Insuffisance rénale médicamenteuse dans la pratique clinique quotidienne
Un aperçu

Insuffisance rénale médicamenteuse dans la pratique clinique quotidienne

Übersichtsartikel AIM
Édition
2018/32
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2018.03345
Forum Med Suisses. 2018;18(32):628-635

Affiliations
a Universitätsklinik für Nephrologie und Hypertonie, Inselspital, Universität Bern, Bern; b Departement für Innere Medizin, Nephrologie,
HFR Freiburg – Kantonsspital, Freiburg

Publié le 07.08.2018

Un médicament est vite prescrit et dans leur quotidien professionnel frénétique, les médecins passent souvent à côté des facteurs de risque et interactions potentiels.

Introduction

Un médicament est vite prescrit et dans leur quotidien professionnel frénétique, les médecins passent souvent à côté des facteurs de risque et interactions potentiels. La détérioration de la fonction rénale induite par des médicaments est l’une des causes les plus ­fréquentes d’insuffisance rénale aiguë (IRA) acquise. Le médecin prescripteur a le devoir d’évaluer les facteurs de risque potentiels avant l’initiation d’un traitement et en cas d’indication impérieuse, de surveiller la fonction rénale afin de détecter à temps une néphrotoxicité et d’initier d’éventuelles contre-mesures.
La détection précoce d’une néphrotoxicité représente un défi particulier. Initialement, elle est souvent asymptomatique et non oligurique et elle est uniquement remarquée plus tardivement, lorsque le débit de filtration glomérulaire (DFG) chute significativement.
Les principaux mécanismes physiopathologiques de toxicité tubulaire directe, d’ischémie et d’obstruction tubulaire peuvent, d’une manière tout à fait schématique, affecter les différentes portions anatomiques et fonctionnelles des reins: glomérule, tubules, capillaires péritubulaires et interstitium. Il convient cependant de garder à l’esprit que certains médicaments peuvent avoir simultanément un effet néphrotoxique au niveau de différents sites. En outre, une potentialisation mutuelle des médicaments néphrotoxiques est possible.

