Mise au point en cas de suspicion de maladie coronarienne stable
Modalités d’imagerie cardiaque disponibles avec leurs avantages et inconvénients

Mise au point en cas de suspicion de maladie coronarienne stable

Übersichtsartikel
Édition
2019/3132
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2019.08335
Forum Med Suisse. 2019;19(3132):512-517

Affiliations
Klinik für Nuklearmedizin, Herzbildgebung, UniversitätsSpital Zürich

Publié le 31.07.2019

La mise au point en cas de suspicion de maladie coronarienne est devenue plus complexe en raison de la diversité des modalités d’imagerie disponibles et le choix judicieux de la modalité d’examen est donc devenu essentiel.

Introduction

Chez les patients qui se présentent avec des douleurs thoraciques, le diagnostic différentiel est vaste, allant d’entités relativement bénignes à des affections potentiellement fatales. Dans la médecine de premier recours en Suisse, 3–5% des consultations médicales sont dues à des symptômes thoraciques, et env. 20% de ces patients sont ensuite adressés à un spécialiste ou à l’hôpital pour des investigations en raison d’une suspicion de maladie coronarienne [1]. Les modalités d’examen disponibles sont multiples et au cours des dernières années et décennies, elles ont en partie connu des avancées technologiques massives. En parallèle, le recours accru à ces techniques suscite parfois des préoccupations dans le contexte de l’augmentation croissante des coûts de santé, mais également concernant leur utilisation appropriée et les risques potentiels pour les patients. Cet article se propose de fournir un aperçu pragmatique de la mise au point chez les patients avec troubles thoraciques stables et maladie coronarienne suspectée, l’objectif étant de montrer comment un bénéfice clinique maximal en termes de diagnostic et de prise en charge des patients peut être atteint grâce au choix judicieux des modalités d’examen (ou de leur combinaison).

Probabilité pré-test

La probabilité pré-test de présence d’une maladie coronarienne forme la base qui doit servir à déterminer la démarche diagnostique initiale. Les lignes directrices actuelles de la Société Européenne de Cardiologie (ESC) permettent d’évaluer rapidement cette probabilité sur la base de quelques caractéristiques cliniques fournies dans un aperçu (tab. 13 dans [2]). Il convient de noter que ce modèle actuel (au même titre que d’autres outils fréquemment utilisés, comme le score AGLA) surestime sans doute toujours considérablement la probabilité pré-test. Sur la base du principe de Bayes, la valeur diagnostique des différentes modalités d’examen dépend de la probabilité pré-test. Si la probabilité pré-test est très élevée, c.-à-d. supérieure à 85%, alors il est possible de partir du principe qu’une maladie coronarienne est à l’origine des symptômes. Dans ce cas, une stratification supplémentaire du risque doit être effectuée, et une prévention secondaire et avant tout un traitement médicamenteux anti-ischémique doivent être établis. En revanche, si la probabilité pré-test est inférieure à 15%, d’autres investigations diagnostiques supplémentaires concernant la présence d’une maladie coronarienne ne doivent pas être mises en œuvre. Cela concerne les femmes avec angor atypique âgées de moins de 50 ans et celles souffrant de douleurs non angineuses âgées de moins de 60 ans. La probabilité pré-test est alors tellement faible que n’importe quel test disponible à cet effet, s’il était positif, ne pourrait pas augmenter suffisamment la probabilité post-test pour pouvoir en retirer un bénéfice clinique. En cas de probabilité pré-test comprise entre 15 et 85%, des examens complémentaires non-invasifs doivent être mis en œuvre. La réalisation primaire d’une angiographie coronaire invasive n’est pas judicieuse dans cette situation, car une maladie coronarienne est uniquement présente chez une fraction des patients [3]. L’angiographie coronaire invasive ne devrait aujourd’hui plus être utilisée comme modalité purement diagnostique pour évaluer une maladie coronarienne au vu de sa nature invasive, de l’exposition aux radiations pouvant atteindre jusqu’à 10 millisieverts (mSv) et finalement de son coût [4, 5]. Il convient bien plus d’identifier préalablement de façon optimale les patients qui peuvent éventuellement profiter d’une revascularisation. A cet effet, l’imagerie non invasive peut apporter une contribution déterminante en augmentant le rendement diagnostique d’une angiographie coronaire invasive éventuellement indiquée par la suite et en légitimant ainsi son utilisation en tant que modalité thérapeutique (après avoir épuisé toutes les options médicamenteuses) [6]. Pour ce faire, deux différentes approches entrent globalement en ligne de compte: l’examen non invasif par tomodensitométrie (TDM) permet une évaluation morphologique/anatomique des artères coronaires; l’examen non-invasif au moyen de modalités fonctionnelles permet quant à lui d’évaluer (de façon directe ou indirecte) la perfusion myocardique.

