respiration en raison de l’insuffisance musculaire générale.

Intuition / question de la surprise

Le déroulement du processus ainsi qu’une bonne communication des observations au sein de l’équipe et avec les proches sont des facteurs déterminants pour bien reconnaître la phase terminale. Tout changement dans l’état du patient détecté par un pressentiment («gut feeling») ou l’intuition des professionnels chargés des soins et celle des proches contribuent énormément à l’appréciation de la situation. Dans la pratique, la question de la surprise s’avère utile: «Si le patient venait à décéder dans les 4 à 7 prochains jours, serait-ce là une surprise pour vous / nous?»

Signes diagnostiques qui aident à identifier 
la phase terminale

Les signes suivants jouent un rôle particulier à cet égard: changement au niveau de la respiration (profondeur, fréquence), changement au niveau de l’état général ou de l’énergie (alitement, anorexie, fatigue, délire), baisse ou arrêt de la consommation de liquides, de médi­caments et de nourriture, changements au niveau de la cognition, repli général et intérêt moindre pour l’en­vironnement. Sur le plan physiopathologique, la principale cause réside dans une voie finale commune de la condition métabolique catabolique, avec une restriction massive de la force musculaire, ce qui conduit finalement aussi à une insuffisance respiratoire. D’autres ­phénomènes peuvent se présenter: agitation, angoisse, expériences spirituelles paraissant comme des «rêves éveillés», besoin de parler à certaines personnes, désir de calme, réconciliation et remerciements. L’inquiétude pour les proches est fréquente («altruisme final»).

Outils de communication

– «Nous nous faisons beaucoup de souci concernant la détérioration de l’état de X. De nombreux signes laissent penser qu’il/elle pourrait décéder dans les prochains jours.»
– Selon le contexte culturel et religieux, possibilité d’inclure les proches: «Comment vivez-vous / évaluez-vous la situation actuelle (en tant que proche)?».
Remarque particulière: A l’hôpital ou dans l’établissement médico-social, il est judicieux d’informer dès ce moment-là le médecin de famille du décès probable du patient, ce qui est généralement très apprécié. En tant que pivots pour les proches, les médecins de famille sont alors en mesure d’offrir un soutien approprié aux proches et de faciliter la transition vers la phase de deuil.

Evaluation initiale

L’évaluation initiale permet à l’équipe interprofessionnelle de recenser et de définir les facteurs de stress spécifiques et les ressources du patient et de ses proches; elle constitue la base de la planification des mesures en phase 3.

Niveau d’information

Il s’agit ici de comprendre comment le patient et ses proches vivent la situation du moment et de déterminer leur niveau de connaissances. Il faut alors décider s’il convient d’informer d’autres membres de la famille (par ex. le fils «perdu») de la situation et de la suite et, le cas échéant, à qui revient cette tâche. Les spécificités physiques, linguistiques, culturelles et spirituelles, comme par ex. un refus ou un tabou de la mort, doivent être prises en compte durant toute communication ­relative au décès.

Mesure de la souffrance

Il s’agit ici principalement de déterminer les symptômes actuels. Il convient tout particulièrement de rechercher des angoisses individuelles, comme par ex. la peur de s’étouffer, car celles-ci sont souvent conditionnées par des expériences antérieures personnelles. Cela concerne également les proches, avec lesquels l’attitude à adopter en cas de situations d’urgence et de crise potentielles est planifiée conjointement, et ce indépendamment du lieu de prise en charge. Dans des situations particulièrement complexes et instables, l’intervention de professionnels spécialisés en soins palliatifs peut s’avérer utile.

Facteurs psychosociaux et spirituels de stress

Outre les facteurs corporels de stress, il convient éga­lement d’identifier les charges psychiques, socioculturelles et spirituelles chez les patients et leurs proches, par ex.:
– signes d’un deuil complexe chez les proches (les facteurs de risque sont: peu de contacts sociaux, solitude, dépression préexistante, angoisse);
– besoin de soutien pour régler les questions financières en suspens;
– besoin de soutien pour la garde des enfants;
– présence d’une «détresse spirituelle», en particulier en cas de perte de la recherche de sens.

