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Zoom sur … Traitement médicamenteux de l’insomnie
– Les thérapies comportementales et cognitives constituent le traitement de première ligne.
– Dans la pratique, la souffrance des personnes concernées est le plus souvent si élevée (et le temps des médecins qui les prennent en charge si limité) qu’un traitement médicamenteux est souhaité/prescrit, du moins temporairement.
– Les benzodiazépines bon marché sont les médicaments les plus efficaces pour une intervention aiguë (jusqu’à trois mois); le potentiel de dépendance et l’insomnie dite «de rebond» sont toutefois problématiques.
– Les médicaments «Z» (zopiclone, zolpidem et autres) sont également efficaces; cependant, contrairement aux attentes initiales, leur potentiel de dépendance est comparable à celui des benzodiazépines.
– La nouvelle classe des antagonistes des récepteurs de l’orexine (leur nom chimique se termine dans tous les cas par «-orexant») améliore la qualité du sommeil et ne semble pas présenter d’effets indésirables sensiblement plus importants que le placebo.
– Les données sur les effets inducteurs du sommeil des antidépresseurs et des antipsychotiques semblent insuffisantes, contrairement à l’expérience clinique souvent positive.
– Dans l’ensemble, les comparaisons des effets sont très difficiles à réaliser en raison de la complexité et de la diversité des causes de l’insomnie.
The Lancet, 2022, doi.org/10.1016/S0140-6736(22)00878-9.
Rédigé le 22.07.2022.
Pertinent pour la pratique
Prévention secondaire avec des hypolipémiants: traitement d’association comme pour l’hypertension?
Dans l’hypertension essentielle, il a été démontré que les combinaisons de doses faibles à moyennes de médicaments sont souvent plus efficaces que les doses maximales d’une seule substance. Les recommandations de commencer d’emblée par un traitement d’association fixe font partie de certaines lignes directrices. Cela pourrait aussi bientôt se faire dans le traitement hypolipémiant préventif secondaire après un évènement cardiovasculaire majeur: près de 3 800 patientes et patients sud-coréens ont été traités selon une répartition 1:1 soit avec une dose élevée de rosuvastatine (20 mg par jour), soit avec une association de rosuvastatine (10 mg) et d’ézétimibe (10 mg). Les évènements cardiovasculaires à 3 ans étaient similaires dans les deux groupes (environ 9%, «non-inferior»). Cependant, la concentration moyenne de LDL était plus basse sous traitement d’association (1,5 vs. 1,7 mmol/l) et ce dernier était apparemment mieux toléré (significativement moins d’interruptions de traitement). La réduction de la concentration de LDL sous l’association rosuvastatine/ézétimibe était certes plus faible que dans d’autres études comparatives. Toutefois, étant donné que la concentration de LDL est le principal facteur prédictif négatif d’évènements cardiovasculaires futurs, cet effet plus marqué de l’association pourrait avoir une influence positive sur l’évolution de la maladie au-delà de 3 ans (donc plus longtemps que dans cette étude).
Bénéfice de l’évaluation pharmacogénétique avant traitement à l’exemple des épisodes dépressifs majeurs
Des analyses pharmacogénétiques peuvent être effectuées afin de déterminer a priori les probabilités d’efficacité ou d’effets indésirables et le potentiel d’interactions médicamenteuses. Chez près de 1 000 patientes et patients souffrant de dépression majeure («major depressive disorder», âgés en moyenne de 48 ans, 75% d’hommes), les résultats ont été communiqués aux médecins traitants soit avant, soit seulement 24 semaines après le début du traitement. On a donc comparé le choix thérapeutique pharmacogénétique à un choix thérapeutique traditionnel, sachant que dans ce dernier groupe également, les médecins avaient accès aux informations sur les interactions dans la littérature et dans les lignes directrices. La probabilité de recevoir un médicament sans interactions ou avec des interactions moindres était plus élevée (différence hautement significative; p <0,001) dans le groupe pour lequel le traitement avait été choisi sur la base des résultats pharmacogénétiques, la modification du risque allant jusqu’à un facteur 2,5. Après 24 semaines, le nombre de patientes et patients en rémission était également significativement plus élevé dans le groupe avec traitement choisi sur la base des résultats pharmacogénétiques, probablement parce qu’il n’y avait pas ou moins d’adaptations ou de changements de traitement à effectuer. Dans ces situations cliniques urgentes, il est important que les résultats pharmacogénétiques soient disponibles rapidement. Les coûts doivent également être acceptables par rapport aux bénéfices (par exemple, comme ici, obtention plus rapide d’une rémission).
