Présentation inhabituelle d'une cause classique de diarrhées chroniques
Potentiellement mortelle

Présentation inhabituelle d'une cause classique de diarrhées chroniques

Was ist Ihre Diagnose?
Édition
2022/40
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2022.08972
Forum Med Suisse. 2022;22(40):664-667

Affiliations
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), Lausanne: a Service de médecine interne; b Service de gastro-entérologie

Publié le 05.10.2022

Une patiente de 66 ans consulte pour des diarrhées huit à dix fois par jour non sanguinolentes avec vomissements et douleurs abdominales diffuses depuis plusieurs jours.

Description du cas

Une patiente de 66 ans consulte pour des diarrhées 8–10 fois par jour non sanguinolentes avec vomissements et douleurs abdominales diffuses depuis plusieurs jours.
Ses antécédents comprennent hypertension artérielle, dyslipidémie, tabagisme actif à 90 unités paquets années, hypothyroïdie stabilisée sous L-thyroxine et cholécystectomie pour lithiase vésiculaire.
A l’admission, elle est fébrile à 40 °C avec une tension artérielle à 87/67 mm Hg, fréquence cardiaque 90/min et fréquence respiratoire 28/min. En outre, nous notons une oligurie, des membres inférieurs froids et l’absence de pouls distaux palpés. L’abdomen est souple à la palpation avec bruits hydro-aériques physiologiques.
Le bilan biologique révèle une leucocytose à 12,1 G/l (norme 4–10), une hémoglobine à 109 g/l, un volume globulaire moyen (VGM) à 103 fl, une protéine C réactive (CRP) à 348 mg/l, une procalcitonine à 90,1 µg/l (norme <0,25), un taux de prothrombine (TP) à 42%, l’albumine à 19 g/l; une insuffisance rénale aiguë AKIN2 (créatinine à 208 µmol/l, débit de filtration glomérulaire estimé [DFGe] à 21 ml/min/1,73m2 ) ainsi que des troubles électrolytiques (Na 147 mmol/l, K 3,2 mmol/l , Ca corrigé 1,79 mmol/l , Mg 0,59 mmol/l). Les tests hépato-pancréatiques sont normaux. La gazométrie artérielle montre un pH à 7,2, pCO2 36 mm Hg, pO2 124 mm Hg, Na 139 mmol/l, Cl 113 mmol/l, HCO3 16,4 mmol/l, lactates 2,06 mmol/l (acidose métabolique à trou anionique normal). L’électrocardiogramme est sans particularité.
Un scanner thoraco-abdominal injecté réalisé en urgence montre un tableau d’entérite avec épaississement pariétal de l’intestin grêle.
L’évolution est rapidement défavorable malgré un remplissage vasculaire avec progression vers une insuffisance circulatoire aiguë nécessitant son transfert aux soins intensifs avec soutien par vasopresseurs et intubation oro-trachéale.
Quelle proposition est la moins adaptée à ce stade?
a) Hémocultures
b) PCR multiplex des bactéries entéropathogènes dans les selles
c) Introduction de ceftriaxone
d) Introduction d’azithromycine
e) Introduction d’imipénème
La patiente présente un tableau de choc avec une insuffisance rénale aigue et une hypocalcémie sévère dans un contexte de diarrhée aiguë et douleur abdominale. Au vu de l’état fébrile avec syndrome inflammatoire et du résultat de l’imagerie, un choc septique sur entérite est le diagnostic le plus probable. Rappelons toutefois qu’une image radiologique d’entérite peut également être d’origine inflammatoire ou ischémique et que ces entités peuvent se compliquer d’une translocation bactérienne. Il convient donc d’effectuer des prélèvements microbiologiques et d’instaurer rapidement une antibiothérapie à large spectre.
En cas de critères de sévérité de la diarrhée aiguë (>8 selles/jour, état fébrile, symptômes depuis plus d’une semaine et/ou besoin d’hospitalisation) le traitement empirique devrait comprendre un traitement par céphalosporine de 3ème génération (couverture de Salmonella spp, Shigella spp, Yersina enterocolitica) et un macrolide (couverture du Campylobacter jejuni).
Une antibiothérapie par imipénème n’a pas sa place dans un contexte de choc septique d’origine communautaire sans facteur de risque pour des bêta-lactamases à spectre étendu (ESBL). Un traitement large spectre par pipéracilline/tazobactam ne ciblerait par ailleurs pas le Campylobacter. Rappelons qu’une couverture des germes anaérobes (par pipéracilline/tazobactam, co-amoxiclline ou métronidazole) ne serait indiquée qu’en présence d’une infection abdominale avec péritonite [1].
La patiente bénéficie d’un traitement antibiotique et d’un nouvel angio-CT qui permet d’exclure une cause ischémique. Les hémocultures et cultures d’urine reviennent stériles. Les PCR dans les selles sont également négatives pour Clostridioides difficile, Adénovirus, Rotavirus, Campylobacter jejuni, Salmonella spp, Shigella spp, Shiga toxine.