Angiographie coronaire par TDM

D’une part, la TDM permet de détecter et de quantifier la calcification coronaire lorsqu’elle est réalisée sans produit de contraste (calcium scoring) et d’autre part, moyennant l’utilisation de produit de contraste, elle permet une évaluation morphologique exacte des artères coronaires avec une sensibilité très élevée pour la détection de lésions coronaires (calcifiées et non calcifiées). Dans une population avec une probabilité pré-test faible à moyenne, l’excellente sensibilité conduit à une valeur prédictive négative très élevée. Cela signifie que dans ces cas, l’angiographie coronaire par TDM permet d’exclure une maladie coronarienne avec une certitude très élevée. Elle devrait donc logiquement être utilisée en premier lieu lorsque la probabilité pré-test de maladie coronarienne est inférieure à 50%, autrement dit lorsque l’objectif est dans un premier temps d’exclure une maladie coronarienne (fig. 1). L’angiographie coronaire par TDM présente en revanche une spécificité modérée car, en présence de calcifications coronaires, elle amène systématiquement à plutôt surestimer le degré de sténose. Un avantage majeur de l’examen est la très faible exposition aux radiations, qui est aujourd’hui de façon routinière de l’ordre de 2–3 mSv [7], mais peut même être inférieure à 1 mSv avec les scanners les plus modernes [8]. Par ailleurs, seules de très faibles quantités de produit de contraste, de l’ordre de 30–60 ml, sont nécessaires.
Figure 1: Evaluation non invasive au moyen de l’angiographie par TDM chez une femme de 64 ans avec angor atypique (probabilité pré-test d’env. 28%). Le rendu volumique (A) montre une anatomie coronaire normale, tandis que les reconstructions multiplanaires de l’artère interventriculaire antérieure (RIVA, B), de l’artère circonflexe (RCX, C) et de l’artère coronaire droite (ACD, D) laissent apparaître une petite plaque coronaire calcifiée mais non obstructive avec un rétrécissement luminal <20% dans l’artère interventriculaire antérieure. Une maladie coronarienne obstructive en tant que cause des symptômes est donc exclue. IMC de 24 kg/m 2 . Exposition aux radiations effective de 0,6 mSv. Quantité de produit de contraste de 40 ml.
Outre l’exclusion d’une maladie coronarienne, l’angiographie coronaire par TDM joue également un rôle majeur dans la stratification du risque: elle permet de faire une distinction fiable entre les patients ayant des artères coronaires totalement normales et ceux ayant des lésions coronaires non-obstructives ou justement obstructives, ce qui à son tour a une influence déterminante sur la prise en charge thérapeutique ultérieure. Ainsi, dans une grande étude récemment publiée ayant porté sur plus de 13 000 patients, il a pu être montré que les patients avec calcifications coronaires prononcées profitaient nettement plus d’un traitement prophylactique par statines en termes de prévention de futurs évènements cardiovasculaires que les patients avec peu ou pas de calcifications coronaires [9]. La présence de calcifications coronaires et leur ampleur semblent également jouer un rôle important dans la sélection des patients qui peuvent profiter de l’administration prophylactique d’aspirine, ce qui souligne encore davantage l’intérêt de la stratification personnalisée du risque par TDM [10]. Ceci est tout particulièrement valable au vu des études récemment publiées (ASPREE, ARRIVE, ASCEND), qui ont clairement remis en question le bénéfice d’une administration (générale) d’aspirine dans une optique de prophylaxie primaire. Un prérequis essentiel, et parfois une limitation pour l’angiographie coronaire par TDM, est la sélection et la préparation optimales des patients. Une fréquence cardiaque faible (idéalement <65/min) devrait être visée, ce qui parvient souvent uniquement à être atteint par le biais de bêtabloquants. L’angiographie coronaire par TDM n’est pas appropriée chez les patients avec extrasystoles fréquentes, tachyarythmies, possibilité insuffisante d’abaisser la fréquence cardiaque par bêtabloquants, insuffisance rénale sévère ou allergies sévères connues aux produits de contraste iodés. De même, la modalité n’est en soi pas appropriée chez les patients avec maladie coronarienne connue ayant fait l’objet d’une revascularisation, sauf en complément d’un examen fonctionnel au sens d’une imagerie hybride.