Les restrictions imposées par les autorités en matière de dosage de la vitamine D, surtout à visée préventive, font l’objet de vives discussions. Ce faisant, on oublie qu’il existe toute une série d’indications incontestées, importantes et indispensables pour le dosage de la vitamine D chez de nombreux patients et patientes, qu’il s’agisse de dépister une carence en vitamine D ou une hypervitaminose D. Ces indications avec prise en charge des coûts garantie sont résumées par mécanismes dans les tableaux 1 a et 1 b.
Tableaux 1a et 1b: Principales indications pour le dosage de la vitamine D (25-OH-D) 1a: Suspicion de carences.
Causes/mécanismes
Présentations cliniques
Apports insuffisants ou absorption insuffisante
Régime
Maladies de l'intestin grêle, y compris maladie cœliaque
Maldigestion dans le cadre d'une insuffisance pancréatique
Malabsorption
Chirurgies de bypass gastrique
Synthèse réduite dans la peau
Couleur de peau foncée liée à l'origine ethnique
Exposition insuffisante au soleil (utilisation intensive de crèmes solaires, personnes âgées vivant en institution, etc.)
Peau recouverte par des vêtements (par ex. femmes originaires du Proche-Orient et du Moyen-Orient)
Diminution de la 25-hydroxylation dans le foie
Hépatopathies chroniques (y compris stéatohépatite non alcoolique, cirrhose)
Perte de la protéine liant la vitamine D
Protéinurie, y compris syndrome néphrotique
Bioactivation réduite (1-alpha-hydroxylation)
Insuffisance rénale chronique (DFGe <60 ml/min)
Dégradation accélérée de la vitamine D
Antiépileptiques
Myopathie/faiblesse musculaire/fragilité proximale («ceinture de la hanche»)
Chutes et tendance à la chute
Mécanismes multiples
Ostéopénie et ostéoporose (diagnostic avec des scores de risque clinique tels que le FRAX ou le T-score <-1,0 à l'ostéodensitométrie DEXA)
Suspicion d'ostéomalacie/de rachitisme
Douleurs osseuses, myopathies, douleurs musculaires, hypocalciurie ou quotient calcium/créatinine urinaire bas
Hypocalcémie, hypophosphatémie, phosphatase alcaline (spécifique à l'os) élevée
DEXA: dual energy X-ray absorptiometry; DFGe: débit de filtration glomérulaire estimé; FRAX: Fracture Risk Assessment Tool
1b: Suspicion d’excès de vitamine D.
Causes/mécanismes
Présentations cliniques
Apports trop élevés
>2 000 U de vitamine D3 (définition arbitraire par le «Sans détour»)
Néphrolithiase
Surproduction endogène
Hypercalcémie
Hyperparathyroïdie primaire
Maladies granulomateuses comme la sarcoïdose
Maladies lymphoprolifératives
Une question reste toutefois en suspens: Est-il opportun sur le plan médical d’attendre l’apparition de signes cliniques d’une éventuelle carence en vitamine D ou d’un éventuel excès en vitamine D, ou ne serait-il pas préférable, basé sur un dosage de la vitamine D, de les prévenir?
Des insuffisances rénales aiguës qui n’en sont pas
Différents médicaments peuvent interférer avec le métabolisme de la créatinine, ce qui entraîne une augmentation de la créatinine et du DFGe (débit de filtration glomérulaire estimé), mais pas du DFG mesuré:
– Certains médicaments peuvent inhiber la sécrétion tubulaire de créatinine, par exemple le triméthoprime, la dronédarone, les inhibiteurs de tyrosine kinase (les noms des principes actifs se terminent tous par «-nib»).
– Certains médicaments peuvent eux-mêmes contenir de la créatinine, par exemple la dexaméthasone.
– Certains médicaments peuvent augmenter la production de créatinine, par exemple les glucocorticoïdes, le fénofibrate.
– Plus rarement, certains médicaments entraînent des interférences avec les méthodes d’analyse provoquant une élévation de la créatinine, par exemple la céfoxitine, la flucytosine.