Au complément d’anamnèse, il s’agit du 3ème épisode en une année de choc hypovolémique sur diarrhées nécessitant une hospitalisation aux soins intensifs, avec comme diagnostics retenus, une gastro-entérite virale avec déshydratation sévère puis un sepsis d’origine indéterminée, avec résolution des diarrhées entre ces hospitalisations. Il n’y a pas de pathologie particulière familiale, ni de voyage récent, nouvelle médication, changement de régime alimentaire ou comportement sexuel à risque. L’évolution sur le plan hémodynamique est favorable sans introduction de corticostéroïdes, avec sevrage des amines et extubation. L’insuffisance rénale s’avère fonctionnelle avec rapide amélioration après traitement du choc.
Le diagnostic de choc d’origine mixte, à composante septique, hypovolémique sur diarrhées profuses et vasoplégique secondaire à l’hypocalcémie sévère est retenu.
Après résolution du choc, le syndrome inflammatoire diminue rapidement mais il persiste des diarrhées aqueuses profuses (jusqu’à 5–6 l/jour), non sanguinolentes, également pendant le jeûne. Un traitement empirique de lopéramide et cholestyramine ne permet qu’une discrète réduction de leur fréquence.
Quel diagnostic semble le moins probable?
a) VIPome
b) Syndrome carcinoïde
c) Hyperthyroïdie
d) Entéropathie cholérétique
e) Maladie de Crohn
La patiente présente un 3ème épisode de diarrhées profuses sans cause infectieuse évidente. Il convient donc de chercher des causes de diarrhées chroniques. La présentation de choc hypovolémique peut faire évoquer une tumeur neuro-endocrine (VIPome, syndrome carcinoïde, gastrinome,...). Le VIPome peut donner des diarrhées sévères avec hypovolémie, hypokaliémies sévères et dans 20 % des cas un flush cutané. Le syndrome carcinoïde se réfère au flush cutané (rouge-violacé durant 30 secondes à 30 minutes) parfois associé à une hypotension ou un bronchospasme (20% des cas) et dans 80% des cas, à des diarrhées chroniques. Ce syndrome est attribué à la sécrétion de différentes hormones (sérotonine, histamine, kallikréine,...) par des tumeurs neuro-endocrines bien différenciées classiquement originaires de l’intestin grêle (plus rarement le colon ou poumon).
Une hyperthyroïdie sur excès d’hormones thyroïdiennes est à rechercher chez cette patiente substituée pour son hypothyroïdie.
Les diarrhées chroniques, doivent également faire évoquer une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI) comme la maladie de Crohn [3].
5–10% des patientes et patients post cholécystectomie présentent des diarrhées chroniques (entéropathie cholérétique), qui répondent souvent à la cholestyramine (résine liant l’acide biliaire) et ne se présentent pas sous forme de diarrhées profuses avec choc hypovolémique. En l’absence de vésicule biliaire, la bile s’écoule directement et continuellement dans l’intestin grêle, surpassant la capacité de réabsorption de l’iléon terminal, et entraînant un excès d’acides biliaires dans le colon, et donc une diarrhée.
Quel examen n’a pas sa place à ce stade?
a) Sérologie coeliaque
b) Dosage de TSH
c) Coloscopie avec biopsies étagées
d) PET/CT à l’octréotide marqué (68-Ga-DOTATE)
e) Récolte de selles sur 72 heures
La figure S1 dans l’annexe joint à cet article en ligne propose un algorithme de prise en charge des diarrhées chroniques (durée >4 semaines). En l’absence de cause évidente à la diarrhée, la prévalence de l’hyperthyroïdie (>1% et jusqu’à 5% des femmes âgées) et de la maladie coeliaque (1%) justifie de rechercher précocement ces pathologies.
La coloscopie avec biopsies des muqueuses, est indiquée en première intention chez toute personne de plus de 50 ans (recherche de néoplasie), ou en cas de suspicion de diarrhée inflammatoire (colite microscopique, MICI).
L’examen parasitologique des selles fait partie du bilan standard, même si l’anamnèse et la présentation clinique de notre patiente ne sont pas évocatrices. Notons qu’une sérologie VIH serait aussi indiquée afin d’orienter le bilan infectiologique à la recherche d’infections opportunistes courantes et rares [3].
