(Dés)escalade dans le traitement du carcinome mammaire au stade précoce
Appel à toutes les disciplines médicales!

(Dés)escalade dans le traitement du carcinome mammaire au stade précoce

Übersichtsartikel AIM
Édition
2018/25
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2017.03238
Forum Med Suisses. 2018;18(25):526-531

Affiliations
Inselspital, Universitätsspital Bern
a Universitätsklinik für Medizinische Onkologie; b Universitätsklinik für Frauenheilkunde; c Universitätsklinik für Radio-Onkologie; d Brust- und Gynäkologisches Tumorzentrum

Publié le 20.06.2018

Un traitement individualisé du carcinome mammaire au stade précoce devrait réduire le risque d’un sur-traitement ou d’un sous-traitement. Diverses options d’escalade et actuellement surtout de désescalade sont disponibles.

Introduction

«Escalating and De-Escalating»: le thème de la 15e conférence de consensus de Saint-Gall de mars 2017 s’est retrouvé dans tous les domaines thérapeutiques [1]. L’objectif est de traiter de manière plus individuelle les patientes atteintes de cancer du sein au stade précoce et de réduire ainsi le risque de sur-traitement voire de sous-traitement.
Le tableau 1 fournit un aperçu des options actuellement disponibles pour la désescalade et l’escalade thérapeutiques en cas de carcinome mammaire au stade précoce.
Tableau 1: Traitement individualisé en cas de carcinome mammaire au stade précoce: options actuelles de désescalade et d’escalade.
 DésescaladeEscalade.
Chirurgie– La mastectomie n’est plus le standard
– «no tumor on ink»; 2 mm pour le carcinome canalaire 
in situ (CCIS)
– Moins de lymphadénectomies axillaires
Radiothérapie– Hypofractionnement en cas d’irradiation totale du sein
– Irradiation partielle du sein en présence d’une situation à faible risque
– Le cas échéant, aucun boost pour les plus de 60 ans
Irradiation des voies de drainage lymphatique
Oncologie 
médicale– Moins de chimiothérapie en cas de carcinome ER+
– Paclitaxel et trastuzumab: HER2+ cN0 jusqu’à 3 cm
– Aucune chimiothérapie en cas de cancer du sein TN T1a
– Capécitabine en cas de tumeurs résiduelles (?)
– Hormonothérapies de longue durée / combinées

Sous-types moléculaires – la base pour la désescalade de la chimiothérapie adjuvante

