EbM-Flash: Carcinome bronchique

EbM-Flash: Carcinome bronchique

EBM-Flash
Édition
2019/0910
DOI:
https://doi.org/10.4414/fms.2019.08061
Forum Med Suisse. 2019;19(0910):173-174

Publié le 27.02.2019

Cet article est une traduction de la version en ligne des «EbM-Guidelines».

L’essentiel en bref

Il s’agit d’un groupe hétérogène de tumeurs d’origine pulmonaire.
Facteurs de risque connus: en premier lieu ­tabagisme; en plus, exposition professionnelle dans certains environnements de travail particuliers.
Parmi les groupes à risque particuliers figurent entre autres les fumeurs d’âge moyen et plus âgés (>45 ans) avec par ex.
– changement des caractéristiques de la toux habituelle, hémoptysie
– infections des voies respiratoires récidivantes
– perte de poids et détérioration de l’état général
Certains types de carcinome bronchique peuvent toutefois aussi survenir chez des non-fumeurs ou chez des personnes ayant uniquement peu fumé.

Epidémiologie

A l’échelle mondiale, le carcinome bronchique est responsable de plus de décès liés au cancer que toute autre maladie.
L’incidence est corrélée à la prévalence du tabagisme: En Finlande par exemple, l’incidence du carcinome bronchique n’a cessé d’augmenter depuis que de plus en plus de femmes fument. De même, l’incidence ajustée pour l’âge chez les hommes a diminué parallèlement à la diminution du tabagisme chez les hommes; malgré tout, le cancer du poumon est le deuxième cancer le plus fréquent après le cancer de la prostate chez les hommes finlandais.

Causes

Tabagisme:
– Le tabagisme est responsable d’env. 85% des cas de cancer du poumon.
– Il convient néanmoins de signaler que dans env. 15% des cas, les patients ne présentent pas d’antécédents de tabagisme pertinents. La pathogenèse du carcinome bronchique chez les non-fumeurs est différente. Les ­altérations les plus connues des voies de ­signalisation en cas d’adénocarcinomes, qui surviennent avant tout chez les non-fumeurs, sont les mutations de l’EGFR et les réarrangements du gène ALK.
Amiante:
– Les fumeurs avec une exposition significative à l’amiante ont un risque de cancer du poumon près de 100 fois plus élevé que les non-fumeurs sans exposition à l’amiante.
Autres:
– Par ex. arsenic, chrome et nickel (exposition professionnelle)
– Irradiation (avant tout radon en lien avec le tabagisme)
– Prédisposition génétique

Sous-groupes histopathologiques

Carcinomes non à petites cellules – environ 75% de tous les carcinomes bronchiques
– Carcinome épidermoïde (30–40%); pourcentage en déclin
– Adénocarcinome (50%); pourcentage en hausse – différents sous-types avec un comportement clinique et un pronostic variables, par ex. tumeurs à croissance ­lépidique et adénocarcinomes solides
– Carcinome anaplasique à grandes cellules (5%)
Carcinomes à petites cellules – environ 20% de tous les carcinomes bronchiques

Signes et symptômes

Les symptômes sont déclenchés par la tumeur primaire ou des métastases ou ils sont paranéoplasiques. Parmi les symptômes les plus fréquents figurent:
– Toux ou toux différente de la toux habituelle, hémoptysie
– Douleurs (thoraciques ou extra-thoraciques, par ex. liées à des métastases osseuses)
– Dyspnée
– Enrouement
– Perte d’appétit et de poids
Signes évocateurs d’un carcinome pulmonaire:
– Opacité dans le poumon à la radiographie thoracique, avec ou sans augmentation du volume des ganglions lymphatiques hilaires et/ou médiastinaux
– Gonflement des ganglions lymphatiques cervicaux, claviculaires et/ou axillaires
– Signes liés à des métastases (cerveau, os, poumons, foie, glandes surrénales)

Métastatisation

Propagation au sein du thorax:
– dans un autre lobe du même poumon, dans l’autre poumon
– dans les ganglions lymphatiques hilaires, médiastinaux, claviculaires ou axillaires
– invasion directe du médiastin, des grands vaisseaux, de la paroi thoracique, du péricarde, de la plèvre, des corps vertébraux, des côtes ou du plexus brachial
Dissémination dans des organes extra-thoraciques:
– Le cerveau, les os, le foie et les glandes surrénales sont les structures cibles les plus fréquentes.
Au moment du diagnostic, le carcinome à petites cellules est le plus souvent disséminé. La dissémination a typiquement lieu à un stade précoce, à la fois dans des sites locaux et extra-thoraciques. Dans le carcinome à petites cellules de stade limité, les altérations pathologiques sont limitées à un côté du thorax.

Diagnostic

Au stade précoce, la radiographie thoracique représente le principal examen.
Si un carcinome pulmonaire est suspecté sur la base de la radiographie thoracique et des symptômes, le patient doit être adressé à un service de pneumologie pour des examens complémentaires.
Le principal examen complémentaire est la tomodensitométrie (TDM) avec injection de produit de contraste du thorax et de l’abdomen supérieur; en fonction des résultats obtenus à la TDM, les autres examens possibles incluent la bronchoscopie et/ou d’autres méthodes de prélèvement d’échantillons pour examen histologique (biopsies de la tumeur primaire et/ou des métastases). Dans certains cas, la tomographie par émission de po­sitons (TEP) peut fournir des informations supplémentaires pour la stadification de la tumeur.
Il n’existe pas de tests de marqueurs tumoraux sériques appropriés pour le diagnostic du carcinome pulmonaire.
La pertinence des mesures diagnostiques ­invasives devrait être évaluée individuellement (voir options thérapeutiques ci-dessous), car tous les patients n’en retirent pas de bénéfice.
Dans le cadre du diagnostic différentiel, les cicatrices d’anciennes infections et les métastases d’autres tumeurs malignes par ex. sont à prendre en compte.