Dans le cas de diarrhées chroniques (durée >4 semaines), une récolte de selles est indiquée dans un 2e temps, afin de déterminer le volume de selles par jour (vraies diarrhées, volume >200 g/jour, versus pseudodiarrhées, volume <200 g/jour), pour identifier le mécanisme responsable (sécrétoire versus osmotique versus inflammatoire (calprotectine), et afin de chercher une stéatorrhée ou perte de protéines dans les selles signant une malabsorption [3]. Si une récolte de selles sur 72 heures n’est pas réalisable, une récolte sur 24 ou 48 heures peut être effectuée. Si celles-ci ne sont pas faisables, on peut déjà déterminer l’élastase fécale et la calprotectine dans un échantillon de selles de un gramme. La durée de récolte sur 72 heures est proposée afin d’avoir un résultat représentatif.
Comme évoqué plus haut, le tableau clinique de diarrhée réfractaire avec hypokaliémie initiale et déshydratation peut évoquer une tumeur neuro-endocrine, diagnostic cependant rare, à rechercher en 2e intention, lorsqu’une étiologie plus fréquente est éliminée (cf. fig. S1 dans l’annexe joint à l’article en ligne). Ainsi un dosage sérique du vasoactive intestinal polypeptide (VIP) serait indiqué en cas de suspicion de VIPome. Le syndrome carcinoïde se dépiste par dosage urinaire de produit de dégradation de la sérotonine, l’acide 5 hydroxy-indol-acétique (5-HIAA). Le PET/CT à l’octréotide marqué (68-Ga-DOTATOC ou 68-Ga-DOTATE) n’est donc pas indiqué à ce stade, mais pourrait être évoqué pour localiser une tumeur neuro-endocrine diagnostiquée par les tests de dépistage ou en cas de forte suspicion clinique sans diagnostic alternatif.
Chez notre patiente supplémentée en L-thyroxine, un excès en hormone thyroïdienne exogène est écarté. La coloscopie et l’examen parasitologique des selles reviennent négatifs. La calprotectine fécale est augmentée à 183 µg/g (norme <50), le volume de selles est augmenté de 782 g/24 heures (norme <200 g/24 heures) avec une importante stéatorrhée (41 g de graisse / 24 heures; norme <7 g/24 heures) évoquant une diarrhée par malabsorption. Les sérologies coeliaques, en particulier la recherche des anticorps anti-transglutaminase tissulaire de type IgA reviennent fortement positives (tab. 1). Rappelons que l’interprétabilité de ces anticorps en cas de négativité est assujettie à l’absence de déficit en IgA à vérifier de manière concomitante [2].
Tableau 1: Tests sérologiques de dépistage de la maladie coeliaque (adaptés de [7])
 Sensibilité % (intervalle)Spécificité % (intervalle)VPP % (probabilité prétest de 5%)VPN % (probabilité prétest de 5%)Commentaires
IgA anti-tTG98 (78–100)98 (90–100)7299Test de dépistage de première intention (sensibilité et VPN élevées, faible coût)
IgG anti-tTG70 (45–95)95 (94–100)4299En cas de déficit en IgA totaux
Anticorps EMA
95 (86–100)99 (97–100)8399IgA EMA: en cas d’IgA anti-tTG faiblement positifs (spécificité élevée, mais variabilité dans l’interprétation des résultats, coût élevé)
IgG EMA: si déficit en IgA totaux
IgA anti-dGP88 (74–100)95 (90–99)4499En 2e intention (suspicion de maladie coeliaque avec tests sérologiques normaux)
IgG- anti-dGP80 (63–95)98 (90–99)6899En cas de déficit en IgA totaux
Chez les enfants <2 ans
VPP: valeur prédictive positive; VPN: valeur prédictive négative; tTG:transglutaminase tissulaire; EMA: antiendomysium; dGP: peptide de la gliadine désaminée.
Quelle est la prochaine étape pour confirmer votre hypothèse diagnostique?
a) Dosage sanguin des vitamines B1, B12, B9, vitamines liposolubles (A, D, E, K), protéines (albumine, préalbumine), ferritine
b) Essai de régime alimentaire
c) Analyses génétiques à la recherche des gènes HLA-DQ2 ou DQ8
d) Oesogastroduodénoscopie avec biopsies duodénales
e) Vidéocapsule endoscopique
La patiente présente une malabsorption très probablement sur maladie coeliaque au vu du résultat des sérologies de dépistage (sensibilité 90%, spécificité 95%). Le seul examen permettant de le confirmer est une oesogastroduodénoscopie (OGD) avec biopsies duodénales.
La vidéocapsule endoscopique permet l’étude de l’intestin grêle, mais sans analyses histologiques possibles. Elle n’est pas indiquée dans le bilan standard initial mais en cas de maladie cœliaque réfractaire, à la recherche de lésion de jéjunite ulcérée, de lymphome invasif ou d’adénocarcinome.
Une épreuve de diète sans gluten n’est pas adaptée pour poser le diagnostic, elle entraînerait d’autre part une normalisation de la muqueuse et empêcherait le diagnostic histologique.
Le bilan vitamino-protéique et ferrique sanguin est un bon reflet d’un syndrome de malabsorption [4] et est nécessaire pour supplémenter les carences, mais ne permet pas le diagnostic étiologique.