Sur la base des profils d’expression des gènes, quatre types de cancer du sein, qui diffèrent sur le plan biologique ainsi qu’en termes d’évolution et de réponse au traitement, ont été définis il y a plus de 10 ans («intrinsic subtypes»). Les carcinomes de sous-type luminal A sont des tumeurs présentant une faible prolifération, une forte positivité des récepteurs de l’œstrogène (ER) et des récepteurs de la progestérone (PR) ainsi qu’une cascade de signalisation HER2 négative (HER2–). Les carcinomes de sous-type luminal B sont ER+, présentent une expression des ER/PR et HER2 variable ainsi qu’une biologie tumorale plus agressive (grade et prolifération plus élevés). Les carcinomes HER2+ présentent une surexpression de HER2. Les carcinomes triple-négatifs (TN) sont à leur tour définis par l’absence d’expression des ER/PR et de HER2 (tab. 2). En 2011, ces sous-types intrinsèques ont été inclus pour la première fois dans le consensus de la «St. Gallen International Breast Cancer Conference» [2–4].
Tableau 2: Types moléculaires de cancer du sein et définition immunohistochimique de leurs substituts (selon [3, 35, 36]).
Sous-type moléculaireDéfinition immunohistochimique
«Type luminal A»ER+, PR >20%, HER2–, Ki67 <20%
«Type luminal B, HER2–»ER+, HER2–; 
Ki67 >30% ou PR <20%
«Type luminal B, HER2+»ER+, HER2+; chaque Ki67 ou valeur PR
«HER2+, non luminal»HER2+; ER et PR–
«Triple négatif»ER, PR et HER2 tous négatifs
Les sous-types forment la base des recommandations relatives au traitement adjuvant, puisqu’ils présentent une valeur prédictive de la réponse thérapeutique (traitement hormonal et chimiothérapie ainsi que traitement ciblant HER2) [4]. Cette approche a largement pris le dessus sur la considération primaire de facteurs non biologiques tels que la taille de la tumeur et le nombre de ganglions lymphatiques affectés. Dans le cas des carcinomes de sous-types luminal A et B, un traitement antihormonal sera efficace. Les patientes atteintes de carcinomes HER2+ bénéficient essentiellement de traitement ciblant HER2. Pour les carcinomes TN, la chimiothérapie reste l’unique option.
Le statut HER2 peut être déterminé par immunohistochimie ou, de manière plus fiable, par hybridation in situ en fluorescence. Le statut ER/PR et la prolifération (Ki-67) sont déterminés par immunohistochimie (tab. 2). L’importante variabilité des résultats entre les examinateurs et la standardisation internationale non encore établie constituent des limitations majeures pour ces marqueurs de substitution de la prolifération. A ce sujet, d’autres études sont également en cours en Suisse. Ce paramètre central pour la définition du sous-type luminal B s’élevait encore à 14% lors du «St. Gallen Consensus» de 2011 (c.-à-d. Ki67 > 14% = sous-type luminal B), avant d’être fixé à 20% en 2013 et entre 20–30% en 2015 [5]. La valeur du Ki-67 ne peut pas contribuer entièrement à la prise de décision, surtout lorsqu’elle se trouve dans la zone grise.
Les tests multigéniques tentent de combler cette brèche et d’effacer l’incertitude. Par ailleurs, leur développement est accompagné de la prise de conscience du fait que le bénéfice absolu de la chimiothérapie avait été surestimé par rapport au traitement antihormonal [6] et que le sous-type luminal A est au sens strict résistant à la chimiothérapie. L’utilisation des divers tests multigéniques est désormais en partie évaluée dans des études prospectives. En principe, elles mesurent toutes la même chose, à savoir le pronostic en fonction de la prolifération [7–11]. En cas de carcinome mammaire ER+ au stade précoce, un risque élevé de récidive justifie la recommandation d’une chimiothérapie adjuvante (en complément du traitement antihormonal). Contrairement aux récepteurs hormonaux et à HER2, les tests ne peuvent toutefois pas prévoir si la chimiothérapie sera efficace. L’utilisation des tests a entraîné une baisse des prescriptions de chimiothérapie en présence de carcinomes mammaires ER+ et a permis aux confrères et consœurs de se sentir plus confiants lors de la prise de décision pour ou contre une chimiothérapie [12]. Jusqu’à présent, il n’existe que peu de données concernant les patientes avec atteinte ganglionnaire (par ex. «PAM50 risk of recurrence [ROR] Score»), une clarification plus précise peut être attendue de l’étude RxPONDER (Oncotype DX™). Celle-ci pourrait avoir pour conséquence que toutes les patientes présentant une atteinte ganglionnaire ne se voient pas automatiquement proposer une chimiothérapie adjuvante. Au quotidien, les tests remboursés par la caisse d’assurance-maladie doivent être proposés à une patiente en principe apte et également disposée à recevoir une chimiothérapie lorsque la prolifération déterminée par immunohistochimie ne permet pas une classification exacte dans le sous-type luminal A ou B, c’est-à-dire pour une valeur de Ki-67 entre 15 et 25%.
Dans le cas des carcinomes mammaires TN et HER2+, un bouleversement significatif a également eu lieu. Avant l’emploi du trastuzumab, le pronostic du cancer du sein HER2+ était défavorable, de sorte qu’une polychimiothérapie était recommandée à toutes les patientes. Une étude de phase II innovante a montré d’excellents résultats avec le trastuzumab lorsque la chimiothérapie consistait en seulement 12 administrations hebdomadaires de paclitaxel. Ce traitement est désormais largement répandu pour les tumeurs jusqu’à 3 cm [13]. En présence de carcinomes de plus petite taille (HER2+ et TN), il serait à l’avenir possible, au vu du pronostic favorable, de renoncer entièrement à un traitement médicamenteux adjuvant le cas échéant: Ainsi, lors du «St. Gallen Consensus» de 2017, 78,0% des membres du comité se sont prononcés en défaveur de la chimiothérapie en cas de carcinome mammaire TN <5 mm (T1a) sans atteinte ganglionnaire.