Besoins et questions relatives à l’organisation

Les souhaits, valeurs et besoins du patient et de ses proches ont la priorité (par ex. demande de rituels socioculturels ou spirituels/religieux particuliers).
Avec les parties concernées, il convient de définir une personne de contact à informer en cas de détérioration de la situation ou de décès, ainsi que les heures auxquelles elle peut être jointe. Il faut également déterminer s’il y a des souhaits de transfert / prise en charge dans un autre lieu, y compris de retour dans le pays d’origine.

Outils de communication

– «Y a-t-il encore quelqu’un que nous devons informer de la gravité de la situation?»;
– «Y a-t-il encore quelqu’un que vous souhaitez voir?»;
– «Qu’est-ce qui vous accable le plus?», mais aussi «Qu’est-ce qui vous donne de la force?», «Qu’est-ce qui vous porte?»;
– «Y a-t-il quelque chose d’important pour vous maintenant?», «Y a-t-il quelque chose d’important pour vous au moment du décès ou après?»;
– «Y a-t-il encore quelque chose que vous souhaitiez régler?»;
– «Pour qui vous faites-vous le plus de souci?»;
– «Auriez-vous besoin de parler à un aumônier?».

Mesures

Les mesures font référence au traitement médical et aux soins, ainsi qu’à la communication et à l’implication ­active des proches.

Vérification des mesures médicales et des soins apportés jusqu’alors

Seuls sont utilisés des médicaments ayant une efficacité symptomatique directe. Tous les médicaments prophylactiques secondaires sont arrêtés, à l’exception de ceux qui aident à soulager un symptôme très accablant d’apparition récente (par ex. anticoagulation sous-cutanée en cas d’embolie pulmonaire fulminante récente). En outre, les traitements susceptibles de prolonger la vie sont eux aussi interrompus. Cela vaut ­également pour la désactivation d’un défibrillateur ­automatique implantable. Les médicaments sont désormais généralement administrés par voie parentérale, c.-à-d. par voie sous-cutanée ou intraveineuse, après concertation avec le patient et les proches. Les mesures en matière de soins (hygiène corporelle, position, changement de pansements, etc.) sont également adaptées aux besoins du patient. L’équipement nécessaire est disponible sur place (lit médicalisé électrique, appareil d’aspiration, etc.).

Planification de mesures

Des médicaments de réserve contre les symptômes les plus fréquents (douleur, agitation, râles, nausée/vomissements, insuffisance respiratoire) sont prescrits même si ces symptômes n’occupent pas l’avant-plan à ce moment-là. Des algorithmes pour l’administration de médicaments sont disponibles dans la version en ligne [1] des recommandations. Les apports liquidiens par voie parentérale sont soit interrompus soit limités à env. 500 ml par jour et complétés par une hygiène buccale intensive (y compris par les proches). Pour la procédure en cas d’urgence, des mesures d’aide personnelle et les disponibilités (par ex. numéros d’urgence), notamment la désignation de personnes et de professionnels de contact, sont définies, en fonction du contexte de prise en charge. La procédure en cas d’urgence englobe aussi la définition des conditions cadres dans le cas d’une ­sédation palliative/terminale.
Les professionnels encouragent tout ce qui permet d’augmenter la résilience et la quête de sens, et de garder espoir, par ex. par la pratique de rituels et de spécifi­cités culturelles et religieuses. Il en va de même pour les propositions d’entretiens spirituels sur des sujets tels que la culpabilité et le pardon, la confession, le réconfort et l’encouragement.

Communication, instruction et conseils

Le plan thérapeutique actuel et l’évaluation régulière sont discutés avec les proches. La possibilité pour les proches de participer activement à l’accompagnement/au traitement, y compris à l’exécution de mesures d’urgence, est définie. Cela englobe également l’établissement d’un planning de présence familiale, en parti­culier dans les institutions, dans la mesure où cela est souhaité et faisable.