Les analyses génétiques ne sont pas systématiques pour poser le diagnostic de maladie coeliaque. Plus de 90% des patientes et patients atteints de maladie cœliaque sont DQ2 ou DQ8 positifs (protéines hétérodimères codées par les gènes HLA-DQA1 et HLA-DQB1); cependant environ 40% de la population générale est également porteuse de ces allèles HLA-DQ2 et/ou DQ8 sans développer la maladie [2]. Le génotypage HLA-DQ est donc surtout utile pour exclure le diagnostic typiquement en cas de discordance entre les sérologies et l‘histologie duodénale / jéjunale.
Dans notre cas, l’OGD révèle une muqueuse gastrique discrètement érythémateuse et un aspect atrophique de la muqueuse duodénale. L’analyse histologique retrouve une atrophie villositaire totale ou sub-totale associée à une hyperplasie des cryptes et une augmentation des lymphocytes intra-épithéliaux confirmant le diagnostic de maladie coeliaque. Le bilan biologique montre une dénutrition protéino-calorique avec une hypo-albuminémie à 20 g/l (norme 35–52) et préalbumine basse associé à une malabsorption (hypovitaminose B9 et D ainsi qu’un TP se normalisant après substitution en vitamine K).
Le diagnostic retenu est une crise coeliaque (tabl. 2). Un facteur précipitant est fréquemment associé, comme une infection tel dans le cas présenté ou une chirurgie récente [1].
Tableau 2: Critères diagnostiques de la crise cœliaque (adaptés de [1])
Apparition aiguë ou progression rapide des symptômes gastro-intestinaux attribuables à la maladie cœliaque nécessitant une hospitalisation et / ou une nutrition parentérale avec au moins deux des symptômes suivants:
Signes de déshydratation sévère, y compris instabilité hémodynamique et / ou modifications orthostatiques
Insuffisance rénale (créatininémie >200 µmol/l)
Acidose métabolique (pH <7,35)
Hypoprotéinémie (taux d’albumine <30 g/l)
Dysélectrolytémie, y compris hypernatrémie/hyponatrémie, hypocalcémie, hypokaliémie ou hypomagnésémie
Perte de poids >5 kg
Troubles neurologiques
Quelle mesure n’est pas appropriée?
a) Substitution des carences en micronutriments et réhydratation parentérale
b) Régime d’éviction au gluten avec éducation diététique
c) Introduction d’une corticothérapie
d) Répétition des sérologies
e) Gastroscopie de contrôle après 3 mois
Le seul traitement efficace ayant fait ses preuves dans la maladie coeliaque est l’essai d’un régime alimentaire d’éviction complète du gluten. La déshydratation et les carences en micronutriments doivent être substituées, mais ne pourront se corriger qu’avec des mesures d’éviction stricte du gluten (orge, blé, seigle). Une brève cure de prednisone ou de budésonide peut être envisagée en cas de crise coeliaque lorsque le traitement standard n’entraîne pas une amélioration rapide.
Un suivi médical périodique est recommandé pour dépistage des complications, suivi symptomatique et de l’observance du régime sans gluten (RSG). A trois mois de RSG strict, un dosage des sérologies (anticorps anti-transglutaminase tissulaire ou anti-endomysium de type IgA; ou IgG en cas de déficit en IgA totale) est préconisé, à répéter à six mois. Une diminution du titre d’anticorps est corrélée à l’adhérence au RSG, une normalisation étant attendue après six à douze mois. Cette normalisation des paramètres sérologiques n’est pas nécessairement associée à une guérison histologique concomitante. La nécessité de pratiquer des biopsies duodénales à répétition afin d’évaluer la guérison histologique et la compliance au régime sans gluten reste controversée selon les auteurs. Cette approche est souvent utilisée dans la pratique, mais débattue chez les patients qui répondent à un RSG avec des sérologies négatives ou en diminution. Le suivi histologique n’est raisonnable qu’après 1–2 ans chez les adultes symptomatiques (pour rechercher une maladie coeliaque réfractaire ou des tumeurs malignes) ou avec sérologies positives persistantes. En cas de bonne réponse au traitement (absence de symptômes ou de signes biologiques de malabsorption), un contrôle annuel sérologique et biologique peut être proposé pendant cinq ans puis de manière plus espacée.
Chez notre patiente, le régime d’éviction au gluten avec suivi diététique, a permis une résolution rapide et complète des diarrhées et des troubles métaboliques. Elle regagne son domicile après un séjour de réhabilitation pour prise en charge de la dénutrition.