Traitement péri-opératoire – désescalade, mais aucune escalade

Dans le cas des carcinomes mammaires HER2+ et TN aux stades II et III, le traitement médicamenteux avant l’intervention (néoadjuvant) doit être envisagé s’il est susceptible de permettre une désescalade de la procédure opératoire et éventuellement aussi de la radiothérapie. L’approche néoadjuvante peut également avoir pour conséquence l’individualisation du traitement après avoir obtenu la réponse attendue. Chez les patientes HER2+ atteintes d’un carcinome mammaire localement avancé, la disparition complète de la tumeur a déjà été atteinte dans 27% des cas sous blocage de la voie HER2 par trastuzumab et pertuzumab, c’est-à-dire sans chimiothérapie [14]. Actuellement, les options sont toutefois limitées pour les patientes présentant un carcinome résiduel après traitement néoadjuvant: Une étude récemment publiée a fourni des résultats prometteurs en cas de poursuite postopératoire de la chimiothérapie à base de capécitabine [15]. Toutefois, quelques études portant sur ce contexte (y compris l’utilisation de capécitabine) ont auparavant échoué de sorte que l’escalade ne soit actuellement pas une option établie.

Hormonothérapie de longue durée – 
escalade à tout prix?

Au cours des 10 dernières années, plusieurs études ont examiné la valeur du traitement endocrinien adjuvant au-delà de 5 ans. Ces études incluaient des traitements antihormonaux par tamoxifène ou des inhibiteurs de l’aromatase (IA) pour une durée allant jusqu’à 10 ans, ou le passage à des IA au bout de 2 à 5 ans sous tamoxifène [16, 17]. Le traitement endocrinien étendu permet d’obtenir de manière constante une baisse du risque de récidive. Par conséquent, un traitement endocrinien adjuvant de longue durée doit être recommandé aux patientes présentant un risque de récidive modéré à élevé si la tolérance est bonne. La tendance consiste à évaluer la poursuite du traitement en premier lieu chez les patientes ayant d’abord reçu du tamoxifène. Etant donné que la meilleure hormonothérapie ne peut néanmoins qu’être celle qui est effectivement prise, la préférence et la tolérance thérapeutique jouent un rôle central dans le choix du traitement. Le traitement endocrinien étendu s’accompagne notamment de symptômes ménopausiques persistants et d’un risque accru d’ostéoporose.
Actuellement, les tests multigéniques ou les autres procédés mentionnés au début ne peuvent cependant pas être utilisés pour identifier les patientes qui profiteront d’un traitement antihormonal prolongé.

Chirurgie de la tumeur primaire – 
la question des marges d’exérèse 
définitivement résolue