Outils de communication

– «Comme nous en avions discuté la dernière fois, l’évolution actuelle de l’état de madame/monsieur X laisse penser qu’elle/il pourrait décéder dans les jours à venir. Notre équipe perçoit actuellement les problèmes A et B comme prioritaires, c’est la raison pour laquelle nous avons adapté le traitement à l’aide des mesures C et D.»;
– «Nous comptons aussi sur vos observations et vous encourageons à nous faire part de tout problème/changement que vous constateriez. Dans tous les cas, nous sommes équipés pour réagir immédiatement en cas de souffrance.»;
– «Nous vous recommandons également d’informer le reste de la famille. Si vous ou d’autres membres de votre famille le désirez, nous vous proposons volontiers de rester le jour et la nuit.»;
– «Nous serions heureux d’apprendre de vous ce qui est essentiel dans votre culture ou votre religion par rapport à la mort pour pouvoir adapter notre comportement en conséquence.».

Evaluation du processus

L’objectif de cette démarche est de garantir une fin de vie aussi rassurante et paisible que possible pour toutes les personnes concernées, tout en sachant que l’approche de la mort peut inspirer, outre des sentiments tels que la gratitude et la chaleur, une foule d’émotions négatives telles que le désespoir, la révolte, l’agressivité ou, simplement, une tristesse quasiment insupportable. Cela est particulièrement fréquent lors d’un décès complètement inattendu. Il faut également garder à l’esprit que l’adaptation/la réduction des médicaments ou d’autres facteurs de stress peut entraîner une amélioration de l’état du patient; ainsi, une approche bien structurée durant la phase terminale peut permettre au patient de survivre dans env. 10–15% des cas!
Chaque jour, l’équipe soignante évalue conjointement la situation dans son ensemble:
– Discussion de problèmes du moment;
– Réévaluation pour déterminer s’il s’agit ou non de la phase terminale;
– Discussion des nouveaux facteurs de stress éventuels et, le cas échéant, définition de nouvelles priorités.
L’équipe interdisciplinaire responsable contrôle ré­gulièrement l’efficacité des mesures définies pour le patient en phase 3 (en général tous les jours) et procède si nécessaire à des ajustements. Cela implique également de demander aux proches comment ils se sentent et s’ils ont besoin de se retirer ou que quelqu’un d’autre prenne le relais.

Communication

Il importe de bien informer les proches de ce qui est normal au moment du décès. Il est nécessaire d’ex­pliquer les phénomènes susceptibles d’inquiéter davan­tage les personnes accompagnantes que la personne mourante: par ex. respiration/sécheresse buccale et râles lorsqu’il y a déjà modification ou perte de con­science; absence de selles pendant plusieurs jours; manque d’envie de boire, etc. (cf. annexe, Brochure à l’intention des proches concernant les changements en fin de vie [6]).
Aide à la communication avec les proches:
– «Comment trouvez-vous votre femme/mari/etc. ­aujourd’hui?»;
– «Comment allez-vous?», «De quoi avez-vous besoin?»;
– «Avez-vous des questions concernant le traitement?»;
– «Pensez-vous qu’elle/il souffre? Si oui, de quoi?» (cf. communication sur les phénomènes normaux à l’approche de la mort);
– «Selon vous, que devrions-nous surveiller/faire de plus pour la/le soulager?»;
– «Vous sentez-vous suffisamment soutenu(e)?»;
– «Avez-vous des questions que nous devrions aborder ensemble (et avec qui)?».

Décès et accompagnement des personnes endeuillées

Plus on travaille sur la communication, la connaissance et la confiance mutuelles et la préparation au décès durant la phase terminale (ou avant), mieux on parvient à réduire le stress qui touche toutes les personnes concernées à l’arrivée de la mort et immédiatement après. Pour toutes les personnes impliquées, le début de cette phase représente encore un défi, ce qui exige de faire preuve d’authenticité et d’empathie mutuelles.

Il importe de:


– Procéder calmement et par étapes. Ne pas essayer de tout faire à la fois;
– Laisser du temps et de l’espace pour les adieux (proches et équipe);
– Entretien de suivi et, en cas de besoin, offre d’encadrement supplémentaire des proches durant la phase de deuil.