Définition et épidémiologie

L’IRA est l’une des complications les plus fréquentes et les plus graves chez les patients hospitalisés. Elle est définie comme une diminution aiguë et le plus souvent réversible de la fonction rénale, qui se traduit par une élévation des valeurs des déchets azotés (rétention azotée) et/ou par une diminution de la diurèse. Lorsque ce trouble fait suite à une exposition récente à un ­médicament potentiellement néphrotoxique et que d’autres causes possibles ont été exclues, on parle ­d’insuffisance rénale médicamenteuse ou iatrogène. Il s’agit d’un diagnostic clinique et dans la plupart des cas, d’un diagnostic d’exclusion.
Il est difficile d’obtenir des données épidémiologiques précises, car la définition de l’IRA varie dans les différentes études et au fil des décennies. L’étiologie et l’incidence de l’IRA dépendent fortement de la population étudiée; ainsi, dans les pays du Tiers monde, les maladies infectieuses, les accidents et les complications obstétricales représentent les principales causes d’IRA, tandis que le sepsis, l’hypovolémie, la néphrotoxicité médicamenteuse et la combinaison de ces facteurs prédominent dans les pays développés. La casuistique varie également en fonction des sites de prise en charge primaire. La défaillance multi-organique et l’insuffisance rénale post-opératoire sont plus fréquentes dans les grandes cliniques. Etant donné que les valeurs des déchets azotés et la diurèse sont rarement surveillées de manière systématique durant toute la durée d’hospitalisation, et encore moins en ambulatoire, il est parfaitement possible que la fréquence indiquée ne représente que la partie visible de l’iceberg. En outre, à la fois l’incidence et la prévalence de l’IRA augmentent avec l’âge et le nombre de comorbidités, ce qui souligne l’importance de ce problème dans le contexte de l’évolution démographique actuelle.
Des critères diagnostiques spécifiques existent et sont principalement utilisés dans les domaines de l’épidémiologie et de la gestion de cas. Bien qu’ils aient une certaine valeur pronostique, ils ne sont pas particulièrement utiles dans la pratique clinique quotidienne, que ce soit pour les mesures diagnostiques ou pour les mesures thérapeutiques.
Les classifications «Acute Kidney Injury Network» (AKIN) et «Risk, Injury, Failure, Loss, End-stage renal disease» (RIFLE) sont largement acceptées aujourd’hui [1, 2] (tab. 1a et 1b).
Tableau 1a: Définition de l’insuffisance rénale aiguë du «Acute Kidney Injury Network» (définition AKIN) (adaptée et traduite d’après [1]: Mehta RL, Kellum JA, Shah SV, Molitoris BA, Ronco C, Warnock DG, et al. Acute Kidney Injury Network: report of an initiative to improve outcomes in acute kidney injury. Crit Care. 2007;11(2):R31. © Mehta et al.; licensee BioMed Central Ltd. 2007, open access article published under the terms of the Creative Commons Attribution License [http://creativecommons.org/licenses/by/2.0]).
Diminution abrupte (en l’espace de 48 heures) de la fonction rénale, définie par:
– une élévation absolue de la créatinine sérique ≥26,5 µmol/l (0,3 mg/dl),
– un pourcentage d’élévation de la créatinine sérique ≥50% (1,5 fois la valeur initiale) ou
– une diminution de l’excrétion d’urine <0,5 ml/kg/h pendant plus de 6 heures.
Tableau 1b: Stadification RIFLE et AKIN [1, 2].
Stade RIFLEStade AKINCréatinine sériqueExcrétion d’urine
«Risk»1– Elévation de la créatinine d’1,5 fois et/ou diminution du DFG de >25% (RIFLE)
– Elévation de la créatinine d’1,5 à 2 fois et/ou élévation de la créatinine ≥26,4 µmol/l (0,3 mg/dl) (AKIN)
<0,5 ml/kg/h 
pendant 6 h
«Injury»2– Elévation de la créatinine de 2 fois et/ou diminution du DFG de >50% (RIFLE)
– Elévation de la créatinine de 2 à 3 fois (AKIN)
<0,5 ml/kg/h 
pendant 12 h
«Failure»3– Elévation de la créatinine de 3 fois et/ou diminution du DFG de >75% et/ou créatinine sérique ≥354,6 µmol/l (≥4 mg/dl)
– Elévation de la créatinine de >3 fois et/ou créatinine sérique ≥354,6 µmol/l avec une élévation absolue de >44 µmol/l (>0,5 mg/dl)
<0,3 ml/kg/h pendant 24 h ou anurie pendant 12 h
«Loss of kidney function»Insuffisance rénale persistante pendant >4 semaines 
«End-stage kidney disease»Insuffisance rénale persistante pendant >3 mois 
–: non applicable; RIFLE = «Risk, Injury, Failure, Loss, End-stage renal disease»; AKIN = «Acute Kidney Injury Network».
Le taux de patients quittant l’hôpital avec le diagnostic d’IRA est passé de 0,4% en 1988 à 2,1% en 2002, ce qui correspond à une augmentation de l’incidence de 61 à 288 cas pour 100 000. Lorsque l’on considère les cas dialysés, cette fréquence diminue d’un facteur 10. Parallèlement à cette augmentation, la mortalité a diminué, passant de 40,4% à 20,3% [3].
Le sepsis (47%) et l’hypovolémie (32%) représentent les causes les plus fréquentes d’IRA, et 39% de tous les patients présentent une genèse multifactorielle. Des données claires relatives à l’IRA médicamenteuse font défaut. Après exclusion de tous les patients décédés, la réversibilité constitue la règle: 92,5% des patients ­récupèrent totalement et 7% récupèrent partiellement. Moins d’1% des patients ne se rétablissent pas [4].

Pathomécanismes

Divers mécanismes physiopathologiques peuvent être à l’origine d’une détérioration de la fonction rénale d’origine médicamenteuse. Les principaux mécanismes et médicaments responsables sont présentés dans les lignes qui suivent.

Altérations de l’hémodynamique glomérulaire

Par le biais d’interactions entre les résistances vasculaires pré-glomérulaires et post-glomérulaires, le DFG reste stable dans une large fourchette de valeurs, et ce indépendamment de la pression artérielle systémique. Lorsque la capacité de régulation des mécanismes compensatoires est dépassée, il se produit une chute du DFG et de la perfusion péritubulaire, avec en conséquence une baisse de la diurèse et une hypoperfusion des tubules. Une hypoxie tissulaire persistante conduit à des lésions tubulaires irréversibles pouvant aller jusqu’à une nécrose tubulaire aiguë.