Anatomie versus fonction

Le diagnostic de maladie coronarienne est toujours encore défini par un degré de sténose [2]. Cette définition est et reste problématique, car le degré de sévérité morphologiquement défini d’un rétrécissement luminal ne renseigne la plupart du temps pas sur la pertinence hémodynamique consécutive. En cas de degré de sténose <90%, il est impossible de prédire avec précision si une ischémie est présente (fig. 2) [11]. Concrètement, cela signifie qu’en cas de sténose mise en évidence anatomiquement/morphologiquement, par ex. par angiographie coronaire par TDM, comprise entre 50 et 90%, un test fonctionnel est nécessaire pour pouvoir évaluer sa pertinence hémodynamique. Toutefois, les tests fonctionnels jouent également un rôle essentiel en tant que modalités primaires lorsque des calcifications coronaires considérables sont à redouter ou lorsque la probabilité pré-test est comprise entre 50 et 85%.
Figure 2: Proportion de patients avec réserve de flux fractionnel (FFR) normale et pathologique en fonction du degré de sténose. Une FFR ≤0,8 est évocatrice de la présence d’une ischémie et donc d’une pertinence hémodynamique (source des données: [11]).

Electrocardiogramme de stress

Depuis des décennies, l’électrocardiogramme (ECG) de stress est l’une des modalités non invasives les plus fréquemment employées dans le cadre de la mise au point d’une maladie coronarienne en raison de sa bonne disponibilité, de son faible coût et de l’absence d’exposition aux radiations. Toutefois, sa valeur diagnostique est tout au mieux modérée. En particulier sa sensibilité, de l’ordre de 45–50%, est très basse. En conséquence, les lignes directrices actuelles du NICE pour le Royaume-Uni, par exemple, recommandent de ne plus utiliser l’ECG de stress pour la mise au point d’une maladie coronarienne suspectée [12]. La valeur pronostique de l’ECG de stress reste néanmoins incontestée [13].

Echocardiographie de stress

Tout comme l’ECG de stress, l’échocardiographie de stress est facilement disponible et ne s’accompagne d’aucune exposition aux radiations. Elle repose sur la détection de troubles de la cinétique pariétale myocardique liés à l’ischémie, qui ne surviennent toutefois que relativement tard dans la cascade ischémique, comme c’est également le cas des altérations ECG. Sa sensibilité est dès lors probablement plus basse que celle des examens de la perfusion décrits par la suite. En revanche, elle est très spécifique pour autant que la fenêtre acoustique permette une bonne qualité d’image. Outre son caractère opérateur-dépendant, ce dernier aspect est la principale limitation de cette modalité, étant donné que la qualité d’image peut rester insuffisante même en cas d’utilisation de produit de contraste et que la présence d’un bloc de branche gauche, d’une extrasystolie ou d’une fibrillation auriculaire peut en outre compliquer l’évaluation de la cinétique pariétale.