La désescalade concernant le traitement chirurgical du carcinome mammaire s’impose heureusement de plus en plus. Les données le montrent sans ambiguïté: la mastectomie n’apporte aux femmes aucun avantage de survie par rapport à une intervention mammaire conservatrice correctement réalisée [18]. Les exigences relatives aux marges d’exérèse ont également été réduites: Depuis 2 ans déjà, les marges d’exérèse définies par «no tumor on ink» (pas de tumeur au contact de l’encre) sont acceptées pour le carcinome invasif [19]. En 2017, les marges d’exérèse du carcinome canalaire in situ (CCIS) ont fait l’objet de discussions. A la question de savoir quelles marges d’exérèse seraient suffisantes en présence d’un CCIS pur avec chirurgie mammaire conservatrice et radiothérapie planifiée, 61,5% des participants ont opté pour 2 mm, mais un tiers (34,6%) a considéré que «no ink on DCIS» (pas de CCIS au contact de l’encre) était également acceptable (fig. 1). Bien qu’il soit connu qu’une marge d’exérèse <2 mm est associée à un risque accru de récidive locale même après radiothérapie complémentaire, il convient, lors de la recommandation d’une nouvelle exérèse, de prendre en considération des facteurs tels que l’extension des microcalcifications, la présence de microcalcifications résiduelles, l’extension du CCIS sur la marge d’exérèse, l’influence sur le résultat cosmétique, mais également l’espérance de vie de la patiente. A la question de savoir si les marges d’exérèse doivent dépendre de la biologie tumorale, 93,5% des membres du comité de Saint-Gall ont clairement répondu par la négative.
Figure 1: Distances de sécurité actuelles pour le traitement chirurgical du carcinome mammaire invasif et du carcinome canalaire in situ (CCIS).

Le creux axillaire – s’éloigner du rôle thérapeutique de la chirurgie

Après que l’exérèse du ganglion sentinelle avec examen extemporané en présence d’un creux axillaire cliniquement normal est acceptée depuis plusieurs années comme procédure standard, le rôle d’une dissection axillaire chez les patientes présentant un à deux ganglions sentinelles positifs (avec micro-métastases) fait de plus en plus souvent l’objet de discussions [20, 21]. Dans le cas d’une mastectomie sans radiothérapie subséquente pour les voies de drainage lymphatique, une autre dissection axillaire est recommandée. En cas de chirurgie mammaire conservatrice, le curage axillaire complet n’est plus préconisé (sur le modèle de l’étude ACOSOG Z0011 avec période de suivi de 10 ans [22] et radiothérapie subséquente de la totalité du sein). Ici aussi, comme pour les marges d’exérèse, l’âge de la patiente et la biologie tumorale ne devraient pas entrer en jeu pour la recommandation. Si l’aisselle présente une atteinte tumorale cliniquement palpable, une dissection axillaire reste recommandée. Le rôle de la chirurgie de l’aisselle est examiné plus avant dans des études en cours, afin de savoir s’il est possible de renoncer au ganglion sentinelle dans certains cas (par ex. étude SOUND, INSEMA).

Chirurgie avec approche néoadjuvante – désescalade grâce à la collaboration 
entre les spécialistes

Un traitement néoadjuvant peut faire baisser le taux d’opérations mammaires conservatrices et les dissections axillaires de 40% chacun. En cas de réponse favorable à la chimiothérapie, il est possible d’obtenir une réduction considérable de la taille de la tumeur, voire même sa disparition complète. C’est pourquoi l’intervention chirurgicale peut désormais s’orienter sur les nouvelles limites de la tumeur. Les anciennes marges et les ganglions lymphatiques doivent encore être pris en considération ou excisés uniquement en présence d’une tumeur ou de microcalcifications associées à un CCIS. Une incertitude subsiste quant au moment de l’exérèse du ganglion sentinelle en présence de ganglions lymphatiques cliniquement normaux: La majorité des membres du comité de Saint-Gall ont jugé que le ganglion sentinelle pouvait être retiré lors de l’opération définitive et donc après la chimiothérapie. La procédure en présence d’un à deux ganglions lymphatiques cliniquement suspects au moment de l’établissement du diagnostic et en cas de réponse à la chimiothérapie complète visible à l’imagerie reste actuellement incertaine. A ce sujet, 42,9% des membres du comité du «St. Gallen Consensus» ont considéré comme possible la procédure consistant à exciser le ganglion sentinelle et à renoncer à la dissection axillaire en cas d’examen extemporané négatif, tandis que 53,6% étaient contre. Si une excision du ganglion sentinelle doit être effectuée en cas de conversion cN1/cN0, il est recommandé d’utiliser deux méthodes de recherche de ganglions sentinelles, afin de pouvoir détecter >2 ganglions lymphatiques. De même, le ganglion lymphatique préalablement touché et celui qui a été marqué par un clip avant le traitement doivent être excisés. Si des macro-métastases sont mises en évidence, une dissection axillaire complète reste en majorité recommandée.