Vasoconstriction (artériole glomérulaire ­afférente) et/ou hypotension systémique

Les inhibiteurs de la calcineurine, l’amphotéricine B et les produits de contraste iodés entraînent une vasoconstriction des vaisseaux afférents via une réaction médiée par l’endothéline. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ont un effet vasoconstricteur induit par l’inhibition des prostaglandines vasodilatatrices au niveau de l’artériole glomérulaire afférente.

Vasodilatation (artériole glomérulaire efférente)

L’angiotensine II (ATII) exerce une vasoconstriction de l’artériole glomérulaire efférente. L’inhibition de l’action de l’ATII, par ex. par les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) ou les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARAII), provoque une dilatation de l’artériole glomérulaire efférente avec réduction de la pression intra-glomérulaire et ­diminution conséquente du DFG. Tandis que la vasoconstriction de l’artériole glomérulaire afférente et la vasodilatation de l’artériole glomérulaire efférente ont des effets semblables sur la pression de filtration glomérulaire, la vasodilatation post-glomérulaire n’a pas d’impact sur l’irrigation des cellules tubulaires en aval. Par conséquent, la baisse du DFG observée sous IECA et ARAII est généralement purement fonctionnelle et réversible. L’utilisation concomitante de diurétiques, d’IECA et/ou d’ARAII et d’AINS augmente le risque d’insuffisance rénale par survenue combinée d’une hypovolémie pré-rénale, d’une réduction du ­débit sanguin rénal et d’une diminution du DFG [5].

Toxicité tubulaire directe

La toxicité tubulaire directe résulte d’une perturbation de la perméabilité membranaire ou d’un endommagement direct dans le cytosol suite à une endocytose et elle est responsable d’une élévation de la concentration de calcium intracellulaire et/ou d’une libération de ­radicaux libres. Il se produit une perte de la polarité cellulaire, avec formation d’œdème, vacuolisation et apoptose. Les cellules détruites se détachent de la membrane basale et peuvent obstruer la lumière des tubules [6].
Ces processus se déroulent souvent dans le tubule proximal, car c’est là que les substances filtrées sont pour l’essentiel concentrées et réabsorbées.
Parmi les médicaments pour lesquels ce pathomécanisme est pertinent figurent entre autres les amino­glycosides, l’amphotéricine B, le cisplatine, le méthotrexate, le foscarnet, les antiviraux (cidofovir) et les produits de contraste. La néphrotoxicité est typiquement dose-dépendante.

Atteinte glomérulaire

Certains médicaments, tels que l’hydralazine, la quinine, les inhibiteurs de la calcineurine, l’interféron-α, le lithium, les AINS et les bisphosphonates, peuvent être à l’origine d’une atteinte glomérulaire. Le spectre est vaste et peut aller d’une destruction aiguë des cellules endothéliales se traduisant par une microangiopathie thrombotique au tableau complet de glomérulonéphrite (GN). La dynamique est aussi relativement variable, avec des évolutions suraiguës sous forme de glomérulonéphrite rapidement progressive et vascularite (purpura de Schönlein-Henoch) ou alors des formes plutôt chroniques (GN membraneuse). Un lupus érythémateux d’origine médicamenteuse avec ­atteinte rénale est rare.

Néphrite interstitielle

Indépendamment de la dose, une réaction allergique peut être responsable d’une néphrite interstitielle aiguë (NIA, allergie de type IV) par infiltration de cellules inflammatoires dans l’interstitium (cellules T, monocytes, macrophages et en particulier éosinophiles pathognomoniques) [7]. Les glomérules ne sont pas touchés. Après une première exposition, l’atteinte rénale peut survenir de façon retardée, jusqu’à 3 semaines plus tard, mais en cas d’exposition répétée, elle peut déjà être mise en évidence plus tôt, en l’espace de quelques jours [8].
Des réactions allergiques s’observent le plus souvent après la prise d’antibiotiques (bêta-lactamines, quinolones, rifampicine, macrolides, sulfonamides, tétracyclines et vancomycine), mais également après la prise d’allopurinol, d’AINS, de diurétiques (diurétiques de l’anse et diurétiques thiazidiques), d’anticonvulsivants (phénytoïne), de virostatiques (aciclovir, indinavir) et d’inhibiteurs de la pompe à protons ([IPP]; oméprazole, ésoméprazole, pantoprazole, lanzoprazole). Un lien direct entre la prise d’IPP et la survenue d’une néphrite interstitielle a été décrit dans diverses études. Il semble s’agir d’un effet de classe, le moment de survenue est variable et le mécanisme d’action reste indéterminé. En outre, une association entre la prise d’IPP et la survenue d’une insuffisance rénale chronique a récemment été décrite dans deux grandes études [9, 10]. Il est impossible de conclure à un lien de causalité sur la base de ces données, d’autant plus que les IPP sont aujourd’hui fréquemment administrés concomitamment à des AINS potentiellement néphrotoxiques. Néanmoins, il est sans aucun doute judicieux de contrôler occasionnellement la fonction rénale en cas d’utilisation à long terme d’IPP.