Prévention

Les jeunes ne devraient pas commencer à fumer.
Les fumeurs devraient arrêter de fumer.
Protection contre l’exposition à l’amiante et aux autres carcinogènes professionnels connus.

Traitement

Le traitement de choix dépend du type cellulaire du carcinome (carcinome non à petites cellules avec ses différents sous-types et éventuelles mutations identifiées vs. carcinome à petites cellules) et de l’expansion de la ma­ladie (stade TNM).
L’état général du patient (OMS 0–4) et ses ­comorbidités ont également un impact sur les options thérapeutiques et leurs bénéfices potentiels pour le patient.
Le traitement de première ligne des carcinomes bronchiques non à petites cellules non disséminés est l’opération: résection d’un lobe pulmonaire ou d’un poumon entier. L’opération radicale est possible chez jusqu’à 25% de ces patients. Après l’opération radicale, certains patients profitent d’une chimiothérapie cytotoxique postopératoire.
En cas d’atteinte locorégionale (env. 15–20% des cas), le patient reçoit une combinaison de toutes les modalités thérapeutiques possibles: opération, chimiothérapie et radiothérapie. La chimiothérapie peut par exemple être mise en œuvre avant l’opération ou parallèlement à la radiothérapie.
En cas de dissémination de la maladie (50–60%), la chimiothérapie, sous forme d’association de deux principes actifs cytotoxiques, représente le traitement de première ligne. En cas de nouvelle progression ultérieure, les patients présentant un bon état général peuvent recevoir une chimiothérapie de deuxième ligne. Certains patients avec cancer disséminé et expression tumorale d’une mutation de l’EGFR ou d’un réarrangement du gène ALK peuvent profiter de nouveaux principes actifs moléculaires ciblés (inhibiteurs de l’EGFR, inhibiteurs de l’ALK). Toutefois, ­aucun traitement curatif connu n’est à ce jour disponible pour le carcinome bronchique disséminé.
Tous les patients avec carcinome pulmonaire non à petites cellules disséminé ne répondent pas aux options thérapeutiques actuellement connues. Il convient de garder à l’esprit que le traitement peut être très accablant.
Le traitement primaire du carcinome bronchique à petites cellules est la chimiothérapie cytotoxique. Le traitement primaire pour un carcinome limité à un côté du thorax est la chimioradiothérapie, c.-à-d. une chimiothérapie cytotoxique combinée à une radiothérapie.
Chez les patients avec maladie disséminée, la radiothérapie peut être employée dans une optique palliative, par ex. en cas de métastases osseuses.
La radiothérapie cérébrale prophylactique peut être envisagée chez les patients ayant présenté une réponse complète ou partielle au traitement primaire, car les métastases cérébrales sont très fréquentes dans cette forme de tumeur.
Pour le traitement symptomatique des patients atteints de cancer du poumon.

Suivi

Le bénéfice d’un suivi systématique pour tous les patients atteints de cancer du poumon n’a jusqu’à présent pas encore été confirmé. Le suivi s’avère pertinent si, en cas de récidive éventuelle, un traitement oncologique actif peut être initié. L’objectif du suivi est d’identifier une récidive ou une progression de la maladie; le suivi peut en outre jouer un rôle lors de l’implémentation d’un bon traitement symptomatique.
Les principaux paramètres à surveiller sont:
– état général, documentation des symptômes
– auscultation des poumons, palpation des régions des ganglions lymphatiques, radiographie thoracique
– examen clinique général, perte de poids, douleurs
Il n’existe pas de preuves concernant le bénéfice ou la pertinence des marqueurs tumoraux sériques pour le suivi.

Pronostic

Carcinome pulmonaire non à petites cellules:
– La survie à 5 ans pour l’ensemble des patients est de 10–13%.
– La survie à 5 ans exclusivement pour les patients ayant fait l’objet d’une opération radicale est de 55–65%.
– En cas de carcinomes disséminés, les taux de survie varient en fonction du sous-type, mais après 2 ans, env. 20% des patients sont encore en vie.
Carcinome pulmonaire à petites cellules:
– En cas de maladie localisée, la durée de survie moyenne s’élève à env. 14–20 mois; en cas de maladie disséminée, elle s’élève à env. 7–12 mois. Le taux de survie à 5 ans est inférieur à 3%.
Révision: Wolfgang Hockl
1 Früh M, De Ruysscher D, Popat S et al. Small-cell lung cancer (SCLC): ESMO Clinical Practice Guidelines for diagnosis, treatment and follow-up. Ann Oncol 2013;24 Suppl. 6:vi99–105.
2 Reck M, Popat S, Reinmuth N et al. Metastatic ­non-small-cell lung cancer (NSCLC): ESMO Clinical Practice Guidelines for diagnosis, treatment and follow-up. Ann Oncol 2014;25 Suppl. 3:iii27–39.
3 Burdett S, Pignon JP, Tierney J et al. Adjuvant ­chemotherapy for resected early-stage non-small cell lung cancer. Cochrane Database Syst Rev. 2015;3:CD011430.