Radiothérapie – Désescalade grâce 
à l’hypofractionnement et à l’irradiation partielle du sein

Tandis que, dans les études des années 80, les autres disciplines médicales impliquées dans le traitement du cancer du sein tentaient de redimensionner entièrement la radiothérapie et pas uniquement en cas de carcinome mammaire opéré de manière conservatrice (chirurgie et radiothérapie versus chirurgie seule), les radio-oncologues ont désormais eux-mêmes pris en main la désescalade. Des motifs socio-économiques ont contraint principalement les Canadiens et les Britanniques à remplacer l’irradiation totale du sein pour une durée de 5 semaines (1,8–2 Gy/jour) par des doses unitaires quotidiennes supérieures (par ex. DU 2,67 Gy/jour), ce qui a réduit la durée du traitement de 25 fractions à 15–16 fractions. L’efficacité est au moins tout aussi bonne, pour une toxicité aiguë moindre et une meilleure qualité de vie [23, 24]. Jusqu’à présent, aucun effet indésirable retardé n’a été enregistré au niveau du cœur et des poumons, de sorte que ce concept ait été accueilli comme concept standard par 70% des participants lors de la conférence de Saint-Gall de 2017. Il convient toutefois de prendre en considération que, dans ces études, la toxicité cardiaque et pulmonaire ne constituait pas un critère d’évaluation et n’a pas non plus été examinée explicitement. En cas d’irradiation totale du sein, certaines portions des poumons, et parfois également du cœur, sont toujours comprises dans la zone irradiée, ce qui pourrait être à l’origine d’éventuels effets indésirables retardés. C’est pourquoi il convient d’épargner le plus possible au moins le cœur, par exemple à l’aide de la radiothérapie asservie à la respiration.
L’irradiation totale du sein est normalement complétée ensuite par l’irradiation du lit tumoral (= boost, 5 × 2 Gy). Tandis que les données à long terme de l’étude «boost versus no boost» (suivi sur 20 ans) ont certes montré un avantage supplémentaire pour toutes les tranches d’âge [25], celui-ci ne s’est toutefois avéré que très faible dans certains groupes [26]. Ainsi, la majorité des membres de la conférence ont décidé de renoncer à la saturation chez les plus de 60 ans présentant des tumeurs de faible grade, une biologie favorable et dont le traitement endocrinien adjuvant est prévu. Il convient toutefois de noter que l’étude Boost réalisée par Bartelink [25, 26] se basait sur une marge d’exérèse exempte de tumeur de 1–2 cm et qu’en présence de marges d’exérèse plus petites, un boost de 25 Gy a même pu avoir lieu.
L’irradiation partielle du sein représente une autre forme de désescalade. Tandis que la procédure intra-opératoire unique n’a jusqu’à présent pas fourni de résultats à long terme satisfaisants, la curiethérapie interstitielle multi-cathéters a permis d’obtenir des données d’équivalence pour une période de suivi de 5 ans par rapport à l’irradiation totale du sein [27]. En 2015, les directives américaines relatives au carcinome mammaire au stade précoce opéré de manière conservatrice ont été adaptées en conséquence, les Européens n’ont suivi à ce sujet que plus tard. Cette irradiation partielle accélérée du sein a non seulement tenu tête au contrôle locorégional, mais présente une valeur au moins égale en termes de toxicité aiguë et retardée lorsqu’elle est exécutée de manière appropriée [28, 29]. Ainsi, l’irradiation partielle du sein a également obtenu à Vienne l’approbation unanime conformément aux directives de l’ASTRO et l’ESTRO pour être employée comme alternative en cas de carcinome à faible risque (fig. 2).
Figure 2: Représentation des isodoses dans le cas d’une irradiation totale du sein (à gauche) et d’une irradiation partielle du sein au moyen de la curiethérapie (à droite).
Chez les patientes de plus de 70 ans présentant un faible profil de risque et bénéficiant d’un traitement endocrinien adjuvant, la suppression complète de la radiothérapie [30] suite à un carcinome mammaire opéré de manière conservatrice est envisageable et doit être abordée lors de la consultation initiale de radio-oncologie.