Dépôts de cristaux

Des cristaux insolubles se forment dans le tubule distal dépendant de la concentration du médicament par rapport au pH urinaire et ils s’observent souvent sous méthotrexate, antibiotiques (ampicilline, ciprofloxacine, sulfonamides) et virostatiques (indinavir, aciclovir, foscarnet, ganciclovir). Le dépôt des cristaux provoque une obstruction dans les tubules, ce qui est à l’origine d’une réaction inflammatoire supplémentaire [8].
Une précipitation de substances endogènes, telles que l’acide urique et l’oxalate, est également possible, par ex. dans le cadre du syndrome de lyse tumorale (néphropathie uratique), après une intoxication à l’éthylène glycol ou après la prise de doses élevées de vitamine C (oxalate).

Néphrose osmotique

Certaines solutions à effet osmotique, telles que le mannitol, le dextrane ou le saccharose, utilisées comme stabilisateur pour certaines préparations d’immunoglobulines administrées par voie intraveineuse peuvent également être responsables d’une atteinte tubulaire: des molécules à fort effet oncotique sont absorbées dans les cellules tubulaires proximales par pinocytose et elles y provoquent un gonflement et une vacuolisation des cellules tubulaires par modification du gradient oncotique [8].

Atteinte rénale indirecte induite 
par des ­médicaments

Les médicaments peuvent également endommager les reins sans action allergique ou toxique directe (tab. 2). Outre les mécanismes décrits ci-dessus, tels que le lupus médicamenteux, le syndrome urémique hémolytique ou le syndrome de lyse tumorale, il convient avant tout de mentionner la rhabdomyolyse. Elle entraîne une diminution massive du volume circulant par le biais d’une translocation liquidienne vers les muscles endommagés et une obstruction des tubules par précipitation de la myoglobine. Par ailleurs, les protéines hémiques sont de puissants capteurs du monoxyde d’azote (NO) et une diminution de la concentration de NO entraîne une vasoconstriction médiée par l’endothéline. Les statines et le propofol sont des médicaments qui peuvent directement endommager les cellules musculaires. En outre, les opiacés, les sédatifs et les hypnotiques peuvent indirectement être à l’origine d’une rhabdomyolyse en entraînant une hypoperfusion prolongée des muscles.
Tableau 2: Aperçu des médicaments potentiellement néphrotoxiques (liste non exhaustive).
Classe de médicaments ProduitsPathomécanisme
AnalgésiquesParacétamol (acétaminophène)Néphrite interstitielle chronique
Aspirine®
Anti-inflammatoires non stéroïdiensAltération de l’hémodynamique glomérulaire
Néphrite interstitielle aiguë/chronique
Glomérulonéphrite
AntibiotiquesAminoglycosidesToxicité des cellules tubulaires
Bêta-lactamines
(pénicilline, céphalosporine)
Néphrite interstitielle aiguë
Toxicité tubulaire
Glomérulonéphrite (ampicilline, pénicilline)
QuinolonesNéphrite interstitielle aiguë
Néphropathie cristalline (ciprofloxacine)
MacrolidesNéphrite interstitielle aigu
Rifampicine
Sulfonamides
Tétracyclines
Vancomycine
AntidépresseursAmitriptyline, doxépine, fluoxétineRhabdomyolyse
LithiumNéphrite interstitielle chronique
Diabète insipide rénal
AntihistaminiquesDiphénhydramineRhabdomyolyse
Doxylamine
(attention: contenue dans certains médicaments contre le rhume!)
AntihypertenseursInhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensineAltération de l’hémodynamique glomérulaire, hypotension
Antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II
AntipaludéensQuinineMicroangiopathie thrombotique
AntimycosiquesAmphotéricine BToxicité tubulaire
Altération de l’hémodynamique glomérulaire
Benzodiazépines Rhabdomyolyse
BisphosphonatesAcide pamidroniqueGlomérulonéphrite
Acide zolédroniqueToxicité tubulaire
Inhibiteurs de la calcineurineCiclosporine,
Tacrolimus
Modification de l’hémodynamique 
glomérulaire
Néphrite interstitielle chronique
Microangiopathie thrombotique
Agents chimiothérapeutiquesCarmustineNéphrite interstitielle chronique
