Sans détour
Journal Club

Sans détour

Kurz und bündig
Édition
2020/4748
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2020.08644
Forum Med Suisse. 2020;20(4748):669-671

Publié le 17.11.2020

Afin que vous ne manquiez rien d’important: notre sélection des publications les plus actuelles.

Zoom sur ... Insuffisance mitrale primaire et secondaire

– L’insuffisance mitrale primaire, également appelée dégénérative, résulte d’une anomalie primaire de l’appareil valvulaire mitral (par ex. prolapsus valvulaire mitral).
Dans le cas de l’insuffisance primaire, une procédure interventionnelle est indiquée directement en cas de symptômes cliniques compatibles et de critères échocardiographiques bien définis.
– Les insuffisances secondaires, également appelées fonctionnelles, ­résultent d’altérations de l’oreillette gauche ou du ventricule gauche (par ex. dilatation).
Contrairement aux formes primaires, les médicaments représentent le traitement de premier choix pour les formes secondaires: bêtabloquants, inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, antagonistes des récepteurs de l’angiotensine, diurétiques y compris antagonistes de l’aldostérone, etc.*
Dans les cas sévères ou en cas de réponse inadéquate aux médicaments:
• intervention chirurgicale (annuloplastie, remplacement valvulaire)
• correction par cathéter («Mitra-Clip»).
*Le tableau 2 du «supplemental appendix» de cet article de revue fournit une vue d’ensemble exhaustive et basée sur les preuves les plus récentes de toutes les options médicamenteuses.
N Engl J Med. 2020, doi.org/10.1056/NEJMcp1903331.
Rédigé le 09.10.2020.

Pertinent pour la pratique

Tendances temporelles des anomalies de la réfraction oculaire

Des données portant sur les conscrits autrichiens (âgés de 17 ans) montrent que 5% sont hypermétropes, tandis qu’un sur quatre présente une myopie. Au cours des 35 dernières années, cela correspond quasiment à un doublement de la prévalence de la myopie chez les jeunes adultes (de 13,8 à 24,4%), confirmant les observations faites dans d’autres études épidémiologiques. Cette augmentation est entre autres pertinente en ­raison de l’association avec d’autres pathologies oculaires, telles que les dégénérescences rétiniennes périphériques, le décollement de la rétine et le glaucome. Toutefois, cela concerne avant tout, si ce n’est exclusivement, les formes sévères de myopie.
Rédigé le 13.10.2020.

Nouveautés dans le domaine de la biologie

Auto-anticorps dirigés contre les interférons en tant que facteur de risque d’évolution grave du COVID-19

Le spectre de la symptomatologie clinique (sur le plan quantitatif mais également qualitatif) en cas d’infection par le SARS-CoV-2 est énorme, allant d’une absence de symptômes à une évolution potentiellement fatale. Dans un sous-groupe de 101 patients avec pneumonie grave associée au COVID-19 sur un total de près de 1000, des auto-anticorps neutralisants IgG dirigés contre différents membres du groupe des interférons (de type I) ont été détectés, alors que cela n’était pas le cas dans les formes asymptomatiques et légères (n = 663). Il a été ­démontré in vitro que ces auto-anticorps inhibaient la capacité de ces interférons à bloquer une infection par le SARS-CoV-2. Il existe manifestement des variabilités d’origine génétique, c.-à-d. préexistantes, de l’immunité induite par les interférons, qui peuvent se manifester de cette manière en cas de maladie.
Un mécanisme similaire explique également une partie des évolutions cliniques sévères en cas de tuberculose et d’infections à staphylocoques. La mesure de ces auto-anticorps pourrait donc jouer un rôle important sur le plan pronostique et pour l’individualisation du traitement en cas d’infection par le SARS-CoV-2, mais aussi dans le cadre d’autres maladies infectieuses.
Rédigé le 18.10.2020 sur indication du Dr Eric Dayer, Lausanne.

Pour les médecins hospitaliers

Risques de la biopsie rénale percutanée: plus élevés que ce que l’on pensait?