Le chromosome Y contient à peine 71 gènes et disparaît de nombreuses cellules au cours du processus de vieillissement chez les hommes. Cette perte est-elle un épiphénomène du vieillissement ou est-elle impliquée de manière causale dans des maladies/causes de décès dont la prévalence est plus élevée chez les hommes? Deux groupes composés chacun d’environ 40 souris du même âge ont été traités par des greffes de moelle osseuse, le chromosome Y ayant été inactivé/détruit avant la transplantation dans le groupe expérimental. Les souris sans chromosome Y présentaient une mortalité nettement plus élevée après 600 jours; chez ces souris, une fibrose cardiaque était constatée, comme corollaire au cœur âgé humain. Par ailleurs, parmi 15 000 individus de la cohorte UK Biobank, déjà citée à plusieurs reprises dans le «Sans détour», les hommes présentaient une mortalité accrue d’un tiers lorsque plus de 40% des leucocytes circulant en périphérie étaient dépourvus de chromosome Y. Ces données plaident en faveur d’un effet causal de la perte des chromosomes Y. Il n’est toutefois pas clair si la mortalité est vraiment «uniquement» d’origine cardiovasculaire, car dans l’expérience sur la souris, le degré de fibrose ne semblait pas excessif.
Prescription d’antibiotiques: le jugement personnel aussi bon qu’un système de prescription interactif assisté par ordinateur
Dans une étude menée dans les hôpitaux cantonaux de Bellinzona et de Lugano ainsi qu’aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), un modèle d’interaction informatisé («antibiotic stewardship») n’a pas entraîné de baisse significative du taux de prescription d’antibiotiques. Se pourrait-il donc que les collègues exerçant aujourd’hui une activité clinique aient également beaucoup appris à cet égard et réfléchissent pour ainsi dire à deux fois avant de poser les indications d’une antibiothérapie?
Quels enfants ayant des antécédents familiaux développent une maladie cœliaque?
Si un membre apparenté de premier degrés souffre de la maladie coelique, le risque des enfants de développer à leur tour la maladie, est nettement plus élevé. Pour cette raison, un test répétitif de détection d’auto-anticorps (séroconversion) est recommandé dans de nombreux endroits. Mais à partir de quand et à quelle fréquence faut-il faire le test? Les données de suivi prospectives à long terme de l’étude PreventCD* (944 enfants génétiquement prédisposés, suivis en moyenne pendant 8,3 ans) montrent que le risque dépend du sexe (filles), de l’âge et du phénotype HLA-DQ (HLA: human leukocyte antigen). Selon cette étude, le risque de maladie cœliaque est nettement plus élevé que ce que l’on pensait jusqu’à présent. Par exemple, une fille sur trois qui est homozygote pour le locus HLA-DQ2 développera une maladie cœliaque en l’espace de 8 ans. L’étude a également conduit au développement d’un modèle de pronostic qui peut être utile pour planifier des contrôles réguliers (clinique, anticorps anti-transglutaminase de type 2) et en déterminer la fréquence. Le modèle de pronostic utilise les paramètres suivants: sexe, âge et constellation HLA-DQ2 et HLA-DQ8 [3].
*Cette étude n’avait pas réussi à confirmer l’effet protecteur d’un régime pauvre en gluten chez les enfants en bas âge (à partir de 4–6 mois) présentant des antécédents familiaux de maladie cœliaque [2].
Comment se forment les files d’attente à l’enregistrement dans les aéroports?
Peut-être avez-vous fait une telle expérience pendant vos vacances d’été? Comme dans la circulation routière, où seules de petites variations de la vitesse choisie entraînent des embouteillages alors que la vitesse moyenne est par ailleurs identique, le même phénomène se produit au comptoir d’enregistrement des aéroports. Même les ordinateurs ne fonctionnent pas toujours à la même vitesse, et encore moins les personnes au guichet elles-mêmes. Cette variabilité est étonnamment plus importante que les fluctuations du côté de la demande (clients à l’enregistrement). L’étude montre qu’un «resetting» du côté prestataire (redémarrage de l’ordinateur, nouveau personnel ou travail en équipes avec alternance à intervalles rapprochés des équipes par exemple) peut réduire de façon spectaculaire ces fluctuations et donc la probabilité de formation d’une file d’attente. Les auteures et auteurs soulignent également la dimension biologique de leur étude: les enzymes, par exemple, semblent également présenter une variabilité de leur taux d’activité catalytique qui n’a pas été expliquée par ailleurs, ce qui pourrait amener les métabolites à s’accumuler par exemple dans les cellules. Les personnes qui s’intéressent à la manière d’éviter les temps d’attente dans les cabinets médicaux ou aux urgences trouveront éventuellement des indications précieuses dans ce travail.