Sémustine
CisplatineNéphrite interstitielle chronique
Toxicité tubulaire
GemcitabineMicroangiopathie thrombotique
Interféron-αGlomérulonéphrite
Microangiopathie thrombotique
MéthotrexateNéphropathie cristalline
Mitomycine-CMicroangiopathie thrombotique
DiurétiquesDiurétiques de l’anse, 
diurétiques ­thiazidiquesAltération de l’hémodynamique glomérulaire
Néphrite interstitielle aiguë
Triamtérène Néphropathie cristalline
Plantes médicinalesMélanges de plantes contenant de l’acide aristolochique
(mélanges d’infusions chinoises)Néphrite interstitielle chronique
Produits de contrasteProduits de contraste iodéToxicité tubulaire
Classe de médicamentsProduitsPathomécanisme
Inhibiteurs de la pompe à protonsLansoprazoleNéphrite interstitielle aiguë
Oméprazole
Pantoprazole
Esoméprazole
PsychotropesHalopéridolRhabdomyolyse
PhénytoïneNéphrite interstitielle aiguë
Statines Rhabdomyolyse
ThiénopyridinesClopidogrelMicroangiopathie thrombotique
Hypo-uricémiantsAllopurinolNéphrite interstitielle aiguë
VirostatiquesAciclovirNéphrite interstitielle aiguë
Néphropathie cristalline
FoscarnetNéphropathie cristalline
Toxicité tubulaire
GanciclovirNéphropathie cristalline
AdéfovirToxicité tubulaire
Cidofovir
Ténofovir
IndinavirNéphrite interstitielle aiguë
Néphropathie cristalline

Diagnostic

Considérations relatives au diagnostic ­différentiel

La marche à suivre en cas de suspicion de détérioration de la fonction rénale induite par des médicaments ne diffère pas fondamentalement de celle en cas de suspicion d’autres causes d’insuffisance rénale. Une bonne anamnèse s’avère décisive pour déterminer précisément les relations temporelles, avant tout en cas de polymédication. Il est souvent nécessaire d’interroger activement les patients à ce sujet. Le patient se souvient généralement des médicaments qui lui ont été prescrits, mais il oublie souvent les deux comprimés de Alka-Seltzer® qu’il a pris le matin, alors qu’il était déshydraté, après une nuit blanche. Diverses drogues sont associées à une nécrose tubulaire aiguë et à des altérations tubulo-interstitielles [11]. Le patient aura ­tendance à nier en avoir consommé en présence de ses parents ou éventuellement aussi de son ou sa partenaire.
Outre la relation temporelle, il importe de savoir si la détérioration de la fonction rénale a une cause pré-rénale, rénale ou post-rénale. Pour exclure une cause post-rénale, il est indispensable de réaliser un examen d’imagerie des reins. Des causes pré-rénales, c.-à-d. fonctionnelles, d’insuffisance rénale peuvent être suspectées sur la base de l’excrétion fractionnelle de sodium et/ou d’urée.
Les diurétiques sont les médicaments les plus souvent responsables d’une insuffisance rénale pré-rénale médicamenteuse. Etant donné que la perte volémique sous diurétiques se produit par blocage de la réabsorption du sodium et qu’une quantité accrue de sodium est donc excrétée, l’excrétion fractionnelle de sodium est rarement probante en cas de traitement par diurétiques. A l’inverse, l’excrétion fractionnelle d’urée reste <35% en cas d’insuffisance rénale purement fonctionnelle, et ce même sous traitement par diurétiques [12].
Les insuffisances rénales d’origine rénale associées à la prise de médicaments sont dans la plupart des cas de ­nature allergique-inflammatoire et/ou toxique. L’absence d’albuminurie significative plaide contre la ­présence d’une atteinte glomérulaire et est compatible avec une nécrose tubulaire aiguë ou une néphrite ­tubulo-interstitielle. Il convient de garder à l’esprit qu’une atteinte glomérulaire préexistante avec protéinurie correspondante, par ex. dans le cadre d’un diabète préexistant ou d’une hypertension artérielle, ne protège pas contre la survenue d’une atteinte tubulaire médicamenteuse. Dans la pratique clinique quotidienne, nous nous trouvons donc souvent confrontés à des signaux mixtes, que seule une biopsie rénale peut tirer au clair.