Depuis que les biopsies rénales peuvent être réalisées sous contrôle échographique et de manière semi-automatique, l’ancienne pratique de la pose restrictive de l’indication (qui était le plus souvent précédée de discussions intensives dans le cadre d’une discussion de cas interdisciplinaire) s’est considérablement libéralisée.
Une étude conduite par des néphrologues français souligne désormais les risques de la technique de biopsie moderne. Entre 2010 et 2018, les effets indésirables de plus de 52 000 biopsies de reins natifs ont été analysés. Malheureusement, les résultats livrent quelques mauvaises surprises: une hémorragie pertinente est survenue dans 5% de tous les cas (près de 2800 patients) et a nécessité une transfusion chez 5% d’entre eux (près de 140 patients). Une hémorragie pertinente était associée à un quasi-doublement du risque de mortalité, même si l’hémorragie était probablement le plus souvent un facteur additionnel et non pas l’unique cause.
Les auteurs présentent un instrument d’évaluation du risque («score»), qui est censé pouvoir prédire les risques hémorragiques particulièrement élevés. Espérons que chez les groupes ayant un risque élevé, cet instrument incitera à déployer tous les moyens nécessaires, y compris alternatifs – sans biopsie – , pour tenter de poser le diagnostic (diagnostic différentiel minutieux, biomarqueurs, etc.).
Clin J Am Soc Nephrol. 2020, doi.org/10.2215/CJN.14721219.
Rédigé le 16.10.2020.

Cela nous a réjouis

Accouchement sûr pour les mères atteintes de COVID-19

Une infection maternelle par le SARS-CoV-2 (allant d’asymptomatique à symptomatique sévère) durant le péripartum était associée à un test RT-PCR faiblement positif chez seulement 2 nouveau-nés new-yorkais sur 100, qui ne présentaient toutefois pas de symptômes cliniques. Dans les infections sévères, l’accouchement a eu lieu environ une semaine plus tôt. La plupart des mères ont gardé leur enfant dans leur chambre à la maternité («rooming-in») et ont allaité. La survenue, la signification clinique et la fréquence d’une transmission verticale aux stades plus précoces de la grossesse restent indéterminées.
La survenue, la signification clinique et la fréquence d’une transmission verticale de SARS-CoV-2 aux stades plus précoces de la grossesse sont indéterminées. © Vividpixels | Dreamstime.com
Rédigé le 18.10.2020.

Cela ne nous a pas réjouis, et même ­triplement

Déceptions (relatives) pour le remdésivir

L’analogue nucléotidique remdésivir est actif in vitro contre le SARS-CoV-2. D’après de précédentes publications, il semble réduire les durées de rétablissement et d’hospitalisation, mais – d’après une analyse actuelle de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) [1] – malheureusement pas la mortalité à 28 jours. L’analyse en question est l’étude «Solidarity», conduite avec plus de 11 000 patients issus de 405 hôpitaux dans 30 pays. De même, il n’y avait pas de différence statistiquement ­significative au niveau de la probabilité d’intubation et de la durée d’hospitalisation. L’étude livre des données d’évolution négatives similaires pour l’hydroxychloro­quine, le lopinavir-ritonavir et les modalités thérapeutiques à base d’interféron. L’absence d’effet de l’hydr­oxychloroquine a été confirmée en parallèle (dans une étude randomisée, contrôlée, mais ouverte) [2], tandis que dans une autre étude (prospective, randomisée, contrôlée contre placebo), le remdésivir a toutefois ­permis de réduire la durée de rétablissement chez des ­patients hospitalisés infectés par le SARS-CoV-2 [3].
2 N Engl J Med. 2020, doi.org/10.1056/NEJMoa2022926.
3 N Engl J Med. 2020, doi.org/10.1056/NEJMoa2007764.
Rédigé le 17.10.2020.

Autorisation rapide: pas toujours une bonne idée

En l’absence de médicaments éprouvés et largement testés, la pandémie de SARS-CoV-2 a conduit à l’autorisation accélérée de médicaments et de tests diagnostiques. Mais attention: les autorisations accélérées à la fois en Europe («European Medicines Agency» [EMA]) et aux Etats-Unis («Food and Drug Administration» [FDA]) ont dans un tiers des cas conduit à l’autorisation de médicaments de faible pertinence thérapeutique par rapport aux autorisations ordinaires. C’est ce qu’a révélé une analyse rétrospective menée par cinq groupes d’évaluation indépendants, mais en partie ­publics. L’évaluation n’a pas (encore) porté sur les autorisations dans le cadre du COVID-19.
Une faible pertinence thérapeutique est à la fois synonyme de faible bénéfice, d’espoirs déçus et d’effets ­indésirables inutiles.
Rédigé le 13.10.2020.