Imagerie par résonance magnétique

En raison de son excellente représentation des tissus mous avec un contraste élevé et une bonne résolution spatiale, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) cardiaque est prédestinée à l’examen du cœur et des valves cardiaques. Elle représente notamment l’examen de référence pour l’évaluation de la fonction ventriculaire gauche et droite. Les zones de fibrose (par ex. après un infarctus du myocarde) sont également bien détectables après l’application de produits de contraste à base de gadolinium. Enfin, au moyen de la technique dite de premier passage, il est possible d’évaluer directement la perfusion myocardique. Il convient de noter que la résolution spatiale est plus faible pour l’analyse de perfusion que par ex. pour l’évaluation de la cinétique pariétale (env. 1,5 à  2,5 × 1,5 à 2,5 mm) et que dans la routine, le myocarde ventriculaire gauche est uniquement représenté en trois à quatre couches. Ainsi, il n’est par ex. pas toujours possible d’évaluer la perfusion au niveau apical/péri-apical. Alors que l’IRM a pendant de nombreuses années été considérée comme totalement inoffensive, les indices suggérant que l’IRM est également associée à des risques potentiels pour les patients se sont multipliés au cours des dernières années: d’une part, il s’est avéré que certains produits de contraste à base de gadolinium s’accumulaient dans le cerveau, avec des effets pour l’heure incertains. En conséquence, un terme a entre-temps été mis aux autorisations européennes et nord-américaines pour les produits de contraste à base de gadolinium linéaires. Il plane également une incertitude quant aux répercussions des cassures double-brin de l’ADN qui ont été mises en évidence après les IRM cardiaques [14]. L’indication d’une IRM cardiaque doit dès lors être bien fondée, comme c’est le cas pour les examens employant des rayonnements ionisants. L’IRM cardiaque n’est pas appropriée chez les patients claustrophobes, chez ceux ayant une capacité de coopération limitée (retenue de respiration), chez ceux souffrant d’allergies aux produits de contraste à base de gadolinium, d’extrasystoles ou de fibrillation auriculaire et chez ceux présentant une insuffisance rénale sévère.

Tomographie par émission mono­photonique

L’évaluation de la perfusion myocardique au moyen de la tomographie par émission monophotonique (TEMP) repose sur le principe de l’absorption dépendante de la perfusion des radionucléides (le plus souvent traceur marqué au 99mtechnétium) dans les myocytes viables et de la détection consécutive du rayonnement gamma émis en cas de désintégration du radionucléide. Un avantage de la TEMP de perfusion myocardique réside dans la possibilité d’employer les méthodes de stress les plus variées, incluant aussi bien le stress physique (tapis roulant ou ergomètre) que le stress pharmacologique par dobutamine ou vasodilatateurs (régadénoson, adénosine ou dipyridamole). Avec la TEMP, il est possible d’évaluer entièrement pratiquement chaque patient, la seule exception étant les patientes enceintes. Un autre atout de la méthode réside dans les données très robustes disponibles concernant sa valeur diagnostique et pronostique, sur la base de plusieurs décennies d’expérience [15]. Contrairement à l’IRM cardiaque, la TEMP permet une évaluation tridimensionnelle de la perfusion de l’ensemble du cœur et donc une détermination très précise de la charge ischémique. L’exposition aux rayonnements pour une évaluation de la perfusion combinée de repos/stress au moyen de la TEMP s’élève à 8–9 mSv (valeur moyenne européenne). Avec les appareils modernes (dotés de détecteurs au tellurure de cadmium-zinc), une exposition de 5 mSv est usuelle.