Analyses de laboratoire et analyses urinaires

Un spot urinaire est nécessaire pour calculer l’excrétion fractionnelle du sodium et de l’urée et ainsi faire la distinction entre une insuffisance pré-rénale purement fonctionnelle et un problème intra-rénal. La mise en évidence de protéines et d’albumine dans l’urine est tout aussi importante. Celles-ci sont déterminées dans le spot urinaire par rapport à la quantité de créatinine excrétée. Une protéinurie significative peut difficilement expliquer une atteinte purement tubulaire. La présence d’érythrocytes glomérulaires ou de cylindres érythrocytaires dans l’urine plaide contre une problématique purement tubulo-interstitielle. Les leucocytes, en particulier les granulocytes éosinophiles, ont par le passé régulièrement été évoqués comme paramètre pour diagnostiquer une néphrite tubulo-interstitielle médicamenteuse. Des études récentes ont néanmoins montré que seules environ un tiers des néphrites allergiques médicamenteuses s’accompagnaient d’une éosinophilie dans l’urine et que d’un autre côté, des granulocytes éosinophiles sont également retrouvés dans l’urine dans le cadre d’autres affections rénales [13]. Dans le sang également, l’absence de granulocytes éosinophiles n’indique pas forcément que l’insuffisance rénale n’est pas d’origine allergique médicamenteuse. La mise en évidence de cristaux dans l’urine peut fournir des renseignements quant à l’agent nocif.
Une atteinte tubulaire toxique met un certain temps à se manifester par une élévation de la créatinine ­sérique. Des biomarqueurs réagissant plus rapidement et plus sensiblement que la créatinine à l’endommagement des cellules tubulaires permettraient d’identifier et d’interrompre plus rapidement les médicaments tubulo-toxiques. L’espoir initial que la cystatine C puisse présenter des avantages à cet égard par rapport à la créatinine ne s’est pas confirmé. Aujourd’hui, divers biomarqueurs rénaux sont connus; leur utilisation dans la pratique clinique quotidienne n’est pour l’heure pas généralisée, mais il faut espérer qu’ils permettront à l’avenir un diagnostic non seulement plus rapide, mais aussi plus spécifique [14, 15]. La question de savoir quels biomarqueurs s’imposeront, seuls ou en association, est encore ouverte.

Quand une biopsie rénale est-elle indiquée?

En cas de protéinurie significative (>1 g/l), d’hématurie glomérulaire et/ou d’hypertension de survenue récente, il convient d’opter relativement vite pour une biopsie rénale [16]. En cas de suspicion d’une atteinte tubulo-interstitielle médicamenteuse, il est parfois possible d’attendre avant de réaliser une biopsie, mais uniquement à condition que le médicament suspect puisse être arrêté sans problème et qu’une amélioration de l’insuffisance rénale intervienne rapidement. Pour les nouveaux médicaments et les médicaments vitaux, une biopsie est toujours judicieuse afin que d’une part le patient ne soit pas privé à tort d’un médicament important et que d’autre part des effets indésirables majeurs puissent être identifiés correctement et signalés.