Annonce du décès

Si possible, la tâche d’annoncer le décès du patient revient à la personne qui a les relations les plus intenses avec les proches. Il est déterminé ensemble et à l’avance à quel moment et à qui la nouvelle va être communiquée.

Constat du décès et informations importantes fournies par les services médicaux

Dans le contexte de la confirmation de la mort (examen), il y a la possibilité de combler les lacunes en matière d’information, par ex. cause de la mort, facteurs de stress à ce moment-là, en interrogeant les proches. A cette occasion, il est également possible, en posant des questions ouvertes, d’aborder avec sensibilité le thème de l’autopsie, ce qui peut permettre d’obtenir une meilleure explication quant à un éventuel décès inattendu. Il est essentiel que les résultats de l’autopsie soient communiqués aux proches, le plus souvent via le médecin de famille.
Il convient également d’informer les autres professionnels impliqués, comme par ex. le médecin de famille, si ce n’est pas lui qui a accompagné le décès. C’est malheureusement à ce niveau que les erreurs de communication sont les plus fréquentes, par ex. en omettant de communiquer l’information, ce qui équivaut à une violation du devoir de diligence.

Préparation de la personne décédée et 
possibilités de soutien pour les personnes 
en deuil et l’équipe

Les proches sont informés de la démarche à suivre ­(habillement du défunt, planification de rituels, temps pour les adieux, visites supplémentaires, etc.) et s’ils le souhaitent, ils sont impliqués dans l’habillement du défunt et l’aménagement du lit de mort et de l’environnement, etc. Ils sont également informés concernant les démarches administratives et les entreprises de pompes funèbres, ce qui est déjà bien organisé dans la plupart des institutions.
Les possibilités de reprise de contact avec l’équipe soignante sont discutées avec les proches et l’accompagnement dans le deuil des proches du défunt est défini. Les circonstances du décès sont discutées au sein de l’équipe soignante et, en fonction de l’évolution et du besoin, un rituel d’adieu ou un suivi pour l’équipe est organisé.

Outils de communication

Condoléances

– «J’ai le regret de devoir vous annoncer que votre père, M. XY, est décédé dans la nuit d’hier. Je tiens à vous présenter nos plus sincères condoléances.»;
– «Je dois vous communiquer une triste nouvelle: pouvons-nous en parler maintenant ou souhaitez-vous d’abord vous rendre dans un endroit calme?».

Informations (selon le contexte, tout n’aura pas besoin d’être clarifié)

– «Souhaitez-vous obtenir davantage d’informations pour l’instant?»;
– «Avez-vous des questions concernant la cause du décès?;
– Souhaitez-vous que nous pratiquions une autopsie pour répondre à ces questions?»;
– «Nous ignorons malheureusement si votre proche avait exprimé des souhaits ou pris des décisions concernant une éventuelle autopsie ou le don d’organes. Auriez-vous plus d’informations à ce sujet?».

Accompagnement

– «De quoi avez-vous besoin maintenant et comment pouvons-nous rester en contact?» (par ex. convenir de visites, proposer un entretien plus tard, etc.).

Partie médicale dans la prise en charge des personnes mourantes

Les tâches médicales sont particulièrement claires pour l’identification de la phase terminale, en particulier dans le contexte de causes potentiellement réversibles d’une détérioration aiguë, pour la communication entre le médecin, souvent chef d’équipe, et les proches, ainsi que pour l’ajustement des mesures thérapeutiques, ­c.-à-d. l’arrêt des médicaments préventifs secondaires préexistants et la prescription souvent prophylactique de médicaments de réserve contre les symptômes les plus fréquents durant la phase terminale (dyspnée, douleurs, délire, nausées, sécrétions bronchiques). Pour ce dernier aspect, il est utile, lorsqu’au sein de réseaux ou d’institutions, des algorithmes thérapeutiques sont élaborés sur la base d’un consensus interprofessionnel en s’appuyant sur des directives, comme c’est le cas des ­algorithmes figurant dans le document de palliative ch, afin de permettre au personnel soignant de mettre en œuvre un traitement symptomatique de qualité et ce, même en l’absence du personnel médical.
Les médecins de famille sont souvent des «guides» de premier plan pour les personnes concernées dans cette situation de crise en raison de l’estime réciproque et de la quête commune de «chemin» depuis des années. En particulier à l’hôpital, il s’avère dès lors utile d’impliquer activement le médecin de famille dans la communication durant la phase terminale.