Affirmations contre toute évidence statistique

L’un des chants du cygne lorsqu’une étude se révèle non statistiquement significative (même lorsqu’une valeur p très modérée de seulement <0,05 est choisie) est souvent qu’il y a une tendance à … Cela suggère qu’il pourrait tout de même y avoir un certain effet.
L’exemple le plus récent est l’étude randomisée et contrôlée norvégienne «generation 100», qui a évalué l’effet d’un programme d’entraînement d’intensité modérée et d’intensité élevée sur la mortalité de seniors âgés d’environ 72 ans (répartis de façon homogène en ce qui concerne le sexe). Par rapport au groupe dans ­lequel les participants pratiquaient une activité physique à leur gré, aucun des deux groupes (activité ­d’intensité modérée et activité d’intensité élevée) n’a montré d’avantage statistiquement significatif en ce qui concerne le critère d’évaluation primaire, à savoir la mortalité toutes causes confondues.
La formulation affirmative suivante est préoccupante: «All cause mortality was 37% lower in the high intensity group compared to controls and 49% lower when high intensity was compared with medium intensity. These differences were not statistically significant».
Dans le même numéro, les auteurs s’expriment une deuxième fois et évoquent sans retenue les bienfaits généraux sur la santé. C’est pour le moins dommage pour eux: ils ont choisi le mauvais critère d’évaluation.
Rédigé le 13.10.2020.

Cela nous a également interpellés

Consommation de cannabis durant la grossesse et autisme

La consommation de cannabis est apparemment ­devenue plus fréquente et elle a été légalisée dans de nombreux pays. Les femmes continuent souvent à consommer du cannabis durant la grossesse, avec des préjudices potentiels pour leur enfant: une analyse ­rétrospective de toutes les naissances vivantes entre 2007 et 2012 dans l’Ontario (Canada) montre des élévations statistiquement significatives du risque d’autisme, de déficits intellectuels et de troubles de l’apprentissage chez les enfants [1]. L’évidence statistique est la plus forte pour l’autisme (augmentation du risque de 50%). Remémorons-nous ici le «Sans détour» du numéro 45–46 [2], dans lequel était évoquée la suspicion selon laquelle la consommation de paracétamol durant la grossesse pourrait être responsable de troubles du développement infantile, notamment de trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH).
1 Nature Med. 2020, doi.org/10.1038/s41591-020-1002-5.
2 Forum Med Suisse. 2020, doi.org/10.4414/fms.2020.08629.
Rédigé le 09.10.2020.

Réinfection par des SARS-CoV-2 ­génétiquement différents

Actuellement, quelques rares cas de réinfections isolées par le SARS-CoV-2 ont été rapportés à l’échelle mondiale. Alors qu’un virus génétiquement identique était responsable de la réinfection dans les quatre premiers cas, des différences génétiques considérables ont été constatées chez le patient symptomatique décrit dans le présent article. Le patient avait contracté le COVID-19, confirmé par des tests RT-PCR positifs, en avril et à la fin mai; dans l’intervalle, le patient avait été testé à deux reprises avec un résultat négatif. La sérologie anti-SARS-CoV-2 (IgG/IgM) s’est révélée positive, mais elle n’a été testée qu’une seule fois (neuf jours après le début des symptômes lors de la réinfection) et aucun examen n’a été prescrit pour déterminer s’il s’agissait d’anticorps anti-nucléocapside neutralisants. On ne sait dès lors pas si la première infection avait déclenché une réponse immunitaire adéquate et persistante.
Les auteurs, qui avancent une argumentation prudente, ont constaté que la deuxième infection était ­associée à des symptômes plus sévères, ce qui a à nouveau ravivé la discussion quant à une possible stimulation dépendante des anticorps (après une primo-infection ou une vaccination).
Lancet Infect Dis. 2020, doi.org/10.1016/S1473-3099(20)30764-7.
Rédigé le 18.10.2020.

Pas très sérieux

Quelle position de sommeil faut-il adopter au refuge de montagne?

Le mal aigu des montagnes survient principalement après une ascension rapide à une altitude élevée. Il est associé à un œdème cérébral, qui explique une partie des symptômes, tels que l’insomnie, les céphalées et les troubles visuels. Une surélévation du haut du corps (+30 degrés) durant le sommeil permet-elle d’améliorer ces symptômes en limitant le flux sanguin vers le cerveau? Apparemment pas, car chez 134 alpinistes ayant dormi à la Capanna Regina Margherita dans le massif du Mont Rose (4554 mètres d’altitude), la surélévation du haut du corps durant le sommeil n’a pas entraîné de réduction pertinente des symptômes du mal aigu des montagnes. Conclusion: Il vaut mieux rester à Zermatt et dormir confortablement en position horizontale!
Rédigé le 18.10.2020.
Une version encore plus actuelle du «Sans détour» est disponible «online first» sur medicalforum.ch et également en podcast (en allemand) sur emh.ch/podcast ou sur votre app podcast sous «EMH Journal Club»!