Mesures préventives

Pour la prévention d’une IRA médicamenteuse, il convient non seulement d’avoir des connaissances au sujet des médicaments et mécanismes d’action mentionnés ci-dessus, mais également d’évaluer le profil de risque individuel du patient.
Outre l’âge, les comorbidités et les connaissances au sujet des médicaments actuellement pris (antihypertenseurs, diurétiques, antalgiques de secours et éventuellement, agents chimiothérapeutiques), il est indispensable de recueillir une bonne anamnèse concernant les antécédents d’effets indésirables médicamenteux et d’allergie, ainsi que les hospitalisations, opérations ou examens avec produit de contraste qui ont eu lieu récemment [7].
Par ailleurs, il convient d’identifier et de traiter les facteurs de risque aigus. Le «London Acute Kidney Injury (AKI) Network» les a regroupés sous le terme générique STOP («sepsis, toxicity, obstruction, parenchymal kidney disease»).
La déplétion volémique ainsi qu’une diurèse réduite augmentent le risque d’IRA. Dès lors, le statut volémique actuel devrait, le cas échéant, être déterminé au moyen de paramètres de laboratoire (valeurs des déchets azotés, électrolytes et analyses urinaires) et être optimisé en conséquence. Il convient de noter que le statut volémique peut changer de façon aiguë, par ex. suite à une perte liquidienne due à une diarrhée ou à une polyurie, ou encore après un drainage. Les pertes liquidiennes non visibles, comme par ex. en cas de fièvre ou de perte liée à la constitution d’un troisième espace (en cas de sepsis, d’ascite ou de pancréatite), sont elles aussi pertinentes.
En cas de prise de substances fortement liées à l’albumine, une faible concentration d’albumine entraîne une élévation de la fraction libre du médicament (= rapport entre la concentration libre et la concentration totale du médicament), avec un risque passagèrement accru d’effets indésirables dose-dépendants.
Si un traitement par un médicament potentiellement néphrotoxique est indiqué malgré la présence de facteurs de risque, il convient au moins d’éviter la combinaison de plusieurs médicaments néphrotoxiques. Cela vaut tout particulièrement pour la prise concomitante de céphalosporines et d’aminoglycosides, de vancomycine et d’aminoglycosides, de céphalosporines et d’aciclovir et pour la triple combinaison de diurétiques, d’IECA et/ou d’ARAII et d’AINS. Qui plus est, la dose, la durée totale de traitement, l’intervalle de prise, le moment de prise des médicaments et la voie d’administration (par ex. orale ou intraveineuse) jouent également un rôle [7].
D’après le «London AKI Network», ces mesures préventives peuvent être résumées sous le sigle des «4 M» (tab. 3). Tandis que ces mesures peuvent encore être mises en œuvre en ambulatoire en cas d’IRA de stade AKIN 1, les insuffisances rénales plus sévères (AKIN 2–3) requièrent une surveillance et un traitement stationnaires/néphrologiques.
Tableau 3: Les 4 M sur le modèle du «London Akute Kidney Injury (AKI) Network» pour la prévention de l’insuffisance rénale induite par médicaments.
«Monitor Patient»Evaluation clinique du statut volémique (élasticité cutanée, pression artérielle, remplissage desvaisseaux)
Documentation de la diurèse (protocole apports liquidiens/émission d’urine)
Analyses de laboratoire régulières (paramètres de rétention rénale, électrolytes, analyse ­urinaire, si nécessaire, gazométrie artérielle)
En cas d’instabilité, monitorage
«Maintain Circulation»Hydratation suffisante (de préférence par voie intraveineuse)
Oxygénation
«Minimise Kidney Insults»Arrêt de tous les médicaments néphrotoxiques ou adaptation des doses
Eviter les associations de deux médicaments néphrotoxiques ou plus
Respect et mise en œuvre de mesures spécifiques aux médicaments
Eviter les opérations ou interventions à haut risque, les administrations de produits de contraste, les infections nosocomiales
«Manage the Acute Illness»Traitement et stabilisation des maladies sous-jacentes concomitantes, infections aiguës, sepsis, insuffisance cardiaque ou hépatique
En plus de ces mesures générales, certaines mesures préventives spécifiques ont fait leurs preuves:
La réabsorption tubulaire peut être diminuée par acidification de l’urine en cas de bases faibles et par alcalinisation de l’urine en cas d’acides faibles, permettant ainsi d’accroître l’excrétion. Afin d’éviter une néphropathie cristalline, un syndrome de lyse tumorale ou une rhabdomyolyse, une alcalinisation de l’urine est recommandée. L’administration de chlorure de sodium avant un traitement par amphotéricine B, ­cisplatine ou foscarnet a fait ses preuves. Pour les examens avec utilisation de produit de contraste, une hydratation avant et après l’examen est recommandée; le schéma d’hydratation avec chlorure de sodium dépend du statut cardiopulmonaire et du statut volémique actuel du patient. Des études récentes n’ont pas montré d’avantage du bicarbonate de sodium par rapport au chlorure de sodium. L’administration de N-acétylcystéine est obsolète, car aucun bénéfice n’a finalement pu être démontré [17]. Une hydratation intraveineuse doit dans la mesure du possible toujours être privilégiée par rapport à une hydratation par voie orale. Il convient de réduire au maximum la quantité de produit de contraste et surtout d’interrompre les diurétiques.
Une autre mesure visant à prévenir un syndrome de lyse tumorale réside dans l’administration prophylactique d’hypo-uricémiants. L’allopurinol, en tant ­qu’inhibiteur compétitif de la xanthine oxydase, peut réduire la dégradation de l’hypoxanthine et de la xanthine, et ainsi diminuer la production d’acide urique. Il a été démontré que l’urate oxydase recombinante rasburicase exerçait un effet néphroprotecteur par dégradation directe de l’acide urique en allantoïne, qui est (10 fois) plus soluble que l’acide urique et peut donc être excrétée par les reins.
L’administration prophylactique de probénécide réduit la néphrotoxicité du cisplatine, du sévoflurane, de l’adéfovir, du cidofovir et du ténofovir en diminuant l’absorption tubulaire de ces médicaments par inhibition du transporteur d’anions organiques 1 (OAT1) au niveau de la membrane basolatérale des cellules tubulaires proximales.
Le mécanisme d’action exact de la néphroprotection conférée par l’amifostine avant l’administration de ­cisplatine n’est pas encore totalement élucidé, mais en tant qu’aminothiol phosphorylé, le thiol libre agit entre autres comme piégeur de radicaux.
Les antagonistes calciques peuvent réduire l’action hémodynamique des inhibiteurs de la calcineurine.
Pour les médicaments qui sont difficiles à doser et/ou sont pris sur une longue période, il est recommandé de contrôler régulièrement les concentrations sanguines ou sériques de principe actif («therapeutic drug monitoring» [TDM]). Si possible, il convient pour les médicaments à liaison protéique élevée de déterminer la concentration libre du médicament, car la fraction active liée aux protéines change au cours d’une détérioration de la fonction rénale.