Discussion

En cas de diarrhées récidivantes ou chroniques, les investigations devraient suivre l’algorithme proposé dans la figure S1 dans l’annexe joint à l’article en ligne afin de cibler les investigations selon la caractérisation des diarrhées.
La maladie cœliaque, maladie chronique immuno-médiée, secondaire à l’ingestion de gluten, se développe chez des individus génétiquement prédisposés. Avec une prévalence de 1% elle peut se présenter avec un large éventail de manifestations cliniques digestives et extradigestives rendant son diagnostic difficile. Un seuil de suspicion élevé est donc nécessaire afin de dépister précocement la maladie cœliaque pour fournir la thérapie appropriée (tab. 3).
Tableau 3: Situations retenues pour tester la maladie cœliaque (selon «National Institute for Health and Care Excellence Guidelines», [adaptés de 2])
Test coeliaque recommandéTest coeliaque à envisager
Symptômes abdominaux ou gastro-intestinaux inexpliqués persistants
Retard de croissance
Fatigue prolongée
Perte de poids inexpliquée
Ulcères buccaux sévères ou persistants
Carence inexpliquée en fer, vitamine B12 ou folate
Diabète de type 1
Thyroïdite auto-immune
Syndrome de l’intestin irritable
Parentés au premier degré de personnes atteintes de la maladie cœliaque
Troubles métaboliques osseux (diminution de la densité minérale osseuse ou ostéomalacie)
Symptômes neurologiques inexpliqués (en particulier neuropathie périphérique ou ataxie)
Infertilité inexpliquée ou fausse couche à répétition
Augmentation persistante des concentrations d’enzymes hépatiques d’étiologie inconnue
Hypominéralisation des molaires et incisives (MIH)
Syndrome de Down
Syndrome de Turner
La crise coeliaque en est une présentation inhabituelle avec un nombre limité de cas publiés chez l’adulte, probablement sous-diagnostiquée, mais potentiellement mortelle, qui doit être envisagée devant toute personne présentant une diarrhée chronique profuse inexpliquée avec troubles métaboliques sévères, après exclusion d’une cause infectieuse (tab. 2). Le traitement consiste avant tout, en un régime stricte sans gluten, avec soutien nutritionnel intensif, permettant une amélioration clinique rapide dans 50% des cas. L’ajout de corticostéroïdes est envisagé lorsque le traitement standard n’entraîne pas d’amélioration rapide, mais peut contribuer à l’aggravation des troubles électrolytiques [1].
Question 1: e. Question 2: d. Question 3: d. Question 4: d. Question 5: e.
Elodie Gruneisen
Service de médecine interne
Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
Rue du Bugnon 46
CH-1011 Lausanne
1 do Vale RR, Conci NDS, Santana AP, Pereira MB, Menezes NYH, Takayasu V, et al. Celiac Crisis: an unusual presentation of gluten-sensitive enteropathy. Autops Case Rep. 2018;8(3):e2018027.
2 Lebwohl B, Sanders DS, Green PHR. Coeliac disease. Lancet. 2018;391(10115):70–81.
3 Schiller LR, Pardi DS, Sellin JH. Chronic Diarrhea: Diagnosis and Management. Clin Gastroenterol Hepatol. 2017;15(2):182–193.e3.
4 Zuvarox T, Belletieri C. Malabsorption Syndromes. Treasure Island (FL): StatPearls, 2020.
5 Bonis PAL, Lamont, JT. Approach to the adult with chronic diarrhea in resource-rich settings. In: Friedman LS, Grover S, editors. Waltham, MA. UpToDate. (Accessed on August 8, 2022.)
6 Truninger K. Abklärung der chronischen Diarrhö. Praxis. 2016;105(3):153–8.
7 Leffler DA, Schuppan D. Update on serologic testing in celiac disease. Am J Gastroenterol. 2010 Dec;105(12):2520–4.