Radiothérapie des voies de drainage lymphatique – escalade avec mesure

Tandis que les efforts se multiplient d’une part pour minimiser le plus possible le volume d’irradiation et épargner les organes à risque, des données actuelles issues des études EORTC et MA20 [31, 32] suggèrent d’autre part que les patientes pourraient profiter d’une irradiation incluant largement les voies de drainage lymphatique en termes de contrôle locorégional et de survie globale. Dans le cadre de la conférence de Saint-Gall, les membres se sont clairement (à 100%!) exprimés en faveur du maintien de l’irradiation étendue chez les patientes à haut risque (>/= 4 ganglions lymphatiques atteints par le cancer), ce qui correspond à l’irradiation de la poitrine/paroi thoracique et de la région supra-claviculaire. Seuls plus de 60% des membres ont estimé nécessaire d’appliquer en outre un traitement adjuvant à la région mammaire interne ou de le mettre en œuvre si un à trois ganglions lymphatiques sont atteints, en particulier après ablation, chez les plus de 40 ans ou en présence de facteurs de risque supplémentaires. De même, l’irradiation du creux axillaire (niveau I et II) reste controversée. Même si les données AMAROS ont montré que le taux d’œdèmes lymphatiques de l’irradiation de l’aisselle semble plus faible que celui d’une opération étendue, une décision interdisciplinaire à prendre de manière critique au cas par cas s’avère nécessaire pour pouvoir évaluer le profil de risque détaillé de chaque patiente [32–34].

L’essentiel pour la pratique

• La prise en considération accrue des effets indésirables (à long terme) ­et la reconnaissance du carcinome mammaire comme une pathologie systémique constituent les conditions préalables pour des traitements individualisés du carcinome mammaire au stade précoce; ceux-ci concernent actuellement principalement des désescalades.
• La chirurgie a réalisé les progrès les plus visibles pour nos patientes: l’opération mammaire conservatrice constitue le standard et le curage axillaire l’exception.
• En matière de radiothérapie, l’irradiation totale du sein a lieu, si possible, sous forme d’un hypofractionnement. En présence d’un profil de risque faible, il est possible de renoncer à un boost ou d’effectuer une irradiation partielle du sein (par ex. au moyen de la curiethérapie interstitielle multi-cathéters).
• L’irradiation des voies de drainage lymphatique n’est proposée qu’aux ­patientes à risque élevé et dans le cadre d’un concept thérapeutique interdisciplinaire.
• Les sous-types moléculaires ont remplacé les facteurs non biologiques comme base des recommandations relatives au traitement médicamenteux adjuvant; cela conduit à moins de chimiothérapies.
• Dans le cadre du traitement systémique, il existe une multitude de désescalades, tandis que les possibilités d’escalade sont limitées.
Les auteurs n’ont pas déclaré des obligations financières ou personnelles en rapport avec l’article soumis.
PD Dr méd. Urban Novak
Leitender Arzt
Universitätsklinik für
Medizinische Onkologie
und Brust- und
Gynäkologisches
Tumorzentrum
Inselspital
Universitätsspital Bern
CH-3010 Bern
urban.novak[at]insel.ch
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