Résumé

En principe, il convient de songer à une implication au moins partielle de médicaments face à toute affection rénale. Les effets indésirables médicamenteux sont fréquents et doivent toujours être envisagés dans le cadre du diagnostic différentiel. Une anamnèse détaillée du patient est indispensable à cet égard, et les ­patients doivent être interrogés avec persévérance concernant les associations temporelles. Qui aurait imaginé il y a 25 ans qu’un traitement par ciprofloxacine pouvait être responsable d’une rupture du tendon d’Achille et qui fait aujourd’hui le lien avec une cure d’aloe vera préalable face à une maladie de Schönlein-Henoch?
Le traitement d’une insuffisance rénale médicamenteuse repose sur l’arrêt immédiat du médicament ­néphrotoxique ou sur des adaptations de la dose, sur la surveillance systématique de la fonction rénale, sur une hydratation suffisante et sur le maintien de la fonction circulatoire. L’utilisation de biomarqueurs rénaux pour un diagnostic précoce et spécifique ne s’est pour l’heure pas encore établie.

L’essentiel pour la pratique

• Les détériorations de la fonction rénale d’origine médicamenteuse sont l’une des causes les plus fréquentes d’insuffisance rénale aiguë acquise.
• Le stade précoce de l’insuffisance rénale aiguë est la plupart du temps asymptomatique et non oligurique.
• Les analyses de laboratoire et urinaires jusqu’à présent disponibles ne montrent l’atteinte tubulaire toxique qu’après un certain temps de latence. Jusqu’ici, aucun nouveau biomarqueur permettant un diagnostic plus rapide et plus spécifique ne s’est établi.
• Les mesures préventives restent donc essentielles et exigent la connaissance des mécanismes physiopathologiques des médicaments néphrotoxiques, ainsi que l’identification du profil de risque individuel du ­patient et des précautions ciblées spécifiques aux médicaments.
Les auteurs n’ont pas déclaré d’obligations financières ou personnelles en rapport avec l’article soumis.
Dr méd. Robert M. Kalicki
Service de dialyse
HFR Fribourg – Hôpital cantonal
Case postale
CH-1708 Fribourg
robert.kalicki[at]h-fr.ch
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