Tomographie par émission de positons

A la différence de l’IRM et de la TEMP, pour lesquelles la détection d’une zone myocardique hypoperfusée est toujours liée à la présence d’une zone de référence (vraisemblablement) normalement perfusée (évaluation de la perfusion relative), la tomographie par émission de positons (TEP) permet en outre une quantification absolue de la perfusion myocardique (en ml de sang par masse myocardique et temps) (fig. 3). Cela permet également de détecter des troubles globaux de la perfusion myocardique, par ex. en cas de troubles microcirculatoires diffus ou en cas de situation ischémique compensée dans le cadre d’une maladie coronaire tritronculaire, et explique, outre l’excellente qualité d’image, la valeur diagnostique de cette modalité d’imagerie, qui est supérieure à celle des autres examens de perfusion [16]. Contrairement à une idée largement répandue, l’exposition aux radiations de l’évaluation de la perfusion myocardique au moyen de la TEP est nettement inférieure à celle de la TEMP et, dépendant du traceur et des détecteurs, elle est de l’ordre de 1–3 mSv. Toutefois, la TEP de perfusion myocardique est un examen relativement complexe sur le plan technique, avec en conséquence une disponibilité plus limitée et des coûts comparativement plus élevés.
Figure 3: Tomographie par émission de positons de perfusion myocardique au 13N-ammoniaque chez une patiente de 73 ans avec angor typique (probabilité pré-test de 68%). L’évaluation semi-quantitative de l’examen montre dans les axes courts sélectionnés (A) une hypoperfusion relative (bleu/violet) sous stimulation à l’adénosine (rangée supérieure) au niveau de la paroi latérale et inféro-latérale (flèche blanche) du myocarde ventriculaire gauche, alors qu’une perfusion homogène (jaune) est ­visualisée au repos (rangée inférieure). L’ampleur de cette ischémie est bien visualisée (flèche blanche) dans les ­polar plots (B ; en haut avec l’adénosine, en bas au repos). L’évaluation quantitative au repos (C) montre des valeurs de flux au repos largement normales de l’ordre d’1,2 ml/min/g, tandis que les valeurs de flux hyperémiques (D) sous adénosine sont pathologiquement basses au niveau latéro-basal à inféro-basal (flèche blanche), ce qui conduit consécutivement à une réserve de flux coronaire pathologiquement réduite (<2,0) (E) dans ces zones (flèche blanche). La patiente présente donc une ischémie au niveau du ­territoire d’approvisionnement présumé de l’artère circonflexe en tant que cause de ses symptômes et souffre ainsi d’une maladie coronarienne obstructive pertinente.