Conclusion

La formation médicale ne prépare guère les médecins à un accompagnement de qualité des personnes mourantes et de leurs proches. Il pourrait s’agir là d’une conséquence des contenus pédagogiques orientés vers la guérison. Toutefois, la réalité reflète la confrontation fréquente à ce domaine exigeant dès la période d’assistanat.
Une excellente qualité de la prise en charge des personnes mourantes présuppose une anticipation systématique de la fin de vie et surtout une communication précoce au sujet du décès potentiel. La double planification fondée sur le principe «preparing for the worst, hoping for the best» améliore la qualité de la relation entre les professionnels et le patient/ses proches et elle ne nuit d’aucune manière, comme de nombreux professionnels le redoutent encore.
La sincérité et la joie partagée lorsque de petits succès sont obtenus malgré les circonstances de vie fâcheuses constituent des ingrédients essentiels de la prise en charge en fin de vie, même durant la phase terminale, et elles sont très gratifiantes sur le plan humain et professionnel. C’est pour cette raison que bon nombre d’entre nous ont choisi la profession de médecin: car le peu prévisible et les preuves scientifiques s’affrontent sans cesse et ne peuvent finalement être conciliés que grâce à l’expérience et aux qualités communicationnelles humaines. Et cet aspect est particulièrement vrai et essentiel dans l’accompagnement des personnes mourantes et de leurs proches.

L’essentiel pour la pratique

L’accompagnement des personnes mourantes et de leurs proches fait partie du quotidien de la médecine. Les médecins ne sont qu’insuffisamment préparés à cette tâche essentielle durant leur formation. Par conséquent, la société de discipline palliative ch a élaboré des recommandations d’approche modèle à adopter au cours des 4 à 7 derniers jours de vie à l’usage des professionnels, en se basant sur la littérature et la pratique internationales. Les étapes essentielles sont:
• l’identification de la phase terminale;
• l’évaluation des principaux symptômes et facteurs de stress;
• l’adaptation de la médication en conservant uniquement les médicaments d’action symptomatique, de même que la communication intensive, y compris avec les proches;
• l’évaluation régulière du processus;
• lors du décès, une combinaison réussie d’humanité et d’orientation administrative.
Vous trouverez l’éditorial relatif à cet article à la page 622 de ce numéro.
Les auteurs n’ont pas déclaré des obligations financières ou ­personnelles en rapport avec l’article soumis.
Prof. Dr méd.
Steffen
Eychmüller
Universitäres Zentrum
für Palliative Care (PZI)
SWAN Haus
Freiburgstrasse 28
CH-3010 Bern
steffen.eychmueller[at]
insel.ch
 2 Blinderman CD, Billings JA. Comfort Care for Patients Dying in the Hospital. N Engl J Med. 2015 Dec 24;373(26):2549–61.
 3 Raijmakers NJ, van Zuylen L, Costantini M, Caraceni A, Clark JB, De Simone G, et al. Issues and needs in end-of-life decision making:
an international modified Delphi study. Palliat Med. 2012;26(7):
947–53.
 5 Ellershaw J, Murphy D, Fürst CJ, Abbott R, Wilkinson S. The International Programme for Best Care for the Dying Person 10 Step Implementation Model. Liverpool: The Marie Curie Palliative Care Institute. April 2015.
– Ellershaw J, Wilkinson S. Care of the Dying. A pathway to excellence. Oxford: University Press. 2011.
– Eychmüller S. Palliativmedizin Essentials. Bern: Huber. 2015.
Littérature supplémentaire disponible auprès des auteurs.