Comparaison des modalités et ­recommandations

Comme déjà évoqué au début de cet article, chacune des modalités d’examen décrites présente différents avantages et inconvénients, mais est également associée à des risques potentiels. Parallèlement, la mise au point d’une maladie coronarienne en cas de douleurs thoraciques stables s’effectue le plus souvent de façon hautement élective. Le choix optimal spécifique à chaque patient de la modalité d’examen est dès lors d’autant plus essentiel pour la mise au point d’une maladie coronarienne, et ce non seulement pour atteindre un rendement le plus élevé possible en termes de valeur diagnostique et pronostique, mais également pour minimiser les risques. Aucune des modalités citées ne constitue le meilleur choix dans tous les cas!
Dans la littérature récente, des comparaisons de la précision diagnostique des différentes modalités sont régulièrement et volontiers faites, mais les résultats sont souvent contradictoires. Il y a ainsi d’importants chevauchements au niveau de la sensibilité et de la spécificité des diverses modalités. Le fait incontestable est qu’en cas de probabilité pré-test faible à moyenne, la valeur prédictive négative de l’angiographie coronaire par TDM est tellement élevée que cette modalité constitue un outil idéal pour exclure une maladie coronarienne. En parallèle, la quantification de la perfusion par TEP semble conférer un avantage déterminant par rapport à la TEMP et à l’IRM [17]. En revanche, la valeur diagnostique des autres modalités mentionnées, à l’exception de l’ECG de stress, est probablement à peu près comparable lorsqu’elles sont mises en œuvre par des opérateurs expérimentés, à la condition toutefois que des conditions de stress adéquates puissent être atteintes. En particulier les examens d’imagerie de perfusion offrent des avantages à cet égard, car un stress adéquat peut également être obtenu par stimulation pharmacologique au moyen de vasodilatateurs ou de dobutamine chez les patients chez lesquels un stress adéquat ne parvient pas à être atteint simplement par l’effort physique. Au vu des particularités mentionnées des différentes modalités, la simple comparaison de la sensibilité et de la spécificité s’avère cependant trop réductrice et se révèle peu utile pour émettre des recommandations universellement valables. Cela se reflète également dans les lignes directrices actuellement en vigueur de la Société Européenne de Cardiologie (ESC), qui recommandent certes de réaliser un examen d’imagerie pour la mise au point en cas de maladie coronarienne suspectée mais ne précisent pas de quelle modalité il doit s’agir [2].
Dans ce contexte et compte-tenu de la multitude de particularités spécifiques à chaque patient, qu’il convient de prendre en compte, mais également en raison des développements techniques parfois fulgurants dans les différents domaines, le choix de la modalité optimale ne s’avère pas toujours facile en particulier pour les médecins de premier recours, mais aussi pour les cardiologues installés en cabinet.
Sur la base de la probabilité pré-test, la figure 4 fournit une orientation pragmatique pour le choix du premier examen d’imagerie optimal dans la mise au point d’une maladie coronarienne suspectée. Il convient de noter que l’algorithme présenté ne peut couvrir toutes les éventualités et ne renseigne pas sur les étapes diagnostiques et éventuellement thérapeutiques supplémentaires qui peuvent être nécessaires après le premier examen. Une difficulté supplémentaire est qu’une combinaison de différentes modalités sous forme d’imagerie hybride, par ex. TEMP/TDM, TEP/TDM ou TEP/IRM, doit fréquemment être envisagée. C’est donc en fin de compte souvent l’expert en imagerie cardiaque multimodale qui peut faire office d’interlocuteur. Dans l’idéal, ce dernier maîtrise toutes les modalités d’imagerie avec une grande expertise ou il a du moins un accès illimité à ces modalités afin de pouvoir recommander de la façon la plus objective possible une approche diagnostique, qui est adaptée de façon optimale au patient et à sa problématique au sens d’une médecine de précision moderne et efficace.
Figure 4: Recommandation d’algorithme diagnostique en cas de suspicion d’une maladie coronarienne. 
*Probabilité pré-test conformément au tableau 13 des lignes directrices de l’ESC de 2013 concernant la prise en charge de la maladie coronarienne stable [2].

L’essentiel pour la pratique

• La probabilité pré-test constitue le point de départ pour toute investigation complémentaire en cas de maladie coronarienne suspectée.
• La pierre angulaire d’une stratégie d’investigation optimale est l’imagerie différentielle, ce qui signifie que parmi un spectre multimodal de modalités diverses reposant sur des approches totalement différentes, il convient de sélectionner celle qui est à même de fournir la meilleure réponse pour un patient spécifique.
• Le schéma présenté dans la figure 4 peut servir de guide pragmatique pour le choix de l’examen primaire.
• Le principal interlocuteur est l’expert dans le domaine de l’imagerie cardiaque multimodale, qui dispose d’une expertise dans toutes les modalités.
L’auteur n’a pas déclaré d’obligations financières ou personnelles en rapport avec l’article soumis.
PD Dr méd. Ronny R. Büchel
Klinik für Nuklearmedizin
UniversitätsSpital Zürich
Rämistrasse 100
CH-8091 Zürich
ronny.buechel[at]usz.ch
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